Le taux de protection de l’EPA est dix fois celui qui avait été fixé par l’administration Obama
Les directives de l’administration Trump pourraient être le prélude à une réglementation plus souple
En cas d’explosion de bombe sale ou de fusion d’un réacteur nucléaire, les brigades d’urgence peuvent sans problème tolérer des niveaux de radiation équivalents à des milliers de radios des poumons, a déclaré l’Agence de protection environnementale (EPA) dans de nouvelles directives qui assouplissent les taux de radiation officiels.
L’EPA détermine pour l’eau de boisson une norme dix fois plus élevée que celle qui avait été recommandée sous la présidence de Barack Obama. Cette décision pourrait mener l’administration Trump à affaiblir les taux de protection contre les radiations, déplorent des organismes de surveillance qui critiquent ce changement.
« Cela fait vraiment une énorme quantité de radiation qu’ils décrètent sans danger, » a déclaré Daniel Hirsch, ancien directeur du Programme de politique environnementale et nucléaire de l’université de Californie. « Une telle position pourrait facilement détricoter toutes les règles de protection anti-radiation ».
Le changement a été introduit dans le cadre d’un « guide » produit par l’EPA concernant les messages et communications, en cas de fusion d’un réacteur nucléaire ou d’explosion d’une bombe sale. Le document FAQ [foire aux questions], publié en septembre 2017, fait partie d’un document de planification plus large destiné à répondre aux urgences nucléaires et n’a pas le même poids que les normes ou les lois fédérales.
« Selon les experts en sécurité des radiations, l’exposition à des radiations de 5 à 10 rems (5 000 à 10 000 mrem ou 50 à 100 mSv) ne provoque habituellement aucun effet nocif sur la santé ; une exposition inférieure à ces taux contribue en effet de manière minimale à notre risque global de cancer, » affirme l’EPA dans le document. Ce taux peut être l’équivalent de 5 000 radios des poumons ou entre sept et 14 tomodensitométries, si on le compare aux données de la FDA [l’Office de contrôle des produits pharmaceutiques et alimentaires].
Une version du même document datant de 2007 déclarait qu’il n’existe pas de niveau de radiation sans danger, avec ces mots de conclusion : « C’est ce que l’ensemble actuel des connaissances scientifiques nous indique. »
« L’EPA n’a pas changé ses normes relatives à l’exposition aux radiations et aucune directive de protection n’a été changée durant cette administration, » a insisté la porte-parole de l’EPA, Liz Bowman. « Nous ne faisons que fournir des ressources d’appui supplémentaires ».
Selon le National Cancer Institute, le rayonnement de certaines longueurs d’ondes, qu’on appelle rayonnement ionisant, a suffisamment d’énergie pour causer des dommages génétiques et provoquer des cancers. L’ampleur des dommages pour les cellules dépend de l’intensité et de la durée de l’exposition, ainsi que des organes qui subissent l’exposition, comme l’explique la FDA.
Le Safe Drinking Water Act [loi sur la salubrité de l’eau de boisson] fixe les limites d’exposition à quatre millirem (mrem) par an, et les normes fédérales relatives aux polluants atmosphériques dangereux limitent l’exposition aux radiations à 10 mrem par an, indique Hirch. La réglementation fédérale limite l’exposition pour les personnes résidant près d’une centrale nucléaire à 25 mrem par an, continue-t-il.
Même avec ces normes réduites, l’EPA n’avait encore jamais dit que les radiations, quel qu’en soit le taux, sont sans danger, fait remarquer Jeff Ruch, directeur de Public Employees for Environmental Responsibility [une ONG pour la protection de l’environnement qui encourage les fonctionnaires à devenir des lanceurs d’alerte]. Pour Ruch, les vues scientifiques de l’EPA sur l’exposition aux radiations relèvent du même scepticisme que celui du directeur de l’EPA, Scott Pruitt, qui met en doute l’idée que l’espèce humaine est le principal responsable du changement climatique.
Le consensus scientifique
« Je savais qu’avec Scott Pruitt à sa tête, l’EPA était dans le déni du changement climatique, mais il semble désormais qu’elle soit également dans le déni des dangers des radiations, » poursuit Ruch. « Voici apparemment un autre exemple où l’EPA de Pruitt proclame des conclusions totalement contraires à [celles de] l’écrasante majorité des chercheurs scientifiques. »
Sur la fin, l’administration Obama avait finalisé un document qui augmentait à 500 mrem le niveau d’exposition aux radiations dans l’eau potable en cas d’urgence nucléaire, avant que les autorités ne soient tenues de fournir de l’eau en bouteille ou d’autres sources alternatives d’eau potable.
Pour l’agence, le récent changement concernant les personnels d’urgence est tout à fait sensé, compte tenu des connaissances scientifiques actuelles.
« Quoique la science en son état actuel suggère que toute exposition aux radiations comporte un certain risque de cancer, il est extrêmement difficile de dire si tel ou tel cancer est dû à de très faibles doses de radiation ou à une autre cause, » déclare l’EPA dans un mail.
Ruch craint que le document ne soit l’indication qu’en cas de fusion d’un réacteur nucléaire « de type Fukushima », l’EPA autoriserait la consommation pour le public d’une eau contaminée par la radioactivité.
« Le docteur Folamour est bien vivant et rôde dans les couloirs de l’EPA, » ironise-t-il.
https://www.bloomberg.com/news/articles/2017-10-16/epa-says-higher-radiation-levels-pose-no-harmful-health-effect?cmpid=socialflow-twitter-business&utm_content=business&utm_campaign=socialflow-organic&utm_source=twitter&utm_medium=social
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