D’un tweet, Donald Trump nous apprend, le 20 juin, qu’il a ordonné le bombardement de trois sites iraniens, puis l’a annulé dix minutes avant que les avions, déjà en vol, n’atteignent leurs cibles et ne fassent, selon l’estimation d’un général US, 150 morts. Sans ce revirement de dernière minute, que se serait-il passé ? Un nouvel embrasement du Moyen-Orient ?
Quelle que soit l’issue de la crise opposant les États-Unis à l’Iran, une chose est sûre : cette situation n’est plus tolérable. Il n’y a aucune raison que les armes nucléaires soient interdites à certains et autorisées à d’autres. Il faut les éliminer toutes. C’est le seul moyen d’éviter leur prolifération.
Selon leurs partisans, elles auraient « préservé la paix par la dissuasion ». Pourtant, depuis 1945, elles n’ont pas empêché quantité de guerres, massacres organisés, attentats terroristes – dont le 11 septembre – de ravager le Proche et le Moyen-Orient, l’Asie, l’Afrique, les Amériques, sans épargner l’Europe, faisant au total plus de morts que la Première Guerre mondiale.
Négocier la fin des armes
L’arme nucléaire est elle-même un facteur de guerre. C’est principalement pour financer son acquisition que Saddam Hussein a envahi le Koweït en 1990, provoquant ainsi la première guerre du Golfe. Cette même volonté lui fut encore prêtée en 2003 pour justifier la deuxième « guerre du Golfe », dont les effets catastrophiques se font toujours sentir. C’est la recherche de « l’équilibre de la terreur » qui poussa Khrouchtchev à installer clandestinement des missiles nucléaires à Cuba et conduisit l’humanité « au bord du gouffre » en octobre 1962.
Surtout, les armes nucléaires pourrissent les relations internationales. Armes d’extermination, elles menacent l’existence même de l’Autre.
À l’inverse, renoncer aux armes nucléaires, ce serait changer d’ère. En décembre 1987, Gorbatchev et Reagan signaient le traité d’élimination des forces nucléaires intermédiaires. L’air du temps en était changé. « L’empire du mal » soviétique était devenu, aux yeux de Reagan, un partenaire fiable et pacifique. Et deux ans plus tard, Gorbatchev refusant de reproduire les interventions soviétiques de Berlin (1953), Budapest (1956) et Prague (1968), le mur de Berlin tombait sans un seul coup de feu et le partage de l’Europe en deux blocs ennemis cessait. Fin de la Guerre froide. Conséquences : détente et chute des dépenses militaires mondiales, à environ 1 000 milliards de dollars par an au milieu de la décennie 1990. Depuis, elles ont repris, jusqu’à leur apogée actuelle : plus de 1 820 milliards en 2018 (source : Sipri).
Mais comment faire disparaître les armes nucléaires ? C’est très simple : en négociant leur abolition. Les cinq États dotés d’armes nucléaires signataires du traité de non-prolifération (TNP) – dont la France depuis 1992 – y sont tenus par son article 6. Mais jamais ils ne se sont réunis pour négocier l’élimination de leurs armes. Ils ont juste passé plusieurs années à… établir un glossaire.
Ne leur demandons pas de désarmer chacun unilatéralement, ils s’y refuseront. Si la Russie et la Chine ne l’ont pas dit, la France, les États-Unis et le Royaume-Uni l’ont déjà fait savoir ensemble. Demandons-leur de tenir parole : de négocier entre eux, et bien sûr avec les quatre autres États nucléaires hors TNP (Israël, Inde, Pakistan, Corée du Nord) un désarmement multilatéral, intégral, universel et contrôlé. Et de négocier, avec les États non dotés, l’interdiction définitive de ces armes, pour cause de crime contre l’humanité.
La France peut et doit provoquer ces négociations. C’est en tout cas ce que réclament 85 % des Français, d’après un sondage Ifop de mai 2018. Et c’est la proposition que trente parlementaires d’une dizaine de groupes soutiennent depuis janvier, dans une loi qu’ils invitent leurs collègues à signer pour en faire l’objet d’un référendum d’initiative partagée.
Nous appelons tous les parlementaires et tous les citoyens à soutenir cette proposition de loi référendaire. Elle permettra au peuple français d’ouvrir la voie à un monde sans armes nucléaires et radioactives. On ne peut vivre indéfiniment sur une poudrière.
Jean-Marie Matagne et Jean-Michel Clément, modifié le 11/07/2019 à 16h47
Photo : Des missiles iraniens devant le portrait de l’ayatollah Khamenei, lors d’une parade à Téhéran en avril 2018. | PHOTO AFP / ATTA KENARE
https://www.ouest-france.fr/reflexion/point-de-vue-abolir-les-armes-nucleaires-est-une-urgence-6426422
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