LES EAUX TROUBLES DE FUKUSHIMA : UNE DÉCISION NUCLÉAIRE CONTROVERSÉE

LE MONDE VU D’ICI / Le Japon a finalement commencé à déverser de l’eau radioactive traitée de sa centrale nucléaire endommagée de Fukushima dans l’océan Pacifique.

En 2011, un tsunami déclenché par un séisme de magnitude 9,0 a inondé trois réacteurs de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi. Ceci est considéré comme la pire catastrophe nucléaire mondiale depuis Tchernobyl.

Cela a détruit la centrale nucléaire, endommageant son système de refroidissement et provoquant la surchauffe des cœurs des réacteurs, contaminant l’eau à l’intérieur de l’installation. Depuis la catastrophe, la centrale nucléaire a pompé de l’eau pour refroidir les réacteurs. Chaque jour, la centrale produit de l’eau contaminée. Elle est stockée dans plus de 1000 réservoirs, l’équivalent de plus de 500 piscines olympiques.

La centrale de Fukushima manque d’espace de stockage pour l’eau utilisée pour refroidir les réacteurs nucléaires. Le Japon affirme avoir besoin du terrain occupé par les réservoirs pour construire de nouvelles installations en vue de la décommission ( NDLR: démantèlement) de la centrale.

Le Japon a annoncé pour la première fois son plan de rejeter l’eau dans l’océan en 2018, déclarant que le processus serait géré avec précaution et que l’eau serait diluée davantage par de l’eau de mer avant d’être libérée. L’eau est diluée pour réduire le niveau de substances radioactives à environ 1/7 du niveau recommandé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Avec l’approbation de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), Le Japon libère progressivement l’eau usée dans l’océan. Le Japon a commencé à déverser l’eau le 24 août 2023, dans un processus qui prendra 30 ans pour être achevé.

Néanmoins, le plan reste très controversé. Le public japonais, divers groupes et ses voisins expriment des inquiétudes concernant la contamination. Seulement 53 % du public japonais a déclaré le soutenir, tandis que 41 % ont dit s’y opposer, selon une enquête menée en août 2023 par le journal Asahi Shimbun.

Des groupes de pêche et de l’industrie des produits de mer au Japon et dans la région ont exprimé des inquiétudes quant à leurs moyens de subsistance, craignant que les consommateurs n’achètent plus leurs produits et que cela nuise à leur réputation.

La Chine avait déjà violemment critiqué le plan du Japon, accusant le Japon de traiter l’océan comme ses égouts « privés ». Peu de temps après le début du déversement de l’eau, Pékin, le plus gros acheteur de produits de mer japonais, a élargi l’interdiction existante sur les produits de la mer de Fukushima et d’autres régions du Japon pour couvrir l’ensemble du Japon.

Du côté sud-coréen, bien que le gouvernement ait déclaré qu’il n’avait aucune objection au plan, de nombreux citoyens s’y opposent. Plusieurs Sud-Coréens ont fait des réserves de sel de mer en prévision du déversement de l’eau, par crainte pour la sécurité alimentaire.

Plusieurs experts internationaux ont également exprimé leurs préoccupations concernant le plan, dont un, en Chine, qui a déclaré que le rapport de l’AIEA était « précipité », selon le journal chinois Global Times.

Des experts en droits humains de l’Organisation des Nations Unies se sont aussi opposés au plan, tout comme des militants environnementaux. Greenpeace a par ailleurs publié plusieurs rapports mettant en doute le processus de traitement de l’eau contaminée, affirmant qu’il n’élimine pas suffisamment les substances radioactives. Des scientifiques estiment en outre qu’il faudrait davantage d’études sur l’impact du déversement sur le fond marin et la vie marine.

Des milliers de personnes en Corée du Sud, en Chine et au Japon ont manifesté contre le plan controversé par crainte de la destruction de la vie marine et de la contamination des produits de mer. Choi Kyoungsook du groupe d’activistes Korea Radiation Watch a déclaré que les substances radioactives dans l’eau « détruiront inévitablement l’écosystème marin ». Elle ajoute : « La mer n’appartient pas seulement au gouvernement japonais, mais à nous tous et à l’humanité ».

Quatre autres déversements d’eau seront réalisés d’ici la fin mars 2024. Au total, 31 200 tonnes d’eau supplémentaires seront rejetées.

Sources:

  • https://www.bbc.com/news/world-asia-66486233
  • https://www.bbc.com/news/world-asia-66094479
  • https://www.bbc.com/news/world-asia-66609889
  • https://www.bbc.com/news/world-asia-66106162
  • https://www.bbc.com/news/world-asia-66610977
  • https://www3.nhk.or.jp/nhkworld/en/news/backstories/2741/

Par Gabrielle Chénier, publié le 22 octobre 2023

Photo en titre : Les militants écologistes dénoncent le projet du gouvernement japonais de commencer à rejeter dans l’océan Pacifique l’eau radioactive traitée de la centrale nucléaire détruite de Fukushima.

https://www.lenouvelliste.ca/opinions/2023/10/22/les-eaux-troubles-de-fukushima-une-decision-nucleaire-controversee-CBIUTTH3SVH5ZCRSPFCWI4JXKE/