La campagne électorale n’a guère abordé la problématique nucléaire alors que la situation de cette industrie n’a jamais été aussi dégradée. Au mieux des candidats se sont prononcés pour une « sortie du tout nucléaire ». Mais on ne peut pas dire que ce sujet ait été au cœur des débats. Pire encore, on ne peut que déplorer un appauvrissement de la critique antinucléaire. Un sursaut s’impose !
Une campagne présidentielle qui a esquivé les questions écologiques…
Triste bilan du quinquennat de François Hollande, le nucléaire a quasiment disparu du débat public. Si en 2011, ce fut un thème central de la campagne présidentielle [1], cette question n’occupe plus aujourd’hui qu’une place marginale dans le discours électoral [2].
À l’exception du NPA toujours fidèle à la revendication de sortie du nucléaire en dix ans [3], on ne peut pas dire que les candidats aient fait preuve d’audace au cours de la courte campagne présidentielle [4]. L’atome a pu compter sur des soutiens fidèles [5] sans être sévèrement inquiété. Tout au plus les partisans d’une sortie du nucléaire se sont inscrits dans la continuité de la Loi de Transition se contentant de déclarer qu’ils mettront en œuvre ce qui a été voté par la représentation nationale pour atteindre « 100% renouvelables en 2050 [6] »… sans remettre fondamentalement en cause le lien entre nucléaire civil et nucléaire militaire [7]
Alors que la catastrophe à Fukushima se poursuit [8] et que la situation de l’industrie nucléaire est calamiteuse [9] tout cela a de quoi surprendre. C’est en tout cas la preuve d’une mise l’écart des questions écologiques en dépit des efforts de Benoit Hamon et de la France insoumise pour les placer au cœur de la campagne [10]. Il faut dire que les grands débats n’ont pas aidé. Encore cette semaine, elles ont été totalement absentes du duel Le Pen-Macron [11].
De fait l’écologie n’a jamais suscité le débat qui s’impose en dépit d’une grande diversité des propositions figurant dans les différents programmes [12]. Et ce qui devait arriver arriva, l’écologie « mal aimée de la campagne présidentielle [13] » n’est même pas passée au second tour [14]. Chose d’autant plus étonnante que beaucoup, tel Jean-François Juilliard [15], constatent que les enjeux environnementaux et sanitaires ne laissent pas les Français(es) indifférent(e)s.
… Sans aborder dignement le défi nucléaire
Il existe donc bel et bien un fossé entre le discours porté par les principaux acteurs de la scène politique et les préoccupations du plus grand nombre. Le souci de vivre dans un environnement sain n’a jamais été aussi puissant comme le donne à voir les innombrables réactions face aux « pics de pollution [16] » ou les nombreuses résistances aux projets inutiles grands et petits. Mais cela ne ressort guère dans le débat politique national.
C’est tout particulièrement flagrant dans le domaine énergétique… à croire que les politiques redoutent d’aborder cette question. Alors que les points info énergie ne désemplissent pas, que les bailleurs sociaux ne ménagent pas leurs efforts pour mettre en œuvre une rénovation thermique de l’habitat attendue depuis longtemps, qu’une majorité de Françai(se)s plébiscitent la transition [17], la campagne n’a abordé que du bout des doigts cette opportunité pour l’emploi, le climat et l’environnement.
Pourtant la société civile a tenté de peser et de mettre à l’agenda cet enjeu parmi beaucoup d’autres [18]. On ne peut pas dire que cela a eu un grand effet. La publication du rapport « 1 million d’emplois pour le climat [19] », largement inspiré par les travaux de Philippe Quirion [20], aurait dû initier un débat de fond à l’occasion de la campagne. Il n’en a rien été. Ce travail qui croise les problématiques énergétiques, sociales et démocratiques n’a guère touché que les milieux militants. Au final, bien peu s’en sont emparés pour penser collectivement la possibilité d’atteindre un modèle authentiquement durable qui articule justice sociale et urgence climatique. Les politiques sont passés complétement à côté abordant la question énergétique toujours de la même manière, avec les mêmes œillères et les mêmes présupposés qu’il y a 20 ans [21] donnant à voir…
…un écart insondable avec le pays réel
On est bien en présence d’un paradoxe entre un pays réel qui évolue rapidement et une scène politique où le vieux mantra usé de la croissance est repris sans cesse [22]. Comment s’étonner dès lors de la réticence et du peu d’enthousiasme du corps électoral ?
