Une adhérente de la CRIIRAD quelque peu outrée, nous fait part d’une action de l’association « La Voix du Nucléaire » qui offrait au public une banane accompagnée d’un tract : « Cette banane vous est offerte par Stand Up for Nuclear et elle produit une dose de rayonnement plus importante que de vivre à proximité d’une centrale nucléaire pendant un an ! «
Notre réponse
L’argument de la banane revient souvent dans le discours des promoteurs de l’industrie nucléaire. Un certain Georges Charpak avait même très sérieusement proposé de créer une unité qui s’appellerait la DEB (Dose Équivalent Banane) ! La banane est naturellement riche en potassium (K), dont une (petite) fraction est constituée d’une variété radioactive (émetteur béta-gamma) : le potassium 40 (K40). Apparu dès l’origine de la Terre (demi-vie de plus d’un milliard d’années), il est naturellement présent dans l’environnement, en particulier dans les sols. Les plantes et les produits agricoles qui ont besoin de potassium pour vivre, ne font pas de différence entre les variétés de potassium et absorbent le K40 au même titre que le potassium non radioactif. La banane étant naturellement riche en potassium, elle est par conséquent également « riche » en K40 radioactif. Mais elle n’en renferme pas au point d’être détectable avec un compteur Geiger ! Ensemble avec les rayonnements cosmiques, telluriques (provenant du sol), et le radon, le K40 fait partie de la radioactivité naturelle (voir le dossier du TU n°87), à laquelle nous sommes tous exposés. Le premier contributeur en termes d’impact sur la santé (dose efficace) est cependant le radon, et de loin !
Comparer la dose K40 à ce qui est rejeté par une centrale nucléaire est malhonnête
Dans le cas d’une centrale, il s’agit d’une pollution. La radioactivité qu’elle rejette est artificielle, due à une activité humaine : elle pourrait donc être évitée. Dans le cas de la banane, il est impossible d’échapper au K40. L’homme n’en est pas le producteur, ni le responsable. On ne peut pas empêcher une banane d’absorber du K40 …
L’homme peut cependant être responsable, lorsqu’il ajoute du K40 dans son alimentation. Pour les personnes souffrant d’hypertension par exemple, il existe un sel de cuisine où le sodium est remplacé par du potassium… dont une fraction est précisément du K40. Ce type de sel est vendu sous le nom de « low salt ». Sa radioactivité est détectable avec un simple compteur Geiger, tout comme le serait un sac d’engrais potassique utilisé en agriculture.
Cet article est un extrait de la revue « Trait d’union » N°75 de Décembre 2020, revue publiée par la CRIIRAD (Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité, laboratoire agréé), 29 Cours Manuel de Falla, 26000 VALENCE
Commentaires récents