NUCLÉAIRE : FIN DE PARTIE POUR L’USINE AMÉRICAINE DE MOX D’ORANO

Les États-Unis et la Russie s’étaient entendus pour démanteler chacun 34 tonnes de plutonium issues de leur arsenal militaire. Une usine de MOX était en chantier sur le site de Savannah River (Caroline du Sud).

Le projet, qui avait vu le jour dans le cadre d’un accord entre les États-Unis et la Russie, a déjà coûté plus de 7 milliards de dollars.

Début d’année douloureux pour les salariés du chantier de l’usine de combustible MOX aux États-Unis. Quelque 600 personnes (soit un tiers des effectifs) ont commencé à quitter la co-entreprise détenue à 30 % par le groupe français Orano (ex-Areva) et à 70 % par l’américain CB & I, après la notification, par l’administration américaine en octobre, de la fin du projet.

Par un accord de 2000, les États-Unis et la Russie s’étaient entendus pour démanteler chacun 34 tonnes de plutonium issues de leur arsenal militaire. Pour y satisfaire, les États-Unis avaient opté pour la fabrication de MOX, un mélange d’uranium et de plutonium utilisable dans les réacteurs nucléaires civils. Le site nucléaire de Savannah River (Caroline du sud) avait été choisi pour héberger l’usine, sur le modèle de l’unité Melox d’Areva dans le Gard. L’utilisation du MOX avait été testée dans la centrale nucléaire de Catawba, également en Caroline du Sud.  

Un projet coûteux

Au moment de la signature du projet en 2008,  le budget était évalué à 2,7 milliards de dollars . Mais en 2014, Areva estimait que 4 milliards de dollars avaient été dépensés et que la même somme était encore nécessaire pour une mise en service alors prévue en 2020. Aujourd’hui, plus de 7 milliards de dollars auraient déjà été dépensés, pour un niveau d’achèvement du chantier d’environ 70 % et une mise en service repoussée « dans le courant de la prochaine décennie », selon un porte-parole d’Orano.

Une envolée des coûts qui a, ces cinq dernières années,  nourri débats et critiques à chaque exercice budgétaire aux États-Unis, au moment de voter les crédits annuels du projet. Proche de Donald Trump, le sénateur républicain de Caroline du Sud Lindsey Graham a toutefois qualifié la décision de terminer le programme d’« erreur colossale ».

Alternatives

L’abandon du projet n’aura pas de conséquence financière sur Orano, assure le groupe français, fournisseur de la technologie et des équipements (les « boîtes à gants », des enceintes étanches permettant de manipuler des matières dangereuses). « L’administration américaine a résilié le contrat pour « convenance », sans imputer de faute. Nous avions livré 90 % des boîtes à gants et nous étions payés sur une base « cost plus fee », c’est-à-dire que nos coûts étaient couverts et nous avions une marge », indique un porte-parole d’Orano, qui compte environ 200 salariés sur le site.

L’administration américaine propose en alternative la dilution chimique du plutonium et son stockage sur un site nucléaire au Nouveau Mexique. Sur le site de Savannah River, un projet de production de nouveaux composants (« plutonium pits ») pour des armes nucléaires a quant à lui été évoqué, sans être confirmé.

Véronique Le Billon, le 9 janvier 2019

https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/0600469619428-nucleaire-fin-de-partie-pour-lusine-americaine-de-mox-dorano-2234940.php