À l’issue de la réunion, l’Élysée a fait savoir que le conseil avait « acté l’accélération » des travaux pour développer les petits réacteurs SMR et amorcé « le lancement d’études permettant de préparer la prolongation de la durée de vie des centrales existantes à soixante ans et au-delà ».
Il s’agit de l’un des grands chantiers du second quinquennat d’Emmanuel Macron : la relance du nucléaire français. Le président de la République a donc décidé de réunir, vendredi 3 février, sa « cabine de pilotage » de la politique nucléaire pour tenir « le cap » et la cadence de la relance accélérée de la filière, un an après avoir décidé de ce tournant pour faire face aux crises énergétique et climatique.
Ce conseil de politique nucléaire s’est tenu dans la matinée à l’Élysée en présence de la première ministre, Élisabeth Borne, de plusieurs membres de son gouvernement et des représentants de l’Autorité de sûreté nucléaire et du Commissariat à l’énergie atomique.
À l’issue de la réunion, la présidence n’a pas fait d’annonce nouvelle sur le calendrier de construction de six nouveaux réacteurs de type EPR2, dont les premières mises en services doivent avoir lieu « d’ici au 2035 au plus tard ». Mais l’Élysée a fait savoir que le conseil avait « passé en revue » le programme et a rappelé vouloir mobiliser tous les acteurs « pour assurer que les délais et objectifs seront respectés », dans un communiqué.
Préparer le prolongement de durée de vie des réacteurs existants
Le conseil réuni vendredi a aussi « acté l’accélération » des travaux en vue du développement de petits réacteurs de type SMR. Principale nouveauté issue de la réunion, « le lancement d’études permettant de préparer la prolongation de la durée de vie des centrales existantes à soixante ans et au-delà, dans des conditions strictes de sûreté garanties par l’Autorité de sûreté nucléaire ». L’État fait ainsi sienne la demande de l’exploitant EDF, qui veut étendre cette durée actuellement limitée à quarante ans.
Le 10 février 2022 à Belfort, le président, alors en campagne pour sa réélection, avait défini une politique énergétique qui consacrait son changement de pied sur le nucléaire civil, avec ce vaste plan de relance, ainsi que le développement des énergies renouvelables, et une plus grande « sobriété ». Depuis, l’adoption d’un projet de loi pour développer les énergies renouvelables est en bonne voie au Parlement et le Sénat a voté en première lecture un texte pour accélérer et simplifier la construction de nouveaux réacteurs.
Un conseiller présidentiel a évoqué un « enjeu de mobilisation » de tous les acteurs de la filière pour s’assurer que les délais seront tenus. L’année 2023 est cruciale pour l’avenir énergétique de la France qui doit inscrire dans la loi la part dévolue à chaque filière, et notamment au nucléaire, pour sortir des combustibles fossiles et parvenir à la neutralité carbone en 2050.
« Le président piétine le débat parlementaire »
Certains dans l’opposition se sont offusqués de la convocation de ce conseil présidentiel avant la fin du débat public en cours sur le système énergétique futur et avant que le Parlement ne débatte de la loi de programmation sur l’énergie et le climat, attendue pour l’été. « Le président de la République piétine le débat parlementaire », ont protesté des députés socialistes dans un communiqué, affirmant que « c’est au Parlement de déterminer souverainement le futur mix énergétique de la France ».
« On ne peut pas, d’un côté, dire qu’il y a l’urgence climatique et, de l’autre côté, repousser encore et toujours les décisions », notamment avec la crise énergétique amplifiée par la guerre en Ukraine, répond-on dans l’entourage d’Emmanuel Macron, en assurant toutefois qu’on respecte « l’ordre » des décisions.
L’organisation non gouvernementale France Nature Environnement estime de son côté que cette réunion « pourrait chercher à faire croire que le lancement de la construction de nouveaux réacteurs est inévitable ». Elle déplore un « passage en force » de l’exécutif sur la question, estimant qu’il s’agit là d’« un doigt d’honneur [fait] au débat public ».
« Maintenant que le cap est clair, on a besoin d’une cabine de pilotage et d’un chef à bord », a plaidé l’Élysée. La présidence a insisté sur le caractère historique de cet « immense chantier » pour les nouveaux réacteurs « qui pèse plus de 60 milliards d’euros », même si la question-clé du financement, qui doit encore être tranchée, ne sera pas à l’ordre du jour vendredi.
« C’est important qu’on ait un chef de chantier et qu’on puisse être en capacité de tenir l’intégralité des délais et des coûts », a dit un conseiller, précisant que cette mission serait « confiée à la première ministre ».
Par Le Monde avec AFP, publié le 03 février 2023 à 08h59, mis à jour à 17h33.
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