Le parc nucléaire français est touché par un phénomène de corrosion sous contrainte. Le Lidec, laboratoire d’analyses, repère et répare les failles.
Corrosion sous contrainte. Trois mots qui agitent le parc nucléaire depuis octobre 2021 et la détection du phénomène sur le réacteur n° 1 de la centrale de Civaux (Vienne). Il a été depuis détecté ou est suspecté sur une quinzaine de systèmes de sécurité de réacteurs du parc nucléaire français.
Pour résumer, les soudures des tuyauteries des réseaux de refroidissement sont fissurées – de l’ordre du millimètre – par le mouvement du fluide à l’intérieur. Un phénomène « pernicieux » selon l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), car il est détectable uniquement lorsque la fissuration a déjà débuté. Pour détecter le phénomène, il faut donc découper la tuyauterie et la scruter de près avec des microscopes électroniques capables de scruter à l’échelle de l’atome. Ce qui entraîne des opérations longues de maintenance et explique la longueur des arrêts pour examiner et corriger les défauts.
Un laboratoire unique en France
C’est l’œuvre du Lidec, laboratoire d’analyses unique en France présent à la centrale nucléaire de Chinon, visité ce vendredi 28 octobre par Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique. Dans cette structure de 1.200 m2, 150 personnes observent sous toutes les coutures les pièces maîtresses et simples rondelles, visseries.
Pour le phénomène de corrosion sous contrainte, la géométrie des tuyauteries semble être en cause. « La composition du métal est tout à fait conforme aux exigences de qualité, assure Hubert Catalette, directeur délégué maintenance et projet corrosion sous contrainte à EDF. On recherche des matériaux avec la meilleure souplesse, car on craint la rupture nette (des réseaux de sécurité). Ils sont très peu sensibles à la contrainte, mais ne le sont pas totalement insensibles. »
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Depuis les travaux menés par le Lidec, six réacteurs ont bénéficié de réparations et vont être reconnectés au réseau. « Modifier les lignes est impossible, on répare et on optimise pour diminuer les contraintes », indique Hubert Catalette.
Le réacteur n° 3 de Chinon a été arrêté neuf mois après la détection d’une microfissure, qui s’est finalement révélée être un défaut originel. Il va être remis en fonction autour du 3 novembre.
Les quatre réacteurs en production cet hiver
Les quatre réacteurs de Chinon seront alors en production « au cœur de l’hiver, note Stéphane Rivas, directeur de la centrale nucléaire de Chinon. RTE (Réseau de transport d’électricité) a fixé une feuille de route de puissance à 40 GW (gigawatts) en décembre, 50 GW en janvier (sur le plan national, chaque réacteur chinonais produit environ 1 GW), on s’y attelle. »
Recruter
Outre le Lidec, le laboratoire Intra, qui conçoit des robots et drones, ou encore la science du démantèlement grâce au démonstrateur industriel, la centrale nucléaire de Chinon veut rester à la pointe de la filière nucléaire française. En particulier sur le recrutement.
Pour susciter des vocations et trouver les futurs salariés de la filière, des contacts sont noués entre le site industriel et les lycées Rabelais à Chinon et Grandmont à Tours, ainsi qu’une école d’ingénieur tourangelle, pour mettre sur pied des formations du bac pro au bac + 5.
Cette année, la centrale nucléaire de Chinon aura recruté soixante-dix personnes, du cadre à l’agent de maîtrise « à 99 % dans des métiers techniques », note Stéphane Rivas, directeur de la centrale.
Publié le 28/10/2022 à 21h10, mis à jour le 28/10/2022 à 23h51
Photo en titre : Le laboratoire Lidec, unique en France, analyse les tuyauteries qui subissent le phénomène de corrosion sous contrainte. © (Photo NR, Julien Pruvost)
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