COMMENT LE GOUVERNEMENT JUSTIFIE L’ARRÊT DU PROJET NUCLÉAIRE ASTRID

L’arrêt du chantier d’Astrid, prototype de réacteur nucléaire de quatrième génération, secoue la filière nucléaire française. Le 31 août, le ministère de la Transition écologique et solidaire a justifié cette décision.

Le gouvernement justifie l’arrêt du projet Astrid. Vendredi 30 août, le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) a confirmé l’abandon du chantier du prototype de réacteur nucléaire de quatrième génération. En plein débat sur la gestion des déchets radioactifs, l’annonce fait l’effet d’un séisme pour la filière de l’atome et déchaîne les réactions politiques.

Il n’y a aucune information nouvelle, tempère dans un communiqué le ministère de la Transition écologique et solidaire. Les orientations du gouvernement en matière de politique nucléaire ont été présentées dans le projet de programmation pluriannuelle de l’énergie [PPE] en janvier dernier.” Document public, le rapport de consultation de la PPE estimait en effet à cette époque que le besoin d’un démonstrateur et le déploiement de réacteurs à neutrons rapides n’étaient pas utiles, “au moins jusqu’à la deuxième moitié du XXe siècle”.

Le gouvernement donne priorité aux réacteurs EPR

Quelles sont les raisons de cet arrêt, alors que le prototype Astrid aurait permis de recycler les combustibles nucléaires usés des réacteurs déjà en service ? Sans surprise, le cabinet d’Élisabeth Borne invoque “l’abondance d’une ressource bon marché en uranium”.

La priorité de la filière industrielle doit par ailleurs aller à la réussite de la filière des réacteurs EPR de troisième génération”, ajoute le ministère. Cette justification fait écho aux difficultés du chantier de l’EPR de Flamanville (Manche) qui a subi plusieurs retards et dont le coût ne cesse de gonfler. “Dans ce contexte, la mise en chantier d’un démonstrateur de taille industrielle n’était ni nécessaire, ni opportune”, ajoute le gouvernement.

Faut-il comprendre que la réussite des réacteurs de troisième génération conditionnera le développement de la quatrième génération ? En juin, le prédécesseur d’Élisabeth Borne s’interrogeait sur l’intérêt des EPR. “Il faudra tirer toutes les leçons pour voir […] du point de vue économique si ce type de réacteur nucléaire est compétitif”, déclarait alors François de Rugy.

Les solutions de multi-recyclage ne sont pas abandonnées

Les opposants au nucléaire ont naturellement bien accueilli l’annonce. “Le nucléaire est bel et bien une impasse”, a commenté Yannick Jadot, eurodéputé Europe Écologie-Les Verts en pointant du doigt le coût du projet Astrid. À l’inverse, les représentants de la droite et de l’extrême droite ont condamné la décision. “Nous ne pourrons pas protéger notre environnement sans la recherche et l’innovation”, estime Bruno Retailleau, président du groupe Les Républicains au Sénat.

Alors que se déroule le débat public sur le plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs (PNGMDR), l’abandon d’Astrid soulève des questions sur le recyclage des matières radioactives et plus largement sur l’avenir de l’innovation dans la filière nucléaire. “La France reste engagée dans la politique de fermeture complète du cycle du combustible”, assure le gouvernement. “Le gouvernement a demandé aux industriels d’engager les actions de R&D nécessaires avec le CEA pour approfondir la faisabilité industrielle des solutions de multi-recyclage du combustible dans les réacteurs de troisième génération, solution transitoire qui contribuera à la recherche sur la fermeture du cycle et la quatrième génération de réacteurs”, ajoute-t-il.

Par Simon Chodorge, publié le 02/09/2019 à 09H15

Photo en titre : Le cabinet d’Élisabeth Borne a justifié l’arrêt du chantier d’Astrid. © Dahmane – L’Usine Nouvelle

Cet article a été publié sur le site https://www.usinenouvelle.com/article/comment-le-gouvernement-justifie-l-arret-du-projet-nucleaire-astrid.N879365 que nous vous conseillons de consulter régulièrement