On n’est pourtant plus en 2011 quand une large part de l’opinion croyait encore à un avenir radieux comme le maire de Futaba (NDLR : dans la préfecture de Fukushima) avant que sa commune soit dévastée par le poison nucléaire. L’opinion a considérablement progressé depuis. Bien peu aujourd’hui considèrent encore que le nucléaire est « une énergie indispensable qui pourrait être plus fiable [23]. » Un sondage réalisé en 2016 à l’occasion du #Tcherno23 organisé par Michel Guéritte montre clairement que l’opinion publique évolue résolument vers la sortie du nucléaire [24]. Le consensus mou autour de l’atome industriel [25] qui a longtemps prévalu vole en éclat.
La sphère médiatique donne à voir sans ambiguïté le renouvellement du rapport au nucléaire. Jamais les informations n’ont été aussi abondantes. La presse n’esquive plus ce sujet longtemps perçu comme problématique vu le budget publicitaire d’EDF [26]. La presse économique consacre des articles de fond à cette question alors que la presse quotidienne régionale relate le moindre incident. Les grands médias nationaux quant à eux ne ménagent l’industrie nucléaire et mènent des enquêtes sévères. Ce fut le cas fin mars lorsque France Inter a diffusé un reportage accablant pour AREVA et EDF [27]. L’industrie nucléaire n’est plus cette « zone d’ombre » mise en cause par le passé. Elle doit faire face à un 4e pouvoir qui a gagné en autonomie et en pertinence [28]
De toute part se dévoile le malaise profond que suscite le nucléaire. Les nombreux reportages sur la campagne de distribution des pastilles d’iode [29] en 2016 ont révélé ce climat étrange qui associe révolte et résignation [30]. Le plus grand nombre subit le nucléaire. Et quand on enquête un peu plus, il apparait clairement qu’une majorité ne veut pas habiter à proximité d’un site nucléaire [31]. La défiance l’emporte largement sans que cela ne se traduise par des mesures effectives. Si les périmètres de protection sont en cours d’élargissement [32], l’État se soucie surtout de renforcer les moyens de sécurité [33].
En marche vers la transition
Le baromètre sur la perception des risques et de la sécurité confirme cette tendance profonde [34]. Le plus grand nombre ne se laisse plus abuser par le discours officiel et se défie du nucléaire. Le baromètre 2016, mieux que la plupart des sondages, donne à voir clairement cet état de fait. Si le terrorisme apparaît comme la principale préoccupation, celles concernant le réchauffement climatique augmentent sensiblement : près d’un Français sur deux mentionne ce problème parmi les plus préoccupants, en première ou en deuxième position [35]. Mais surtout l’inquiétude face au nucléaire est évidente : « Il n’en reste pas moins que les centrales nucléaires demeurent les installations industrielles les plus susceptibles de provoquer un accident grave ou une catastrophe : plus de neuf Français sur dix estiment qu’un accident dans une centrale nucléaire aurait des conséquences très graves, et la majorité d’entre eux ne souhaiterait pas vivre près d’une centrale nucléaire. Les installations nucléaires font aussi redouter des risques chroniques, soit sur la santé, soit sur l’environnement : doutes sur le fait qu’à proximité des centrales nucléaires les habitants soient en aussi bonne santé et les produits agricoles aussi bons, recul également de l’idée selon laquelle « autour des centrales nucléaires, les habitants sont en aussi bonne santé qu’ailleurs. »
Depuis 1982, la proportion de Français qui accepteraient de vivre près d’une centrale nucléaire a diminué de moitié. C’est bien le signe que l’acceptabilité sociale du nucléaire s’érode à mesure que le parc s’use et surtout que l’opinion publique privilégie la transition énergétique
« Les arguments principaux évoqués au sujet de la place du nucléaire dans le mix énergétique restent les mêmes : l’indépendance énergétique du côté de l’adhésion, les accidents de Tchernobyl et de Fukushima du côté de l’opposition 6. L’argument économique en faveur du nucléaire perd de sa force (baisse de 7 points en deux ans), dans la mesure où l’avantage en termes de coût du nucléaire est de plus en plus contesté et où la baisse relative du prix des hydrocarbures conduit à relativiser cet argument. Les énergies renouvelables sont les énergies préférées des Français, et l’énergie éolienne supplante maintenant à leurs yeux l’énergie nucléaire sur les critères économiques. »
Trente après l’accident de Tchernobyl, son impact dans l’esprit des populations reste très fort, comme le montrent plusieurs questions de l’enquête. Trois Français sur quatre estiment qu’on ne dit pas la vérité au sujet des retombées radioactives en France de l’accident, et ils sont un peu moins des deux tiers à ne pas faire confiance aux autorités sur ce sujet. Enfin, près de la moitié d’entre eux juge que les risques liés aux retombées radioactives en France de cet accident sont élevés ou très élevés.
