Pour la troisième fois en seulement cinq mois, Kim Jong-un et Moon Jae-in doivent se retrouver alors que le processus de la dénucléarisation semble dans l’impasse.
Retour à la case retrouvailles à Pyongyang. À l’issue d’une session de travail ce lundi dans le village de Panmunjom au niveau de la zone démilitarisée (DMZ), les deux Corées ont convenu d’une troisième réunion en septembre dans la capitale du Nord. Déjà, le 27 avril, Kim Jong-un et Moon Jae-in s’étaient rencontrés pour la première fois lors d’une journée historique, forte en symboles et en déclarations.
Souriant, la main dans la main, les deux leaders avaient enjambé la DMZ avant de s’entretenir en tête, au Sud, puis de parapher la déclaration de Panmunjom. Un mois plus tard, c’est au nord et à la demande de Kim Jong-un que les deux dirigeants coréens s’étaient retrouvés. Donald Trump venait d’annoncer qu’il ne participerait pas au sommet de Singapour avec Kim Jong-un. Avant de se raviser et d’aller serrer la main de Kim à Singapour le 12 juin.
Ces troisièmes retrouvailles coréennes en seulement cinq mois se tiendront à Pyongyang. La capitale du Nord n’avait plus accueilli un haut dirigeant depuis octobre 2007 avec la visite du président sud-coréen Roh Moo-hyun à Kim Jong-il, le père de Kim Jong-un. La réunion pourrait avoir lieu entre le 15 et 30 septembre, selon Kim Eui-kyeom, le porte-parole de la présidence sud-coréenne. Soit après le 9 septembre, jour du 70e anniversaire de la proclamation de la République populaire de Corée que le régime ne manquera certainement pas de célébrer.
En famille au mont Kumgang
Aucun détail n’a pour l’instant filtré sur le menu des discussions. On sait seulement que Pyongyang et Séoul vont passer en revue ce qui a été entrepris depuis leurs précédents sommets. D’abord, ils reviendront probablement sur les rencontres familiales Nord-Sud qui auront lieu du 20 au 26 août au mont Kumgang dans le sud-est de la Corée du Nord. Presque trois ans après la dernière réunion familiale, près de 180 Coréens vont retrouver leurs proches dont ils ont été séparés depuis la fin de la guerre de Corée en 1953. Plus les années passent et plus les candidats à ces retrouvailles le temps de quelques heures sont âgés. La grande majorité a plus de 80 ans et on compte une trentaine de nonagénaires et au moins deux centenaires au Sud.
Mais ces nouveaux pourparlers aborderont surtout des questions cruciales pour les relations entre le Nord et le Sud : le développement des échanges et la coopération transfrontalière, notamment dans le secteur des transports, des infrastructures et du sport. Pyongyang, qui est à l’instigation de ce troisième sommet de l’année, souhaite à la fois parvenir à une déclaration de paix – les deux Corées qui ont signé un armistice sont techniquement toujours en guerre – et obtenir de Séoul le lancement de projets économiques conjoints.
Ri Son-gwon, le président du comité nord-coréen visant à la «réunification pacifique» de la péninsule, a déclaré lundi qu’il était important de lever les «obstacles» dans les relations inter-coréennes. «Si les problèmes soulevés lors des négociations ne sont pas résolus, des problèmes inattendus pourraient surgir.» Le Nord estime que le Sud fait montre d’une «attitude ambivalente» à son encontre, selon les commentaires du site nord-coréen Uriminzokkiri, qui provoque le «ressentiment de la nation tout entière». D’après le site, Séoul se montre chaleureux avec le Nord, promouvant le «dialogue et la coopération», tout en «étant plus fidèle aux ordres de son maître [les États-Unis, ndlr] au sujet des sanctions et de la pression».
Chaud et froid
Contrainte par le régime des sanctions des Nations unies, la Corée du Sud ne peut s’engager trop avant dans des projets de coopération avec le Nord. Fidèle à sa posture de médiateur-facilitateur, le président Moon Jae-in doit également composer avec l’imprévisible Donald Trump. Car ces retrouvailles coréennes de septembre interviennent au moment où le processus de dénucléarisation semble dans l’impasse. Washington et Pyongyang s’accusent mutuellement de renier les engagements du sommet de Singapour.
L’administration Trump attend toujours de voir les «Nord-Coréens entamer le processus de dénucléarisation», selon le commentaire de John Bolton, le très faucon conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump. Fidèle à sa stratégie de souffler le chaud et le froid, le président américain s’est toutefois démarqué de son conseiller la semaine dernière, en indiquant lors d’un dîner que le Nord avait fait des progrès dans le démantèlement de son programme nucléaire.
Pourtant, des officiels américains ont déclaré à Reuters que la Corée du Nord et les États-Unis devaient encore se mettre d’accord sur un calendrier visant à éliminer son arsenal nucléaire ou pour révéler son ampleur. Les Américains estiment que les Nord-Coréens disposent de 30 à 60 têtes nucléaires. Le 3 août, un rapport confidentiel des Nations unies indiquait que le Corée du Nord «n’avait pas arrêté ses programmes nucléaires et de missiles».
Arnaud Vaulerin
http://www.liberation.fr/planete/2018/08/13/rendez-vous-a-pyongyang-pour-les-freres-coreens_1672412
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