SUITE AUX NOUVELLES SANCTIONS DES ÉTATS-UNIS CONTRE L’IRAN, TÉHÉRAN PRÔNE LA LOI DU TALION

Iran sanctionsLe 20 avril 2016, la Cour suprême américaine avait décidé de saisir 2 milliards de dollars des fonds iraniens gelés aux États-Unis.

Le président iranien, Hassan Rohani, a affirmé hier que son pays répondrait de «manière appropriée» aux sanctions américaines, rapporte l’AFP. En revanche, il assure que son pays reste engagé par l’accord nucléaire conclu en juillet 2015 avec les grandes puissances, à savoir, les États-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni ainsi que l’Allemagne (le Groupe 5+1). «La République islamique d’Iran respectera toujours ses engagements internationaux», a déclaré le président Rohani.

Mais si les États-Unis veulent «imposer de nouvelles sanctions sous n’importe quel prétexte, la nation iranienne répondra de manière appropriée», a-t-il indiqué. Et de poursuivre : «Nous ne pardonnerons pas les violations faites par les Américains.» Il a accusé les États-Unis de «duplicité». «D’un côté, ils envoient des rapports officiels au Congrès confirmant que l’Iran respectait complètement l’accord nucléaire, et de l’autre ils imposent de nouvelles sanctions en avançant diverses excuses, contraires à la logique et l’esprit» de l’accord » a-t-il observé.

La veille, les États-Unis ont frappé l’Iran de nouvelles sanctions juridiques et financières contre son programme de missiles balistiques et ses activités «déstabilisatrices» au Proche-Orient, même s’ils comptent conserver l’accord sur le nucléaire. Accord en vertu duquel l’Iran, soupçonné malgré ses démentis de chercher à fabriquer l’arme nucléaire, a accepté de réduire pendant au moins dix ans ses activités nucléaires sensibles contre la levée partielle et progressive de sanctions internationales.

Mardi dernier, la diplomatie iranienne a menacé de «sanctionner de nouveaux individus et entités américains ayant agi contre le peuple iranien et d’autres peuples musulmans de la région». De son côté, le Parlement iranien a ouvert une procédure pour voter une loi de renforcement du programme balistique et de la force Qods des Gardiens de la Révolution, pour lutter contre les actions «terroristes» et «l’aventurisme» de Washington.

Au-delà de l’accord, Washington a maintenu d’autres sanctions visant le programme de missiles balistiques de Téhéran ainsi que son soutien à des mouvements armés au Moyen-Orient. Les grandes banques européennes, qui ont généralement des filiales sur le territoire américain, hésitent à établir des relations avec l’Iran, craignant des poursuites judiciaires et des amendes aux États-Unis. Les capitales occidentales se souviennent de l’amende de 8,9 milliards de dollars infligée en 2014 par la justice américaine à BNP Paribas pour des transactions en Iran.

Par ailleurs, la levée des sanctions internationales conformément à l’accord signé avec le Groupe 5+1 est assortie d’une clause dite «snap back», prévoyant un rétablissement automatique des sanctions par le Conseil de sécurité de l’ONU si Téhéran ne tient pas ses engagements. Le 20 avril 2016, la Cour suprême américaine a décidé de saisir 2 milliards de dollars des fonds iraniens gelés aux États-Unis.

Cet argent est réclamé par les familles d’un millier de victimes américaines d’attentats commis ou parrainés par Téhéran, selon Washington. Entre autres, les proches de 241 soldats américains tués le 23 octobre 1983 dans deux attentats-suicide qui ont frappé les contingents américain et français de la Force multinationale de sécurité à Beyrouth et les victimes d’un attentat en 1996 contre les tours de Khobar en Arabie Saoudite, qui a tué 19 Américains.

Cette décision a été qualifiée, le lendemain par le ministère des Affaires étrangères iranien, de «vol». Le 17 mai de la même année, le Parlement iranien a voté une loi obligeant le gouvernement à réclamer des dommages aux États-Unis pour les «actions hostiles et les crimes» commis contre l’Iran depuis 63 ans.

«Le gouvernement a le devoir de prendre les mesures nécessaires pour compenser les dommages (matériels et moraux) causés par les États-Unis» à l’Iran ou «à ses ressortissants depuis 63 ans», est-il relevé dans le texte. Il y est cité «les dommages matériels ou moraux» causés par les États-Unis depuis le coup d’État contre le gouvernement nationaliste de Mohammad Mossadegh en 1953, dont ceux commis durant la guerre Iran-Irak (1980-1988), ceux provoqués par la destruction de plateformes pétrolières dans le Golfe ou encore l’espionnage mené par les Américains contre l’Iran.

Lourd passif

En 1953, les agences de renseignement américaines et britanniques organisent un coup d’État pour faire chuter le Premier ministre démocratiquement élu, Mohammad Mossadegh, qui a voulu nationaliser l’industrie pétrolière iranienne. Le shah d’Iran, Mohammed Reza Pahlavi, soutenu par les États-Unis, prend le pouvoir.

Il est contraint de quitter le pays en janvier 1978 après des mois de manifestations et des attaques contre ses règles et ses lois par des opposants séculiers et religieux. Le 1er février 1979, Khomeiny entre à Téhéran consacrant ainsi le pouvoir des ayatollahs. Les événements se précipitent. Le 4 novembre de la même année, des étudiants occupent l’ambassade américaine dont le personnel ne sera libéré que le 20 janvier 1981. En septembre 1980 est déclenchée la guerre irano-irakienne suite à l’agression des troupes de Saddam Hussein.

Au paroxysme de ce conflit, éclate le scandale de l’Irangate. Il s’agit de vente secrète d’armes américaines à l’Iran. L’argent récolté sera versé aux contre-révolutionnaires nicaraguayens engagés dans une guerre contre le gouvernement sandiniste. Aujourd’hui, les frictions entre Washington et Téhéran constituent un des facteurs d’instabilité dans la région du Moyen-Orient où chacun compte des alliés.

Les contentieux entre les deux pays sont complexes : l’équilibre militaire dans le Golfe, Israël, Bahreïn, Liban, Syrie, Yémen, entre autres. Des écheveaux difficiles à dénouer. Jusque-là, ils ont évité la confrontation militaire directe. Mais les guerres par procuration sont alimentées pour faire perdurer des conflits dont chaque rival voit la solution en fonction de ses intérêts nationaux.

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