Le 26 septembre 1983, peu après minuit, le système d’alerte du nucléaire soviétique Oko avait détecté 5 missiles lancés depuis les États-Unis se dirigeant vers Moscou. À l’époque Stanislas Petrov, un jeune lieutenant-colonel de l’armée soviétique était en service dans le bunker Serpukhov-15, lieu abritant le nucléaire Oko.
Petrov était l’homme chargé d’alerter les Soviétiques en cas d’attaque nucléaire, ce qui mènerait à des représailles de la part des Soviétiques. Il avait signalé que le nucléaire Oko ne fonctionnait pas et que l’alerte était fausse. Les Américains ne déclencheraient pas une troisième guerre mondiale avec un quintette de missiles. Ce fut un jugement personnel assez osé.
Bien sûr qu’il avait raison. Alors que les États-Unis se préparent à entreprendre une analyse sur le nucléaire pour déterminer l’avenir des armes nucléaires américaines, un rapport de l’institut des Nations-Unies met en garde contre le risque grandissant d’une erreur catastrophique (comme celle qui s’est produite le matin de 1983). La prochaine fois, le lieutenant-colonel Petrov ne sera pas là pour éviter une catastrophe.
Ce lundi, le Département de Défense américain a entamé une nouvelle étude sur son arsenal nucléaire, en vérifiant comment les armes sont conservées, comment les États-Unis les utiliseraient en cas de guerre et de voir si elles présentent une menace pour dissuader les ennemis à ne pas les attaquer. L’étude a été menée sur ordre de Trump dans une note datant du 27 janvier 2017, soit une semaine seulement après son investiture à la Maison Blanche.
L’étude devrait être bouclée par le Pentagone d’ici la fin de l’année. Il s’agit d’une étape essentielle au moment où l’armée américaine cherche à moderniser les différents aspects de son arsenal nucléaire. Mais, un nouveau rapport de 103 pages de l’Institut de Recherche en Désarmement rattaché aux Nations-Unies prévient d’un risque d’accident nucléaire vu que les champs de bataille modernes deviennent plus complexes technologiquement, car dotés de capteurs, de satellites, de drones et de réseaux interconnectés.
Dans le rapport, on peut lire : « une forte dépendance aux systèmes automatisés peut mener à une confiance déplacée tout en introduisant de nouveaux points de vulnérabilité ». Ces points de vulnérabilité sont appelés « interactions cachées ». Cela signifie qu’un capteur ou un programme informatique commettant une erreur d’interprétation sur des données et présentant une fausse information est susceptible de provoquer un nouvel accident. L’événement de 1987 en est un bon exemple.
Les satellites Oko avaient confondu une tache solaire très inhabituelle au-dessus de nuages à haute altitude à une attaque de missiles, d’où la fausse alerte. Prenez ses satellites, combinez-les avec des capteurs sur des drones et des données en provenance d’autres sources, y compris de nouvelles technologies supposées pour détecter des lancements de missiles et l’image devient beaucoup plus saturée et plus trouble.
Dans le rapport, les auteurs écrivent: « les interactions complexes et les systèmes étroitement liés aux arsenaux nucléaires rendent l’hypothèse d’un accident de guerre plus probable ». A cela s’ajoute le fait que le nombre d’États qui ont accès aux armes nucléaires augmentent ainsi que le nombre de plateformes qu’ils pourraient utiliser pour livrer ces armes.
Prenons en compte les projets très controversés des États-Unis de se doter d’une arme à long rayon d’action ou le LRSO, un énorme missile de croisière qui peut être envoyé à un avion de chasse. D’après certains rapports, les États-Unis envisagent même de se doter de drones armés de nucléaire (qui seraient commandés à distance par des pilotes humains et le degré de sérieux fait l’objet de débat).
D’après les auteurs du rapport, cela paraît être des potentiels extraordinaires mais ils augmentent les chances d’un accident nucléaire ou des représailles car de telles armes considèrent tout avion de chasse ou de drone comme une menace nucléaire potentielle aux yeux d’un adversaire.
« La propagation des autres systèmes, tels que les missiles de croisière et les drones et leurs usages fréquents dans les conflits armés peuvent aussi s’ajouter à la complexité de la situation de la même manière que peut l’être le développement des potentiels à détecter les missiles », écrit Pavel Podvig, expert russe en matière d’armement.
L’expert russe note que la perte de confiance dans les relations entre les États-Unis et la Russie n’augure pas une stabilité saine. « L’intensité des interactions entre l’arme américaine et russe, bien que plus calme que durant l’époque de la Guerre Froide, ne montre pas un signe de déclin », dit-il.
Les connections digitales qui émergeront entre les armes nucléaires et d’autres systèmes sont un autre facteur de menace. « Le mythe selon lequel les installations et les plateformes nucléaires sont tenues par l’air (signifiant qu’ils ne sont pas liés à internet) perd de sa crédibilité au moment où les installations nucléaires sont de plus en plus informés des cyber menaces », précise un des auteurs du rapport.
Ils identifient plusieurs cybers vulnérabilités potentielles dans le commandement nucléaire et dans les systèmes de contrôle. Pas dans les armes nucléaires elles-mêmes, mais au niveau des technologies qui les entourent et les méthodes par lesquelles les opérateurs contrôlent ces armes et prennent des décisions sur la manière dont ils les utilisent. Les cibles principales identifiées par les chercheurs sont : les communications entre les centres de commandement et de contrôle, le ciblage des informations à partir des stations basées au sol et les systèmes autonomes robotiques au sein de l’infrastructure stratégique.
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L’article a été entièrement traduit de l’anglais au français par Cheikh DIENG, fondateur et rédacteur en chef du site d’information www.lecourrier-du-soir.com
https://lecourrier-du-soir.com/2017/04/23/États-unis-vs-russie-des-chercheurs-de-lonu-previennent-dun-risque-de-guerre-nucleaire/
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