EDF, détenu à près de 84% par l’État, est notamment contraint aujourd’hui de vendre une partie de son électricité nucléaire à un prix fixe et bon marché à ses concurrents. La réforme de ce mécanisme, qu’il considère comme injuste, s’inscrit dans le projet de réforme.
Le gouvernement mène des discussions toujours difficiles avec les syndicats comme avec la Commission européenne sur l’avenir d’EDF, dont le projet de réorganisation traîne en longueur faute d’accord.
Ce projet au long cours aboutirait dans ses grandes lignes à la création de trois entités, avec une société mère publique qui conserverait notamment le nucléaire, et deux filiales pour les barrages d’un côté, les renouvelables et le réseau de distribution de l’autre.
Si les discussions se poursuivent activement, elles n’ont pas encore débouché sur un accord avec Bruxelles malgré des progrès sur certains points.
« Le dossier n’avance pas à la vitesse souhaitée par EDF », estime une source proche de la Commission européenne, où les services de la commissaire Margrethe Vestager veillent au strict respect des règles de la concurrence. « On n’est pas proche d’un accord », juge cette source.
Le PDG d’EDF, Jean-Bernard Lévy, a même qualifié jeudi (6 mai) les discussions d’« extrêmement difficiles ».
« Ligne rouge »
Un point d’achoppement majeur reste le degré de relation entre les futures entités d’EDF.
La Commission exige des « murailles de Chine » entre elles. Elle veut notamment éviter des « subventions croisées », par exemple qu’un coup de pouce au nucléaire bénéficie à d’autres activités d’EDF au détriment de ses concurrents.
Mais Paris insiste sur le fait que le groupe doit rester intégré, avec une stratégie unique et des flux financiers entre les différentes activités.
Le ministre de l’Économie Bruno Le Maire, comme le PDG d’EDF, ont ainsi fait de l’unité d’EDF une « ligne rouge ».
Une manière d’essayer de rassurer des syndicats farouchement opposés au projet de réorganisation, longtemps baptisé « Hercule » et assimilé à un démantèlement de l’entreprise.
Bruno Le Maire a mené une série de rencontres avec les syndicats mais sans jusqu’à présent parvenir à les convaincre.
L’interfédérale syndicale énergie et mines CGT, CFE-CGC, CFDT et FO s’est ainsi dite mardi (4 mai) « davantage soudée pour s’opposer au projet Hercule ».
« La direction et le gouvernement essayent de trouver l’organisation qui pourra dévier demain et les suivre. Je connais ce jeu de déstabilisation. On ne tombe pas dans le piège », affirme Sébastien Menesplier, de la CGT.
« Détente du calendrier »
L’horloge tourne, car il faudrait près d’un an pour boucler une réforme qui doit passer devant le Parlement et risque d’entrer en collision avec le calendrier de la campagne présidentielle l’an prochain.
« On est dans le “money time“ », espère l’un des protagonistes, faisant référence aux dernières minutes décisives d’un match.
Après avoir espéré finaliser son projet fin 2020 puis au printemps, le gouvernement s’est posé une nouvelle échéance avant l’été.
Un conseil des ministres devait même aborder le sujet le 19 mai, une date finalement abandonnée faute d’avancée, selon plusieurs sources.
Et le projet pourrait encore prendre du retard : à l’issue d’une rencontre avec Bruno Le Maire, la CGT a rapporté « une détente du calendrier pour aller probablement, c’est une supposition, jusqu’à l’automne ».
Du côté d’EDF comme du gouvernement français, on juge pourtant la réforme nécessaire pour mieux rémunérer la production nucléaire française, accélérer le développement dans les renouvelables, tout en réglant un vieux contentieux avec Bruxelles sur les barrages hydroélectriques.
Le groupe, détenu à près de 84% par l’État, est notamment contraint aujourd’hui de vendre une partie de son électricité nucléaire à un prix fixe et bon marché à ses concurrents. La réforme de ce mécanisme, qu’il considère comme injuste, s’inscrit dans le projet de réforme.
Jean-Bernard Lévy alerte régulièrement sur le risque pour EDF, par ailleurs lourdement endetté, d’être « relégué en deuxième division » face à ses concurrents européens.
Mais sans certitude pour l’instant de trouver une solution rapide. « Rien ne permet de penser que les discussions pourront aboutir rapidement, rien ne permet non plus de penser qu’elles pourraient ne pas aboutir », a-t-il encore dit jeudi (6 mai).
Par Agence France Presse (AFP), publié e 7 mai 2021 à 8h45, mis à jour à 8h57
Photo en titre : [EPA-EFE/CAROLINE BLUMBERG]
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