Au titre du laboratoire souterrain qui mène les études exploratoires, la Meuse et la Haute-Marne bénéficient déjà, jusqu’en 2030, d\’une enveloppe de 60 millions d’euros annuelle pour financer des projets de développement économique ou soutenir des associations locales. (Frédérick Florin/AFP).
Le gouvernement défend un modèle fiscal dérogatoire pour le projet de lieu de stockage des déchets radioactifs situé entre la Meuse et la Haute-Marne. Il veut éviter de concentrer les ressources sur les seules communes proches du site.
« C’est un passage de relais qui n’a pas été bien pensé, mais on va pouvoir se remettre au travail.» Avec d’autres parlementaires (toutes étiquettes confondues), la députée LREM de la Meuse Émilie Cariou a obtenu le retrait, début décembre, d’un texte sur Cigéo, le projet de stockage profond des déchets les plus radioactifs d’EDF, d’Areva et du CEA sur le site de Bure, situé aux confins de la Meuse et de la Haute-Marne.
Discuté dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, l’amendement, déposé in extremis par le gouvernement, visait à « définir le modèle fiscal applicable à Cigéo ». « En l’absence de modification des règles actuellement applicables, la fiscalité de Cigéo serait concentrée sur un nombre limité de collectivités territoriales peu peuplées », justifiait le gouvernement. « Nous n’avons pas eu le temps d’examiner les méthodes de calcul ni les impacts réels sur les ressources locales », avait critiqué en séance Émilie Cariou.
Taxe de stockage
Le texte prévoyait, sur la recommandation d’un rapport de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale de l’administration (IGF et IGA), d’accroître et d’étendre le périmètre de distribution de la future taxe de stockage, tout en diminuant (de 90 %) le montant des taxes foncières, pour ne pas alourdir la fiscalité globale.
Au titre du laboratoire souterrain qui mène les études exploratoires, ces territoires bénéficient déjà, jusqu’en 2030, d’une enveloppe de 60 millions d’euros annuelle pour financer des projets de développement économique ou soutenir des associations locales. Mais l’enjeu fiscal en débat est lié à la construction et à l’exploitation du site, prévue pour durer jusqu’en… 2144.
Selon une simulation de la mission IGF-IGA, consultée par « Les Échos », la fiscalité prévue représentera en moyenne 43 millions d’euros par an à partir de 2027, soit plus de 5 milliards d’euros sur la durée de vie prévue de Cigéo. À comparer aux 10 millions d’euros annuels, en moyenne, pour un réacteur nucléaire d’EDF.
Comme Kourou en Guyane
Le principe d’un modèle spécifique de fiscalité n’est pas contesté. « D’autres projets ont un modèle de fiscalité spécifique, comme Kourou, en Guyane (avec l’implantation du centre spatial, NDLR) », rappelle un expert. Cette fois, l’idée est notamment de faire profiter les villes de Bar-le-Duc ou de Saint-Dizier de la manne fiscale de Cigéo. « Ces villes vont devoir construire des infrastructures pour accueillir les salariés du projet, et il faut créer des centres d’attractivité », poursuit cet expert. La région Grand Est capterait aussi une petite part de la ressource fiscale.
Le plus probable est que le texte soit présenté lors du projet de loi de finances pour 2019, à l’automne prochain. Un temps que les opposants au projet devraient aussi utiliser. « L’argent que vous voulez y déverser n’y changera rien : vous n’achèterez pas les consciences », a promis, lors des débats, le député France insoumise Loïc Prud’homme.
Véronique Le Billon
https://www.lesechos.fr/pme-regions/actualite-pme/0301029905101-nucleaire-le-partage-local-de-la-manne-fiscale-de-cigeo-en-debat-2139667.php
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