ÉNERGIE, UN SECTEUR EN FORTES TURBULENCES

energie Quelle que soit l’entreprise vers laquelle on se tourne – EDF, RTE, Engie ou Areva – c’est tout le tissu industriel énergétique qui se voit aujourd’hui menacé par des décisions dangereuses ou incohérentes, qu’elles soient économiques ou idéologiques….

…Dès que le projet Hinkley Point avait été rendu public, la CGT avait exprimé on ne peut plus clairement son point de vue : favorable à la réalisation d’un tel projet, elle était en revanche persuadée que la période actuelle n’était pas la bonne pour le mener à bien, les conditions financières et industrielles n’étant à son sens pas remplies. Les difficultés économiques d’EDF et l’absence de retour d’expérience en matière de construction d’EPR – celui de Flamanville étant toujours en chantier – semblaient constituer des arguments suffisants pour surseoir à une telle aventure industrielle et commerciale. Comme le souligne Philippe Page Le Mérour, délégué syndical central (DSC) CGT d’EDF SA, « c’est engager l’entreprise EDF dans un projet intenable. Le planning d’Hinkley Point prévoit une mise sur le réseau en 2025. Un premier béton en 2019, soit un terrassement en 2017 : c’est intenable ! Sans oublier que le tissu industriel anglais est en friche… On nous refait le coup de Flamanville, pour lequel on nous avait annoncé une construction en 54 mois. Nous sommes proches des 150… »

Prolongements judiciaires

La CGT tient donc sa ligne originelle : « nous sommes favorables au projet mais pas tout de suite. » Et le dossier a désormais un volet judiciaire, le CCE (comité central d’entreprise) d’EDF ayant considéré « que la direction d’EDF passait en force. » A l’heure où nous mettons sous presse, le délibéré du tribunal de grande instance n’a pas encore été rendu. Et les administrateurs salariés, pour leur part, ont porté l’affaire devant le tribunal de commerce, estimant que certains membres du CA d’EDF n’auraient pas dû disposer du droit de vote, étant eux-mêmes engagés dans des entreprises liées au projet Hinkley Point…

Nuages

Les craintes de la CGT sont aujourd’hui multiples. Car aux dossiers que nous venons d’énoncer (thermique, Fessenheim, Hinkley Point) il faut ajouter ce qui concerne l’hydroélectricité (lire page 15) et l’ouverture du capital de RTE, gestionnaire du réseau de transport d’électricité, filiale de l’énergéticien. Thierry Zehnder, responsable CGT du collectif RTE, résume la situation : « Jean-Bernard Lévy, PDG d’EDF, veut nous vendre à 50% pour faire rentrer du cash. Rappelons que suite aux difficultés financières d’EDF, Emmanuel Macron et Michel Sapin (1) avaient écrit à Lévy pour qu’il procède à cette ouverture de capital, en faisant allusion au projet Hinkley Point. » Une opération financière « sans aucune justification en lien avec l’activité industrielle de RTE et ses missions de service public. » Pour autant, le dossier avance puisque « les discussions sont désormais engagées entre EDF, RTE et la Caisse des dépôts et consignations (CDC). Et nous sommes de toute façon extrêmement vigilants quant à l’obligation légale, prévoyant que RTE doit être détenu par des fonds publics, dans cette opération en cours. » Le 21 septembre dernier, la CGT en appelait d’ailleurs à une journée d’action afin d’exiger que RTE reste « 100 % publique et 100% EDF. »

Puzzle…

Pour P. Page Le Mérour, l’exemple de RTE est symptomatique. « Je prends souvent comme image celle du puzzle : ils sont en train d’attaquer le service public morceau par morceau. » Preuve supplémentaire, « les projets de suppressions de sites – de 30 à 10 – à la Direction des services partagés (DSP). Toutes ces suppressions cumulées nous font craindre qu’on ne puisse pas recaser tous les salariés… » Des restructurations pour soi-disant gagner en efficacité économique ?…

…Autre exemple de ces stratégies variables, Areva. L’entreprise mal en point (lire E. Syndicales de mars et juin 2016), et dont le dossier de recapitalisation (3) est en cours d’examen à Bruxelles, vient de céder son activité dans l’éolien offshore à son partenaire espagnol Gamesa. « Finalement le gouvernement n’a pas été fichu de définir une politique industrielle digne de ce nom » se lamente Bruno Blanchon (2), animateur de la branche nucléaire de la FNME. « C’est écœurant. On désindustrialise complètement la France. »

(1) M. Sapin a depuis remplacé E. Macron à la tête du ministère de l’Économie et des Finances.

(2) Lire aussi les témoignages dans Avenir(s)s incertain(s).

(3) Soit 5 milliards d’euros : 3 pour le nouvel Areva, 2 pour Areva SA, la holding. Quant à la reprise par EDF d’Areva NP, une offre devrait être faite d’ici novembre.

Texte intégral sur:

http://www.fnme-cgt.fr/index.php/journal/energie-un-secteur-en-fortes-turbulences/energie-un-secteur-en-fortes-turbulences#