L’« ALLIANCE DU NUCLÉAIRE » APPELLE L’UE À PLUS D’IMPARTIALITÉ SUR LES RENOUVELABLES

Recherche, financement, développement de projets : les membres de l’ « alliance du nucléaire » réunis mardi (11 juillet) en Espagne appellent la Commission européenne a mettre sur un pied d’égalité le nucléaire et les énergies renouvelables.

Après une première réunion fin février dernier à Stockholm, une deuxième à Bruxelles en mars et une formelle à Paris mi-mai, la France a réuni pour la 4ème fois les États membres et observateurs de l’ « alliance du nucléaire » à Valladolid, en marge du premier conseil informel de l’Énergie sous présidence espagnole du conseil de l’UE.

14 États membres ont pris part à la réunion, dont la Belgique et l’Italie en tant qu’observateurs. Ils n’ont, en conséquence, « pas pris part au débat ni à la rédaction des conclusions » de la réunion, précise un communiqué du ministère de l’Énergie français.

Présent à Paris mi-mai, aucun représentant de l’Estonie et du Royaume-Uni n’ont pris part à la réunion. Un représentant de la Commission européenne était présent, tout comme la ministre de l’Énergie espagnole, Teresa Ribera, en tant que présidente du conseil de l’UE.

Feuille de route

À l’issue de la réunion, les États de l’alliance ont remis à la Commission européenne une feuille de route pour « une nouvelle stratégie sur l’utilisation de l’énergie nucléaire pour l’UE » dans laquelle il est demandé à l’exécutif européen de promouvoir le secteur nucléaire et les projets communs en cours au même titre que ceux en matière d’énergie renouvelables.

Ils s’appuient, pour cela, sur un parallèle entre la stratégie européenne de décarbonation et les énergies reconnues comme compatibles avec la transition, car inscrites dans la taxonomie verte.

« Nous encourageons par ce document la Commission européenne à établir une voie claire pour refléter de manière adéquate le rôle de l’énergie nucléaire dans toutes ses communications et propositions », peut-on lire dans la feuille de route.

Objectif : que dans le respect du principe européen de « neutralité technologique » s’applique à l’ensemble des futurs textes européens en matière de transition énergétique et laisse une place à l’énergie nucléaire pour qu’elle bénéficie « d’un soutien au même titre que les autres sources d’énergie décarbonées ».

Et ce, dans la mesure où de plus en plus d’États membres de l’UE relancent des projets sur leur sol – qu’il s’agisse de réacteurs de grande taille, de petits réacteurs modulaires, ou de recherche. À Paris mi-mai, l’alliance avait ainsi calculé que l’UE compterait environ 150 GW de puissance nucléaire installée à horizon 2050, contre plus de 100 GW en 2022.

Dans ce cadre, il serait donc nécessaire que les politiques et les réglementations européennes garantissent « des incitations suffisantes pour promouvoir les énergies nucléaires en termes d’objectifs, d’efforts pour faciliter les procédures d’autorisation et d’accès au financement », comme pour les énergies renouvelables, peut-on lire dans la déclaration adoptée à l’issue de la réunion.

Qu’il s’agisse du règlement sur l’industrie verte (NZIA) ou la réforme en cours de négociation du marché européen de l’électricité, l’exécutif européen doit ainsi mettre « en œuvre une approche technologiquement neutre » affirment les signataires.

Dans le cadre de la réforme du marché européen de l’électricité, les États de l’alliance en ont profité pour « réaffirmer » la « contribution essentielle » du nucléaire à l’équilibre du réseau électrique. Ils soulignent ainsi l’importance de promouvoir son développement en lui accordant une place équivalente à celle des autres énergies dans la définition des systèmes de rémunération de la production d’électricité.

Les ministres de l’Énergie des 27 États membres ont ferraillé lundi (19 juin), sans trouver d’accord, sur la question du financement des actifs nucléaires existants dans le cadre de la réforme du marché européen de l’électricité.

Financement et recherche

En intégrant le nucléaire dans ces textes, la Commission européenne faciliterait et normaliserait son financement, notamment dans la cadre des règles sur les aides d’État, expliquent les membres de l’alliance.

Ces derniers vont encore plus loin, proposant que l’exécutif européen soutienne la mise en place de partenariats entre les États membres, les investisseurs privés et les banques européennes pour financer le nucléaire. Aussi, faudrait-il, selon eux, que l’UE inclue le nucléaire dans les capacités de l’ensemble des fonds d’investissement européens.

Quant à la recherche, les membres de l’alliance demandent à l’exécutif européen d’apporter un soutien plus étroit. Cela passerait, notamment, par l’accroissement de l’harmonisation des normes de sûreté nucléaire.

La Commission européenne doit, pour cela, répondre aux « besoins » des autorités de sureté nucléaire nationales « pour qu’elles puissent s’acquitter efficacement de leurs tâches », notamment sur « les instruments européens et les initiatives communes », comme les partenariats de développement de petits réacteurs modulaires (SMR).

Dans ce cadre, les membres de l’alliance réhabilitent le traité Euratom signé en 1957 et qui porte l’ambition de promouvoir la recherche en matière nucléaire en Europe.

Or, pour l’heure, « le traité n’est plus à l’échelle économiquement », expliquait dans nos colonnes le député Renaissance, Antoine Armand, suite à la publication de son rapport sur la souveraineté énergétique de la France.

Et les « Amis du renouvelable » ?

En parallèle de cette réunion des états pro-nucléaires se tenait une autre présidée par l’Autriche. Si l’on en croit les protagonistes principaux de la journée de mardi, il ne s’agissait pas d’une réunion concurrente à celle du nucléaire comme peuvent l’être celles du groupe des « Amis du renouvelable ».

Sinon, la France y aurait participé, a avancé le cabinet de Mme Pannier-Runacher. Il s’agissait plutôt d’une réunion de mise au point de la position commune de l’Autriche, de l’Allemagne, du Luxembourg et neuf autres États membres sur la réforme du marché européen de l’électricité.

À noter que, selon nos informations, les Pays-Bas ont participé aux deux réunions post-conseil informel de l’Énergie. Or, les deux groupes d’États ne portent pas les mêmes positions sur la réforme du marché européen de l’électricité.

Par Paul Messad | EURACTIV France, publié le 12 juillet à 10h30, mis à jour à 10h31

Photo en titre : Conseil informel de l’Énergie et de l’Environnement, le 11 juillet 2023 à Valladolid, Espagne. [EFE/Miguel Toña]

https://www.euractiv.fr/section/energie-climat/news/l-alliance-du-nucleaire-appelle-lue-a-plus-dimpartialite-face-aux-renouvelables/