Flash-back. En avril 2016, alors qu’était célébré le 30e anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl, Ségolène Royal, alors ministre de l’Environnement, annonçait une extension des plans particuliers d’intervention (PPI) autour de toutes les centrales nucléaires <https://actu.fr/societe/nucleaire-en-normandie-le-perimetre-des-plans-dintervention-autour-des-centrales-change_685263.html> françaises, passant de 10 à 20 km. L’année 2018 sera celle de la mise en application de l’élargissement des nouveaux périmètres de sécurité autour des centrales nucléaires.
Trois centrales en Normandie
La France compte 58 réacteurs et 19 centrales nucléaires, dont trois centrales situées en Normandie : Penly et Paluel en Seine-Maritime, et Flamanville dans la Manche. Les PPI visent à protéger les populations, les biens et l’environnement, face aux risques liés notamment aux installations nucléaires. Déclenchés par les préfets, ils prévoient notamment l’information de la population, la mobilisation des hôpitaux, l’organisation d’une éventuelle mise à l’abri de la population…
Pour Didier Anger, une figure antinucléaire du Cotentin, porte-parole du Collectif anti-nucléaire ouest http://www.can-ouest.org/, l’extension des PPI est « quelque chose d’abstrait ».
Interview.
« Cela ne répond pas à ce que pourrait être les conséquences d’un attentat »
Normandie-actu : Que pensez-vous de la mise en place de l’extension des périmètres de sécurité autour des centrales nucléaires ?
Didier Anger : C’est quelque chose d’abstrait, un incident peut être circonscrit à moins de 20 km, mais aussi bien au-delà. D’autant plus que tout dépend de l’ampleur de l’accident ou de l’attentat et de la météo. Si le vent vient de l’ouest, cela pourrait contaminer les îles anglo-normandes et la mer de la Manche. Si les vents sont de l’est, ce sera plutôt Paris et l’Europe qui seront menacés. Croyez-vous que la catastrophe de Tchernobyl s’est arrêtée aux frontières ?
On pense que prendre un compas, tracer un cercle autour de la centrale d’un rayon de 20 km suffit à résoudre le problème. C’est plutôt une manière de répondre aux inquiétudes de la population, de calmer un peu les craintes, notamment sur les problèmes du couvercle du futur réacteur EPR de Flamanville <https://actu.fr/normandie/cherbourg-en-cotentin_50129/cuve-lepr-flamanville-lasn-donne-avis-final_12965121.html> … Mais cela ne répond pas à ce que pourrait être les conséquences d’un accident ou d’un attentat sur une centrale nucléaire.
Normandie-actu : Vous avez évoqué à plusieurs reprises les risques d’attentat dans les centrales, êtes-vous aujourd’hui particulièrement inquiet ?
Didier Anger : Oui, évidemment. Même s’il est interdit de survoler les centrales, un avion qui a décidé de commettre un attentat pourrait propager du kérosène en se crashant. Cela pourrait créer un incendie et franchement, on ne sait pas ce qu’il se passerait…
Ce qui est encore plus inquiétant, c’est que nous avons pu constater que la menace terroriste pouvait se trouver à l’extérieur comme à l’intérieur. Il suffirait qu’un employé de n’importe quelle centrale nucléaire arrête d’alimenter en eau les piscines qui refroidissent les centaines de combustibles usagés <https://actu.fr/normandie/cherbourg-en-cotentin_50129/greenpeace-piscines-centrales-nucleaires-vulnerables-attaques-terroristes_12950051.html> pour créer un accident de grande ampleur…
Sachant qu’il y a une piscine par réacteur en France (soit 58), plus quatre bassins au sein du centre de retraitement de déchets nucléaires de La Hague (Manche), ce n’est pas du tout rassurant.
« Nous sommes d’ailleurs en retard sur nos engagements »
Normandie-actu : Quelles seraient les solutions à mettre en place ?
Didier Anger : Il n’y en a pas beaucoup, à part arrêter le nucléaire ! Et c’est vraiment possible. Il faut savoir que nos voisins, que ce soit la Belgique, la Suisse, l’Allemagne ou encore le Danemark, abandonnent progressivement le nucléaire. Il n’y a que l’Angleterre et la France, qui sont les seuls par ailleurs à posséder l’arme atomique, qui persistent dans le nucléaire.
Nous sommes d’ailleurs en retard sur nos engagements avec l’Union européenne. Nous devions dépasser les 20 % de production d’électricité par les énergies renouvelables d’ici à 2020, nous n’en sommes aujourd’hui qu’à 14 %…
Normandie-actu : Sachant que la part du nucléaire dans l’électricité produite en France dépasse les 75 %, comment faire sans ?
Didier Anger : Nous avons effectivement développé beaucoup de besoins en électricité en France, avec la mise en place de nombreux chauffages électriques notamment. Tellement qu’en période de grand froid, les centrales nucléaires ne suffisent plus…
Cependant, la mise en place d’hydroliennes, la technique de la géothermie ou encore les éoliennes sont des vraies solutions, à adapter en fonction des spécificités de chaque région. Ce qui impliquerait de décentraliser les choix énergétiques.
« Nous avons tout à y gagner à développer l’éolien »
Normandie-actu : En Normandie, quelles seraient nos spécificités en matière d’énergies renouvelables ?
Didier Anger : Nous sommes une terre de grands vents, à l’instar du Languedoc-Roussillon. Nous avons tout à y gagner à développer l’éolien. Par ailleurs, nous possédons un courant marin très fort au niveau du raz Blanchard, au nord de Cherbourg-en-Cotentin pour l’hydroélectricité.
Enfin, nous sommes encore une forte terre agricole qui produit des déchets (paille, résidus de maraîchage)… Avec le système de méthanisation <https://actu.fr/societe/methanisation-en-normandie-les-agriculteurs-doivent-composer-avec-les-riverains_722589.html> , nous pourrions créer de l’électricité. Il est possible de faire autrement, tout est une question de volonté politique.
Manon Loubet, 50 actu
https://actu.fr/societe/interview-centrales-nucleaires-perimetre-securite-elargi-normandie-pas-solution_14682826.html
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