POURQUOI LE NUCLÉAIRE SIPHONNE L’ÉTAT ACTIONNAIRE

EDF AREVABercy est en quête de fonds pour renflouer EDF et Areva, qui ont besoin de 9 milliards d’euros. Après la vente de titres Engie, au tour de PSA ou Renault ?

C’est le début des grandes manœuvres dans le nucléaire. Pour les financer, l’État doit trouver de l’argent frais. La semaine dernière, alors que la Commission européenne donnait son feu vert sous conditions au plan de sauvetage d’Areva, Paris cédait 4,1 % du capital d’Engie pour 1,14 milliard d’euros. Une opération médiocre, l’action de l’ex-GDF Suez ayant chuté de plus de 25 % en 2016. La cession des titres Engie a suscité la fureur des syndicats. « Les recapitalisations ne doivent pas être financées par des cessions d’actifs publics et la vente des bijoux de famille », s’insurge FO dans un communiqué. La CFE-CGC dénonce « l’inconséquence de l’État actionnaire qui sacrifie toute vision stratégique à un pilotage actionnarial financier à très courte vue ».

« L’État prône une bonne gouvernance qu’il ne s’applique pas à lui-même»

André Loesekrug-Pietri, président du fonds A Capital, s’interroge, lui, sur la stratégie de l’Agence des participations de l’État (APE) : « L’État prône une bonne gouvernance qu’il ne s’applique pas à lui-même. Ces trois dernières années, pas moins de trois présidents se sont succédé à la tête de l’APE. » En douze mois, le portefeuille de ses titres cotés a reculé de 11,5 % quand le CAC 40 a gagné près de 5 %, soit une moins-value potentielle de quelque 8 milliards. C’est l’énergie en pleine crise (catastrophe de Fukushima, baisse des prix de l’électricité) qui plombe le bilan de l’APE. Le secteur représentait 81 % du portefeuille en 2008. Aujourd’hui seulement 46 %. « Ce qui est un peu embêtant pour l’État, c’est qu’il était prisonnier du calendrier autour d’Areva », indique un stratégiste du courtier Aurel BCG. Demain, c’est celui d’EDF qui va s’inviter au menu de l’État.

Au cours des prochains mois, l’électricien et le groupe nucléaire vont être recapitalisés à hauteur de 4 et 5 milliards d’euros. Actionnaire des deux entreprises à plus de 80 %, l’État s’est engagé à participer pour 3 milliards à l’augmentation de capital d’EDF et pour 4,5 milliards à celle d’Areva. L’APE, présente dans 81 sociétés, dispose d’un portefeuille de 90 milliards d’euros dont les deux tiers proviennent de sociétés cotées. Sa marge de manœuvre est toutefois limitée, car l’Agence n’est pas autorisée à recapitaliser une entreprise en utilisant les fruits de ses dividendes. Pour réaliser ses opérations, elle doit puiser dans son compte d’affectation spécial. Au 31 décembre 2016, cette cagnotte affichait un solde positif de 3,7 milliards. Avec la vente des titres Engie, elle s’élève désormais à 4,8 milliards. Il manque donc près de 3 milliards pour renflouer Areva et EDF. Cet argent, l’État doit le trouver rapidement car l’augmentation de capital d’EDF est imminente. Peut-être dès le 15 février, au lendemain de l’annonce des résultats financiers 2016 de l’électricien, comme cela avait été indiqué par sa direction.

Une stratégie en question

Ces derniers mois, l’État s’est délesté de plusieurs blocs de titres Safran. Il a aussi vendu les 60 % qu’il détenait dans les aéroports de Lyon et de Nice. Que va-t-il céder à présent ? Le titre PSA a repris des couleurs. L’État a souvent dit qu’il n’avait pas vocation à rester au sein du constructeur automobile. Pour autant, il ne devrait pas bouger, car l’APE estime que le titre PSA dispose de marges de progression. L’État pourrait en revanche s’alléger chez Renault dont le cours est également remonté. Reste enfin à savoir si la stratégie de l’APE est pertinente…

Article de Nicolas Stiel

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