Des experts exhortent les États-Unis à reconsidérer l’utilisation d’uranium de qualité militaire dans une expérience de production d’énergie nucléaire, en raison des préoccupations liées à la prolifération nucléaire et à la sécurité nationale.
Des experts du Département d’État américain et de la Commission de réglementation nucléaire ont exhorté mardi le Département de l’Énergie des États-Unis à reconsidérer un projet visant à utiliser de l’uranium enrichi à des niveaux propres à la fabrication de bombes dans une expérience de production d’énergie nucléaire. Ils affirment que cette utilisation pourrait encourager d’autres pays à mener des tests similaires.
Les préoccupations concernant la prolifération nucléaire liée à l’utilisation d’uranium hautement enrichi
Le Département de l’Énergie et deux entreprises ont pour objectif de partager les coûts de l’Expérience de Réacteur au Chlorure Fondu (MCRE) au Laboratoire National de l’Idaho et d’utiliser plus de 600 kg de combustible contenant de l’uranium enrichi à 93%.
La société TerraPower LLC, soutenue par Bill Gates, l’entreprise d’électricité Southern Co (SO.N) et le département espèrent que cette expérience de six mois permettra des percées dans les réacteurs nucléaires afin de réduire la pollution liée au changement climatique.
Cependant, un groupe d’anciens membres de la Commission de réglementation nucléaire, dont l’ancienne présidente Allison Macfarlane, et des secrétaires d’État adjoints américains chargés de la non-prolifération, affirment que la MCRE pourrait donner aux autres pays une excuse pour enrichir l’uranium à des niveaux propres à la fabrication de bombes dans le but de développer de nouveaux réacteurs.
Les préoccupations concernant la politique de sécurité nationale et la transparence du Département de l’Énergie
“Les dommages causés à la sécurité nationale pourraient dépasser tout bénéfice potentiel de cette technologie énergétique hautement spéculative”, déclarent les experts dans une lettre adressée aux responsables du Département de l’Énergie. Ils craignent qu’une augmentation de ce type d’expériences n’augmente les risques pour les militants cherchant à créer une arme nucléaire d’obtenir de l’uranium.
“Il est choquant que le Département de l’Énergie, sans même en informer le public, mine une politique américaine bipartisane vieille de plusieurs décennies visant à prévenir la propagation des armes nucléaires”, déclare Alan Kuperman, professeur à la LBJ School of Public Affairs de l’Université du Texas, qui a organisé la lettre.
Les implications de l’utilisation d’uranium hautement enrichi dans le projet MCRE
Selon la lettre, la conception de la MCRE pourrait être modifiée pour fonctionner avec de l’uranium faiblement enrichi, ce qui entraînerait un retard et des coûts supplémentaires, mais d’autres coûts pourraient être économisés en matière de sécurité. Le Département de l’Énergie affirme que de l’uranium hautement enrichi (HEU) est nécessaire pour maintenir la taille du réacteur expérimental réduite. Si de l’uranium enrichi à seulement 20% était utilisé, le cœur du réacteur devrait être trois fois plus haut, trois fois plus large et contenir 40 fois plus de sel de combustible, affirme-t-il.
Une fois l’expérience terminée, le réacteur sera désactivé et retiré, précise-t-il. Un porte-parole de TerraPower a déclaré que la MCRE serait menée dans une installation sécurisée déjà en possession d’uranium propre à la fabrication de bombes.
TerraPower affirme qu’un réacteur en cours de développement dans son laboratoire de l’État de Washington, appelé Réacteur Rapide au Chlorure Fondu, utilisera un combustible beaucoup moins enrichi, jusqu’à 20%, présentant beaucoup moins de risques de prolifération.
Par energynews, publié le 31 mai 2023
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