SCISSION D’EDF À VENIR : DU PLOMB DANS L’AILE POUR LE PROJET HERCULE

Panique en bourse : à en croire la presse spécialisée, les actions EDF sont en berne ce lundi 25 janvier 2021. La faute aux informations du jour concernant les projets de restructuration du géant français de l’électricité. Préconisé par la Commission européenne, le projet Hercule, censé réformer EDF en profondeur et qui attire les faveurs des investisseurs, semble à l’inverse compter de plus en plus de détracteurs. Syndicats, opposition parlementaire, collectivités locales, administration EDF ; même la majorité en place rechigne à soutenir activement ce projet Hercule. Selon BFM Business, la dernière concertation à ce propos entre Bruxelles et l’Élysée se serait ainsi plutôt mal passée. La question revient donc sur le tapis : quel avenir pour Électricité de France ?

Convaincre l’Europe : pas le moindre des travaux du projet Hercule

Le projet Hercule est revenu sur le devant de la scène courant janvier : une délégation française a rencontré la Commission européenne, et plus particulièrement sa présidente actuelle, Ursula von der Leyen. Une rencontre dont les deux parties sont visiblement ressorties insatisfaites — au grand dam du projet de réforme.

La France comme l’Europe campent en effet sur leurs positions, mais toutes deux font indirectement traîner ce dossier en longueur. Côté européen, on aimerait une scission d’EDF, de préférence rapide ; mais on se donne 6 mois supplémentaires pour négocier ce dossier en profondeur. Un délai que ne peut pas supporter la France : avec ces 6 mois de plus, la réforme — quelle que soit sa forme finale — a peu de chances d’être validée par le Parlement d’ici la fin 2021, et donc d’aboutir avant l’échéance du mandat présidentiel et législatif en cours.

La France et l’Europe ont échangé en janvier autour de la possible restructuration d’EDF. Pour l’instant, aucun consensus à l’horizon.

Autre pomme de discorde, le fond du dossier : contre toute attente, l’exécutif français ne semble pas si favorable au projet Hercule. Ainsi, si la question d’une hausse de prix de l’électricité chez EDF en production nucléaire recueille l’opinion favorable de Bercy et de l’Élysée, il n’en va pas aussi aisément pour une scission totale de la régie de l’électricité. De quoi accentuer les crispations lors des réunions au sommet à venir.

Le projet Hercule, initiative de longue date de l’UE, vise en effet à accentuer la concurrence sur le marché de l’énergie en France — seule solution pour redresser les finances d’EDF, qui présentent un manque d’environ 60 milliards d’euros, inacceptable pour la Commission. Pour l’heure, ce déficit empêcherait la construction à venir de 6 nouvelles unités de production nucléaire. Toutefois, la décision concernant ces futures centrales ne devrait pas intervenir avant 2023 ; ce qui peut expliquer pourquoi l’Hexagone ne semble pas particulièrement pressé concernant la réforme Hercule.

Le projet Hercule : séparation d’EDF en trois entités distinctes

Comment se matérialise ladite réforme ? Les différents projets ont connu des évolutions au fil des mois ; mais en l’état, il s’agit notamment de séparer la production et la distribution d’électricité par EDF en trois pôles distincts :

  • un pôle “EDF bleu” conservant le monopole de la production nucléaire, toujours détenu à 100% par l’État ;
  • une section “EDF vert” qui regroupera les unités de confection d’énergie verte chez EDF, ainsi que le distributeur Énedis et les activités commerciales du fournisseur ;
  • une partie “EDF azur” censée gérer la production d’électricité hydraulique en France, sous la forme d’une quasi-régie.

Là où le bât blesse, c’est que les deux derniers pôles issus de la possible scission d’EDF devraient — a priori — être détenus à plus de 50% par des capitaux privés. Une libéralisation inacceptable aux yeux des syndicats notamment, qui craignent pour nombre d’emplois.

Le projet Hercule vise notamment à séparer EDF en trois. Parmi ces branches, seul le secteur nucléaire restera majoritairement sous la houlette de l’État.

Le mardi 19 janvier, il y a moins d’une semaine, était donc l’occasion pour lesdits syndicats de manifester leur opposition au projet Hercule ; une journée de mobilisation et de grève particulièrement suivie chez EDF, avec environ 25% des effectifs en grève notamment. En face, Marianne Laigneau, présidente du directoire d’Énedis, botte en touche côté gestion du réseau électrique français. À l’occasion d’une interview pour le journal La Tribune ce lundi 25 janvier, elle vient démentir une éventuelle privatisation d’Énedis. Pas sûr que cela suffise à convaincre les nombreuses voix qui s’élèvent contre le projet Hercule.

Par Yvain Labrousse, publié le 25 janvier 2021 à 14h28

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