Très clairement, les centrales nucléaires sont, aux yeux des Français, les installations industrielles les plus susceptibles de provoquer un accident grave ou une catastrophe. Parmi différentes installations industrielles, elles sont le plus souvent citées au regard du potentiel accidentel ou catastrophique.
Mais la classe politique ne s’en soucie guère !
Or le champ politique n’est guère attentif à ce « potentiel accidentel ou catastrophique ». L’interview du nouveau président de la République, le 6 mai par Jade Lindgaard sur Médiapart [36] donne à voir l’écart insondable entre ceux qui gouvernent et le pays réel.
Emmanuel Macron à la différence de son prédécesseur ne tourne pas autour du pot et dit clairement une position très répandue à la tête de l’État :
Jade Lindgaard : «Pourquoi ne pas fixer dès aujourd’hui un horizon de sortie du nucléaire et de passage à une production 100% renouvelable pour répondre à ce système qu’on voit bien en train de s’effondrer ? »
Emmanuel Macron : « Si je faisais ça, j’aggraverai à la seconde les problèmes d’AREVA et de EDF… EDF est le plus gros émetteur obligataire d’Europe. A la seconde où, vous savez, où quelqu’un qui est en responsabilité qui dit mon objectif est la mort de ce business, c’est fini, il n’y a plus personne qui prête. »
Jade Lindgaard : « On pourrait faire autre chose que du nucléaire ! »
Emmanuel Macron : « Mais ça va prendre du temps… Déjà je voudrai qu’on arrive à l’engagement de la loi de transition énergétique. Or si on se dit les choses en vérité, personne ne sait dire concrètement comment on arrive à 50% en 2025… »
Peu importe si le prix du kWh atomique s’envole [37]. Peu importe la perte de confiance dans les déclarations des exploitants et de leur sous-traitants [38]. Peu importe le taux de disponibilité pour le moins médiocre des réacteurs [39]. Peu importe le coût pharaonique d’un accident nucléaire [40]… sans parler de ses conséquences sociales et sanitaires. Le nucléaire a été ramené au simple rang de problématique financière à un tel point qu’on en oublie presque qu’il est dangereux et nocif [41].
Le drame est que beaucoup se satisfont de ce glissement de la représentation de l’industrie nucléaire. Elle est passée insensiblement, en une vingtaine d’années, du statut d’industrie dangereuse à celui d’une industrie en crise qui ne maitrise plus ni ses coûts ni ses process. Pour le dire autrement, la critique économique du nucléaire a fini par supplanter la critique écologique et cela au sein même du mouvement écologiste.
Le mot d’ordre de « sortie du nucléaire » est la résultante de cette évolution. Il ne s’agit plus tant d’interdire une « énergie de destruction massive [42] » comme le suggéraient Camus ou Ellul [43] que d’opérer une transition d’un modèle énergétique à un autre pour des raisons principalement marchandes. Il y a bien là une fatale régression qui aboutit in fine à oublier que « La civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie. » Et que surtout, « Il va falloir choisir, dans un avenir plus ou moins proche, entre le suicide collectif ou l’utilisation intelligente des conquêtes scientifiques. »
Alors que les grosses boutiques écolos regardent ailleurs
Le mouvement écologiste associatif et politique a une grande responsabilité dans cette débandade. En 2013, à l’occasion du Débat national sur la transition énergétique, le Collectif STOP-EPR ni à Penly ni ailleurs publiait une contribution qui pointait la défaillance de la plupart des grosses boutiques écologistes [44].
Quatre ans plus tard, les choses n’ont guère changé. D’un certain point de vue, la situation est pire encore. De Copenhague à la COP21 de Paris, s’est imposée la petite ritournelle selon laquelle il serait dommageable de se passer de l’énergie atomique pour faire face au changement climatique [45]. De Jean-Marie Pelt [46] à Jean Jouzel [47], la bien-pensance n’a de cesse de rappeler que le péril le plus grand qui menace aujourd’hui la planète n’est pas l’apocalypse nucléaire mais le « réchauffement soutenu » du climat.
