EN IRAN, HASSAN ROHANI ATTAQUÉ DE TOUTE PART APRÈS LA SORTIE AMÉRICAINE DE L’ACCORD NUCLÉAIRE

Il n’a fallu que très peu de temps aux adversaires du président modéré iranien, Hassan Rohani, pour commencer à s’attaquer à cet architecte de l’accord sur le nucléaire, aujourd’hui compromis à la suite du récent retrait de Washington.

Dès le lendemain de l’annonce du président américain, Donald Trump, la presse conservatrice, très critique vis-à-vis de la « naïveté » du président Rohani d’avoir fait confiance à l’Occident en général, et aux États-Unis en particulier, a réclamé une sortie rapide de Téhéran de l’accord nucléaire. Ce traité, signé en juillet 2015 entre l’Iran, les États-Unis, le Royaume-Uni, la France, la Russie, la Chine et l’Allemagne, a entraîné la levée d’une partie des sanctions et permis à l’Iran de sortir de son isolement.

À Téhéran, les mots les plus durs sont venus, le 14 mai, de l’Assemblée des experts, chargée de désigner le successeur du guide suprême (la plus haute autorité du pays) Ali Khamenei après sa mort. « Il faut que le président demande pardon au peuple iranien pour les dégâts causés dans le cadre de l’accord, parce qu’il n’a pas respecté les lignes rouges établies par le guide suprême », peut-on lire dans ce communiqué.

L’ancien président, l’ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad (2005-2013), qui, pendant sa présidence, est resté intransigeant sur le programme nucléaire du pays, est également monté au créneau. Dans une lettre ouverte, il dénonce le gouvernement qui « a imposé avec l’accord des dommages allant jusqu’à 30 milliards de dollars », une référence aux activités nucléaires iraniennes arrêtées ou suspendues dans le cadre de l’accord. C’est également pendant ses années au pouvoir que l’Iran a essuyé d’importantes sanctions, visant notamment sa vente du pétrole, les assurances et le transport.

Face à cette avalanche d’attaques, le président n’est pas resté les bras croisés. Dans un communiqué, le gouvernement a essayé de rappeler que les négociations et l’accord « n’étaient contraires ni à la Constitution, ni aux devoirs du président, ni aux décrets du Conseil suprême de la sécurité nationale », organe sous l’autorité du guide suprême. Une manière pour Hassan Rohani de répondre aux critiques et de rappeler à ses adversaires que rien dans le cadre de l’accord n’a été fait sans l’aval et l’approbation d’Ali Khamenei.

Pour sauver l’accord, le ministre iranien des affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, était à Bruxelles le 15 mai pour rencontrer notamment ses homologues français, allemand et britannique. M. Rohani avait conditionné le maintien de Téhéran dans l’accord à ce que les Européens parviennent à garantir les intérêts iraniens dans le cadre du « deal ».

Dans la rue pourtant, la sortie de Washington de l’accord est qualifiée de mauvaise nouvelle pour les partisans de l’ouverture en Iran, car une telle décision renforcera les plus durs dans la République islamique. Ces derniers n’arrêtent pas de se vanter d’avoir eu raison de marteler que l’Occident n’était guère digne de confiance. « Beaucoup en Iran seront déçus si l’accord s’écroule, explique Arash qui travaille dans une société de publicité et qui a voté deux fois pour le président Rohani. De plus, dans trois ans [lors de la prochaine présidentielle, en 2021], le camp modéré sera très affaibli et aura beaucoup moins de chances de gagner le scrutin. »

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