LE 7H50 D’ANTHONY CELLIER : « LE PROJET ASTRID N’EST PAS ABANDONNÉ »

Le programme ASTRID, le réacteur nucléaire de quatrième génération, était pressenti pour voir le jour sur le site nucléaire de Marcoule, près de Bagnols.

Seulement voilà, le projet du CEA a pris du plomb dans l’aile : reporté à la seconde moitié du siècle, soit après 2050, il est considéré par beaucoup comme abandonné. Le député LREM de la troisième circonscription du Gard, Anthony Cellier, rapporteur de la loi énergie-climat et spécialiste des questions énergétiques, réagit.

Objectif Gard : Le programme ASTRID est a priori abandonné après des années de travail et 738 millions d’euros investis. Pour quelle(s) raison(s) ?

Anthony Cellier : Sur ce dossier de réacteur à neutrons rapides (RNR, ndlr) il s’agissait d’un avant-projet. Un avant-projet est fait pour investiguer le champ de faisabilité dans un contexte global, pas seulement technique, mais économique et stratégique. Le tout dans un contexte qui a beaucoup bougé depuis Fukushima, sachant que par ailleurs le coût des gisements d’uranium augmentent mais le coût de la matière baisse considérablement. C’est le premier sujet.

Le second sujet est qu’aujourd’hui, nous n’avons pas terminé le réacteur de troisième génération l’EPR sur lequel nous en sommes à 11 milliards d’euros de soutien financier. Mais le projet de RNR n’est pas abandonné. Certains l’entendent comme un abandon, mais il est amené à une échéance qui est la deuxième moitié de ce siècle. En matière d’énergie, on est amené à réfléchir sur des échéances longues. Et je précise qu’il n’a jamais été dit qu’ASTRID se ferait, ni qu’il se ferait ici, à Marcoule. C’est un avant-projet.

Ce réacteur nouvelle génération permettait notamment de recycler plus de plutonium…

Oui, mais la stratégie de la France sur la fermeture du cycle n’est pas non plus abandonnée.

La seule solution pour les déchets reste le site d’enfouissement de Bure ?

Il y a une notion, celle de multi-recyclage, sur laquelle Orano Melox (à Marcoule, ndlr) aura un rôle important à jouer, et le CEA aussi. L’objectif est d’avoir des tests sur le MOX2 (du combustible pour centrale fabriqué à partir de combustible nucléaire usagé, ndlr) d’ici 2025, et c’est ici que cette matière va se fabriquer, même si elle nécessitera une révision en profondeur de Melox.

Bure concerne la partie stockage. L’objectif est de multi-recycler les combustibles pour les repasser notamment dans le parc des réacteurs à eau pressurisée, notamment les 1 300 Mégawatts. Nous faisions du mono-recyclage, nous ferons du multi-recyclage, avec l’objectif de la fermeture du cycle. Sur cette question, on mélange les sujets. Il y a de l’économie et de la science, de la stratégie énergétique nationale prise dans un contexte international, avec une logique prise pour acquise en local.

Le site de Marcoule (Flickr / cc / Kmaschke)

Donc cette décision est conforme à la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) et à la loi énergie-climat dont vous êtes le rapporteur ?

Oui, elle est conforme à la PPE et à la loi énergie-climat, qui est aussi là pour rectifier quelques données de cette PPE pour que son décret puisse être promulgué. Sur le volet nucléaire de la PPE, le seul sujet c’est la baisse de la part du nucléaire dans le mix énergétique français à 50 % d’ici 2035. Je reste cependant convaincu que les recherches sur le réacteur de quatrième génération (ASTRID, ndlr) doivent continuer.

Avec cette décision, la France ne risque-t-elle pas de perdre sa position de leader sur le nucléaire ?

Nous avons une avancée technique et technologique connue et reconnue à l’international. Il faut la préserver, notamment en donnant des lignes directrices au CEA, comme sur le sujet du multi-recyclage. Nous avons fait le choix du RNR mais d’autres pays ont fait d’autres choix. Ce qu’il faut arriver à faire maintenant, et ça fait partie des travaux initiés par la France, c’est continuer à travailler sous une forme de consortium sur le nucléaire. On ne peut pas jouer tout seul. Surtout dans un contexte international qui a beaucoup bougé après Fukushima.

L’opinion publique aussi a bougé sur le nucléaire.

Oui, l’opinion publique aussi a bougé. Mais le rapport du GIEC (le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, ndlr) souligne que le nucléaire est une énergie décarbonée sur laquelle les stratégies de décarbonation de l’énergie peuvent s’appuyer. D’où le passage de 2025 à 2035 sur la baisse de la part du nucléaire dans le mix énergétique français, ou la fermeture des quatre dernières centrales à charbon du pays qui est inscrite dans la loi énergie-climat. D’ailleurs, ces fermetures touchent 800 personnes à qui il faut trouver une reconversion, à qui nous garantissons un suivi. Ce sont des victimes du réchauffement climatique et d’un choix au bénéfice du climat.

Diriez-vous que la filière du nucléaire a encore un avenir ?

Oui, sans problème.

Propos recueillis par Thierry Allard

Et aussi : Une réunion publique est organisée ce mercredi soir à 18h30 au centre culturel de Bagnols sur la Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs. Dans ce cadre, l’union locale de la CGT estime que « il est incontournable de développer l’économie circulaire de la filière nucléaire. Cela implique une recherche dans le domaine nucléaire avec des investissements stables et orientés sur des alternatives permettant la réduction des volumes et de la nocivité des déchets. Le désengagement de l’État dans le projet Astrid, prototype industriel de réacteur de 4e génération porté par les équipes du CEA de Marcoule et Cadarache, est très préoccupant. »                                                 

Source : Objectif Gard    (3/9/2019), rédigé par Thierry Allard

Photo en titre : Le député LREM de la troisième circonscription du Gard Anthony Cellier (Photo d’archives : Thierry Allard / Objectif Gard)

https://webmail1n.orange.fr/webmail/fr_FR/read.html?FOLDER=SF_INBOX&IDMSG=56603&check=&SORTBY=1

 Note d’un des facteurs de l’actualité : « INCROYABLE il faut entretenir coûte que coûte le MYTHE du Nucléaire  Sauveur !!!!!