Tokyo – Le géant industriel japonais Hitachi a annoncé lundi le rachat de la branche réseaux électriques du spécialiste helvético-suédois de la robotique ABB, dans le but de changer d’échelle, au moment où le nucléaire a du plomb dans l’aile.
Le montant de la transaction est évalué à 714 milliards de yens (5,5 milliards d’euros).
Si elle aboutit, cette opération sera la plus importante jamais réalisée par Hitachi, un groupe surtout connu du grand public pour ses appareils audiovisuels et électroménagers, mais qui est aujourd’hui essentiellement tourné vers les équipements pour les professionnels dans de multiples secteurs d’activité.
L’objectif est d’accélérer « le développement international de l’activité énergie« , a justifié Hitachi dans une présentation mise en ligne.
Cette division d’ABB avait été au cœur d’un bras de fer avec le fonds activiste suédois Cevian Capital, qui poussait l’entreprise à s’en séparer ou à la scinder et à l’introduire séparément en Bourse. Il a aussitôt salué lundi « un pas dans la bonne direction« .
La solution « vendre à Hitachi » n’est pas tombée du ciel: Hitachi et ABB avaient en effet noué en 2014 un partenariat stratégique dans ce domaine et la transaction annoncée lundi s’inscrit dans la suite de cette coopération.
Elle ne sera pas bouclée avant le premier semestre 2020 cependant. « Nous devons passer par un processus réglementaire complexe, qui va prendre du temps« , a expliqué le directeur général d’ABB Ulrich Spiesshofer, lors d’une conférence téléphonique. Rien qu’en Chine, ABB dispose de 20 coentreprises, a-t-il cité en exemple.
L’électricité, dont les équipements de réseaux électriques couplés à des infrastructures informatiques, constitue l’un de ses principaux domaines de compétences d’Hitachi, avec un chiffre d’affaires annuel de quelque 3,50 milliards d’euros, mais cela reste petit à l’échelle internationale.
C’est pourtant un domaine où il y a du potentiel: « l’activité de transport et distribution d’électricité se développe de façon mondiale, les services attenants étant un domaine particulièrement prometteur« , soulignait dans un récent communiqué l’agence de notation S&P Global Ratings.
Hitachi en a conclu qu’il devait grossir vite. Et de souligner les atouts de cette branche d’ABB: 36.000 salariés, 100 sites industriels dans le monde et 200 bureaux commerciaux.
Il y voit aussi une forte complémentarité avec ses autres activités, à un moment où la question de l’électricité (mode de production, consommation, gestion, stockage) est cruciale compte tenu des enjeux énergétiques et environnementaux planétaires.
– Projet nucléaire britannique menacé –
Hitachi est présent d’un bout à l’autre de la chaîne électrique: il fabrique aussi bien des puces et équipements informatiques pour la gestion des réseaux que les équipements lourds des centrales de tous les types, dont les installations nucléaires.
Mais ce n’est pas avec la construction de réacteurs atomiques qu’il peut espérer monter en puissance: non seulement, au Japon, les perspectives à court terme sont obérées par les suites de l’accident de Fukushima mais, au niveau mondial, cette catastrophe a fait bondir les coûts de sûreté des autres sites à bâtir, au point que les acteurs japonais du secteur sont forcés de jeter l’éponge.
Toshiba, plombé par des scandales financiers, s’est défait de ses activités nucléaires hors du Japon.
Selon les médias japonais, Mitsubishi Heavy Industries (MHI) va renoncer au projet de construction de réacteurs en Turquie en partenariat avec le français Engie.
Et Hitachi lui-même va décider sous peu s’il poursuit ou non le projet de construction de deux réacteurs en Grande-Bretagne via sa filiale Horizon Nuclear Power, acquise en 2012 auprès des groupes allemands E.ON et RWE. « Il va probablement abandonner« , titrait en fin de semaine le quotidien Yomiuri Shimbun.
S&P estime que Hitachi prendrait « des risques excessifs » s’il se lançait dans cette aventure en sus de l’opération ABB.
Quant au conglomérat helvético-suédois, qui fabrique aussi bien des robots industriels que des systèmes de propulsion marine ou des équipements ferroviaires, la transaction va lui permettre de simplifier sa structure et de diminuer ses coûts.
Ce regroupement devrait hisser Hitachi au deuxième rang mondial des fournisseurs de matériel et prestations aux compagnies d’électricité, derrière le mastodonte américain General Electric (GE).
Il n’y aura pas d’incidence sur les comptes d’Hitachi durant l’exercice en cours, a précisé le groupe japonais.
noo-kap/anb/nas
AFP / 17 décembre 2018 12h16
https://www.romandie.com/news/Hitachi-rachete-l-unite-reseaux-electriques-d-ABB-plus-sure-que-le-nucleaire/980574.rom
Commentaires récents