Tout est dit par l’expert du CEA [48]. « Il n’y a pas beaucoup de scénarios qui réussissent à rester sous la barre des 2°C sans nucléaire. Tous les scénarios ont pratiquement une part de nucléaire plus ou moins importante… » Ite missa est…
On peut comprendre la satisfaction de la société française d’énergie nucléaire (SFEN) [49]. La discrétion de la plupart des composantes du mouvement écologiste est plus surprenante. Si ce n’est la campagne du Réseau Sortir du nucléaire, « Le nucléaire ne sauvera pas le climat [50] », on ne peut pas dire que les grosses boutiques aient mis le paquet en 2015 pour dénoncer le crime atomique. « Les Amis de la Terre, la Fondation Heinrich Böll, France Nature Environnement, Greenpeace, le Réseau Action Climat, Réseau Sortir du Nucléaire, Wise Amsterdam ont publié ensemble un rapport rédigé par Wise-Paris qui rassemble les arguments pour démontrer que le nucléaire représente une fausse solution pour la lutte contre les changements climatiques [51] » sans que cela ait donné lieu à des actions notoires.
La tendance générale dénoncée sur ce blog a été de viser le charbon [52] et de créer une sorte de gloubi-boulga entre la critique écologique et la critique économique. « Les vilains comptes climat des grandes banques françaises [53] » ont été dénoncés avec emphase [54] et même une certaine théâtralisation [55]. Il s’agissait de dénoncer « le double discours des banques françaises [56] » et accessoirement de faire de la pub pour les copains [57]. Au final toute une génération s’est engagée dans la lutte contre le charbon [58] alors que les révélations se multipliaient sur la « crise de la cuve EPR [59] »…
Crise du mouvement antinucléaire
Vous aurez beau chercher vous ne trouverez rien sur le financement de l’énergie atomique et le copieux business auquel elle donne lieu. Les néo-écolos parés de leur vertu de « gôche » n’ont eu de cesse de créer des contre-feux pour éloigner l’attention du plus grand nombre de la « faillite nucléaire du modèle énergétique français [60] ». Au mieux la critique économique du nucléaire porte sur l’insuffisance des fonds de réserve destinés à faire face aux charges de démantèlement et de gestion des déchets [61], mais on ne trouve guère en dehors de quelques publications universitaires d’études du grand jeu financier atomique. D’aucuns voulurent même emmener les ONG françaises sur la voie du sauvetage d’EDF…
Au final, le « plan de sauvetage » surréaliste de la maison nucléaire [62] conçu par l’ex-ministre de l’économie dans la stricte continuité du Rapport Roussely [63] est passé comme une lettre à la poste. Les indignés du Charbon n’ont guère réagi et seul Greenpeace a poursuivi la critique du nucléaire visant non plus l’État nucléaire [64] mais la gouvernance du groupe EDF [65], mettant en cause la « déshérence » de l’opérateur énergétique de l’État [66]. Si l’action à Wagram mit du baume au cœur à chacun, il faut reconnaître que c’est l’arbre qui cache la forêt du désengagement militant contre le nucléaire. À Flamanville, quelques semaines plus tôt, quelques 5 000 personnes à peine répondaient à l’appel de Didier Anger et du CAN-Ouest pour exprimer un non franc et massif à l’EPR et au « grand rafistolage » [67]…
À croire que la critique du nucléaire est devenue un sujet d’initiés qui ne concernent plus la grande majorité des militant(e)s et autres sympathisant(e)s de la cause écologiste. Bien des éléments le confirment en tout cas. La présence fréquente dans les médias des « experts indépendants » de Globale Chance et de Wise-Paris donne à voir que le sujet intéresse, que les doutes sont de plus en plus forts dans l’opinion publique. Le très bel article d’Agnès Sinaï dans le Diplo de mai 2017 [68] le rappelle. Mais les associations ne font plus recettes. Ici et ailleurs le désengagement militant est patent alors que la charge de travail de ceux et celles qui veulent exercer dignement une surveillance citoyenne des installations nucléaires s’accroît à mesure que les sites se délabrent.
