JUSQU’OÙ IRA L’ESCALADE EN CORÉE DU NORD ?

CoréeLe scénario semble immuable : tir d’essai de missile nord-coréen (le dernier est allé s’abîmer vendredi en mer du Japon), déclaration triomphale du leadeur communiste Kim Jong-un proclamant cette fois que « tout le territoire américain est à portée de tir n’importe où, n’importe quand », et condamnation unanime (mais avec des variantes selon les pays) de la communauté internationale… Sauf qu’il existe désormais une inconnue de taille qui rend palpable la montée de la tension internationale : la réaction de Donald Trump.

Depuis qu’il a pris ses fonctions, on sait que le nouveau président américain est aussi imprévisible que son prédécesseur à la Maison-Blanche, Barack Obama, s’était montré d’une constante passivité devant les provocations de Pyongyang. Le ton des Etats-Unis s’est en tout cas durci. Trump a qualifié d’action « imprudente et dangereuse » les essais nord-coréens. Et hier, le secrétaire d’État américain Rex Tillerson a estimé qu’« en tant que soutien économique du programme nucléaire balistique de la Corée du Nord, la Chine et la Russie portent une responsabilité unique et spéciale dans l’augmentation de la menace pour la stabilité régionale et globale ».

Pour la première fois depuis longtemps, des représailles militaires sont ouvertement exprimées par les Américains, qui avaient déjà fait mine en mai d’envoyer sur zone une armada. Les États-Unis et la Corée du Sud ont entrepris un exercice militaire avec missiles à l’appui… Et tous les risques de dérapage que cela comporte.

L’« assurance vie » de Pyongyang

« Le pôle de tension mondiale est en train de se déplacer vers l’Extrême-Orient », relève Juliette Morillot*. Pour cette spécialiste de la péninsule coréenne, « il faut arrêter de considérer les Nord-Coréens comme des fous. Ils sont au contraire d’une très grande rationalité et il est contre-productif de les diaboliser ». Depuis la guerre de Corée en 1950, où les Américains ont été tout près d’utiliser l’arme nucléaire pour en finir avec les communistes nord-coréens, ces derniers sont obsédés par leur sécurité. « Or ils se sentent de plus en plus menacés, explique Juliette Morillot. Leur armée étant aujourd’hui jugée dépassée, ils considèrent donc l’arme nucléaire comme leur assurance vie. »

Même si tous les pays plus ou moins proches de la péninsule coréenne (Chine, Japon, Russie) se satisfont de la partition de la Corée entre le Sud et le Nord, la situation pourrait vite dégénérer. L’armistice du 27 juillet 1953 n’a jamais été signé par la Corée du Sud et aucun traité de paix n’a par ailleurs été ratifié. Techniquement, les pays sont donc toujours en guerre. Ce qui donne un certain relief à l’escalade actuelle.

* Coauteur de « la Corée du Nord en 100 questions », Ed. Tallandier, 384 p., 15,90 €.

Article de Philippe Martinat

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