Par une simple manipulation de leurs systèmes informatiques. C’était effrayant et c’est son anniversaire.
Cela fait déjà dix ans que le monde a découvert l’existence de la première arme cyber-physique de l’histoire : Stuxnet, un virus conçu par des hackers non-identifiés pour saboter le programme nucléaire iranien. La république islamique essayait de se doter de capacités nucléaires en toute opacité depuis presque cinquante ans quand le malware a pénétré l’une des usines dans laquelle elle faisait produire de l’uranium 235, du côté de la ville de Natanz. En agissant sur les systèmes informatiques de l’usine, Stuxnet est parvenu à causer des dégâts physiques sur ses installations. C’était en 2010. Voici l’histoire de cette effrayante première.
Tambouille nucléaire
L’usine de Natanz produisait de l’uranium faiblement enrichi, le combustible radioactif dont dépendent la plupart des réacteurs nucléaires du monde. Pour obtenir ce matériau contenant 3 à 5% d’uranium 235 (235U), elle utilisait la méthode de l’ultracentrifugation. Ce procédé commence par l’extraction de minerai d’uranium dans des mines. Ces cailloux d’apparence parfois banale, parfois douteuse contiennent plus de roches sans intérêt que d’uranium naturel. Ils subissent donc un traitement chimique au terme duquel les molécules radioactives sont isolées sous la forme d’une poudre jaune vif appelée yellowcake. Une nouvelle réaction chimique permettra de convertir le yellowcake en hexafluorure d’uranium (UF6), une substance aux propriétés physiques arrangeantes : il suffit en effet de légers changements de température et de pression pour la faire passer d’un état à l’autre.
L’UF6 est la matière première de la méthode d’ultracentrifugation. Transformé en gaz, ce produit hautement toxique et radioactif est injecté dans des cylindres de métal sous vide, les centrifugeuses, qui vont l’entraîner dans une rotation effrénée : plusieurs dizaines de milliers de tours par minute, aux limites et parfois au-delà de la vitesse du son. Sous l’effet de la force centrifuge, les différentes molécules qui composent l’hexafluorure d’uranium vont alors se séparer selon leur masse : l’uranium 235 tant recherché se concentre au cœur de la machine tandis que les molécules de moindre intérêt, plus lourdes, migrent vers les parois. Au terme du cycle de production, ces vapeurs respectivement désignées comme « enrichies » et « appauvries » en uranium sont extraites de la centrifugeuse.
« Malheureusement pour les spécialistes du nucléaire locaux et heureusement pour les développeurs de Stuxnet, ce procédé souffrait de nombreuses faiblesses »
Pour obtenir de l’uranium suffisamment enrichi dans des délais intéressants, l’usine de Natanz utilisait un système de cascade : ses quelques 5 000 centrifugeuses étaient organisées en chaînes de quinze machines interconnectées par des valves. L’UF6 était injecté dans la centrifugeuse numéro dix, qui envoyait son gaz enrichi vers la machine suivante et son gaz appauvri vers la machine précédente, et ainsi de suite. Une extrémité de la chaîne rejetait donc un composé aux concentrations d’uranium 235 satisfaisantes, tandis que l’autre extrémité recrachait un composé fortement appauvri. L’usine produisait ainsi 350 kilogrammes de combustible à 3,5% de 235U par mois. Malheureusement pour les spécialistes du nucléaire locaux et heureusement pour les développeurs de Stuxnet, ce procédé souffrait de nombreuses faiblesses…
La suite de cet article (assez long) est en accès libre sur : https://www.vice.com/fr/article/v7mgeb/comment-le-virus-stuxnet-a-detruit-les-installations-nucleaires-iraniennes
Par Sébastien Wesolowski, publié le 26 octobre 2020 à 8h37
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