On a clairement affaire à un paradoxe patent. Alors que le nombre de succès devant la justice ne cesse de croitre, que l’ASN en dépit de pression cyclopéenne exerce une pression tangible sur l’industrie nucléaire, que les signes de faillite s’accumulent, la critique de l’atome ne mobilise plus. Dans le champ politique, elle passe nettement derrière l’urgence climatique, la promotion des alternatives énergétiques et la dénonciation des grands projets inutiles.
Pourtant s’il y a bien des projets inutiles ce sont les installations nucléaires. France Nature environnement ne s’y est pas trompé quand elle a inscrite à sa liste des projets destructeurs de l’environnement Bure, l’EPR et le « Grand carénage » de Paluel [69]. La grosse centaine d’installations classées [70] nucléaire sans parler des anciennes mines ou des sites de RNR rappellent à chacun l’ampleur du risque nucléaire. Le plus grand nombre y est sensible mais cela a du mal à passer sur la scène publique.
Il n’y a pas d’écologie sans critique de l’atome
C’est pourtant là au plus près des installations nucléaires de base que se situent les ressorts d’un renouveau écologiste. Plutôt que de développer une critique du modèle énergétique qui au final parle à peu de monde, il conviendrait aujourd’hui de revenir au principe de la dénonciation du crime atomique.
Trois chemins s’offrent ainsi au mouvement écologiste pour fédérer autour de lui ceux et celles qui sont directement exposés aux risques nucléaires, les salariés et les riverains des installations à l’échelle des zones d’aléa radiologiques mais aussi chimiques :
- Le premier concerne ce que le Réseau Sortir du nucléaire et, d’une certaine façon, l’ANCCLI appellent la surveillance des installations nucléaires. Cela concerne des groupes actifs qui ont vocation à exercer un contrôle citoyen des installations nucléaires de base mais aussi les syndicats qui ont l’audace d’aborder les questions qui fâchent en particulier dans les CHSCT,
- Le second concerne l’évaluation indépendante des impacts et autres nuisances sur l’environnement et la santé publique de ces installations. C’est ce que nous mettons en œuvre ici avec l’ACRO autour des installations de Normandie dans le souci de disposer de nos propres outils de mesures et surtout de données opposables à la communication de l’exploitant,
- Enfin, il conviendrait, dans le contexte de la campagne de distribution des pastilles d’iode [71] et d’élargissement des Plans particulier d’intervention, de mener un large travail d’information sur les risques nucléaires et les défaillances de la doctrine française de la gestion accidentelle [72] sans oublier bien évidemment la dénonciation du mythe de la « reconquête» en phase post-accidentelle.
Le propre de la lutte antinucléaire n’est pas de promouvoir les énergies renouvelables ou je ne sais trop quelle officine engagée dans la transition énergétique. Elle ne revient pas non plus à justifier une contestable « sortie progressive » qui en aucun cas ne règle les risques à la source. La lutte antinucléaire se justifie principalement par des raisons éthique, sanitaire, politique et économique.
. Éthique parce qu’en dernier recours la critique du nucléaire est une mise en cause de l’illusion technique et des délires prométhéens de quelques savant-fous qui ont promis l’émancipation par l’atome [73] ;
. Sanitaire parce que l’acceptabilité sociale des usages de l’énergie atomique est justifiée par une appréciation tronquée des effets des radioéléments sur la santé et le vivant [74] ;
. Politique parce que le déploiement industriel à grande échelle de l’énergie atomique s’inscrit dans le déploiement de ce que Michel Foucault appelait la biopolitique avec pour déclinaison suprême la capacité à maitriser la « Bombe »…
. Économique parce que la constitution de la filière militaro-industrielle nucléaire s’est faite aux dépends d’investissements socialement utiles et environnementalement justes. Cet effet d’éviction atteint aujourd’hui des sommets alors que chacun peut connaître le coût de la prolongation de la durée d’exploitation du parc [75].
En somme cela revient à retrouver l’élan originel qui aboutit à la fondation du mouvement écologiste [76] plutôt que de se perdre dans un discours de promotion d’alternatives qui oublie le plus souvent l’objectif d’équité visé autrefois [77]. Le dépérissement de l’usage énergétique du nucléaire est certes nécessaire, mais il n’est en aucun cas suffisant… L’horizon antinucléaire est ailleurs, du côté d’une sobriété heureuse, de la convivialité et des low tech [78]
Article de Guillaume Blavette
Pour accéder aux notes:
https://blogs.mediapart.fr/guillaume-blavette/blog/090517/nucleaire-apres-la-debandade-un-sursaut-s-impose
Commentaires récents