La nouvelle PPE proposée par le Gouvernement contient quelques ajustements dans les objectifs de déploiement des énergies renouvelables. La baisse de la production nucléaire et les réacteurs à fermer sont également précisés.
La procédure d’adoption de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) entre dans sa dernière ligne droite. Le Gouvernement soumet à consultation du public de nouveaux documents accompagnés de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC). La PPE est en discussion depuis plusieurs années. Son adoption a été ralentie par les travaux de la loi énergie-climat, et le mouvement des gilets jaunes qui a provoqué l’abandon de la trajectoire de hausse de la fiscalité carbone. Une mise à jour était donc nécessaire. L’État en a profité pour ajuster et préciser certains éléments, en répondant notamment aux nombreux avis rendus sur le projet (autorité environnementale, CNTE, CESE, bilan du débat public, etc.).
Modifications générales
Ainsi, en conformité avec la loi énergie-climat, le projet de PPE a été modifié pour viser une réduction de 20 % de la consommation d’énergie finale en 2030 (par rapport à 2012) au lieu de 17 % ; une réduction de 40 % de la consommation d’énergie fossile primaire en 2030 (par rapport à 2012) au lieu de 30 % ; un niveau de 33 % de consommation d’énergie d’origine renouvelable en 2030 au lieu de 32 % ; un objectif de réduction de 50 % de la part du nucléaire dans la production d’électricité en 2035.
Le projet de PPE intègre également plusieurs nouvelles mesures, notamment : le gel de la croissance de la composante carbone dans la taxation de l’énergie ; les mesures et objectifs de la loi énergie-climat concernant la rénovation des logements ; l’identification à venir de dispositifs de soutien aux actions de décarbonation ou d’efficacité énergétique dans l’industrie dans le cadre des travaux sur le Pacte productif 2025.
Mais il est aussi écrit que les mesures en place ou annoncées dans le document, « devront être complétées par des mesures additionnelles pour atteindre les objectifs fixés par la loi, notamment en matière de réduction de la consommation d’énergie finale. » Ces mesures additionnelles seront définies « à l’issue de concertations supplémentaires et en tenant compte des conclusions de la convention citoyenne pour le climat », explique le Gouvernement.
Ajustement des ENR
Le Gouvernement revoit ses ambitions légèrement à la baisse pour l’éolien terrestre et le photovoltaïque. Mais les professionnels du solaire restent positifs : « Nous sommes prêts à relever ce défi ambitieux mais atteignable, sous réserve que les mesures visant à débloquer les freins au déploiement de l’énergie solaire soient prises rapidement et que les appels d’offres soient adaptés en conséquence », prévient Daniel Bour, président d’Énerplan.
Les objectifs restent similaires pour l’hydroélectricité et la méthanisation. Pour cette dernière, la trajectoire du tarif d’injection du biométhane via des appels d’offres a été ajustée à la hausse, avec une cible de 75 €/MWh en 2023 (contre 65 €/MWh dans la version précédente). La cible du tarif d’achat pour 2028 n’a pas été modifiée et reste de 60 €/MWh. À la lecture de cette PPE, la filière biogaz se désole que les volumes injectés prévus pour la période 2019-2023 de 6 TWh/an n’aient pas été, a minima, maintenus à 8 TWh/an comme pour la PPE en vigueur (2016-2018). « Bien que le Gouvernement ait rehaussé l’enveloppe de soutien public à 9,7 milliards d’euros pour la période 2019-2028 (contre 7,9 milliards précédemment), il continue à conditionner fortement la production de biogaz pour la seconde période 2023-2028 à 14 ou 22 TWh à une trajectoire de baisse des coûts non atteignable », regrette France gaz renouvelables.
Par contre, l’éolien en mer est clairement favorisé. Les capacités allouées par appels d’offres ont été augmentées avec, notamment, le doublement de la capacité d’un projet d’éolien flottant en Méditerranée en 2022 (500 MW contre 250 MW) et un nouveau projet d’éolien posé à réaliser en 2021-2022 (pour une capacité de 500 à 1 000 MW). Dès l’année 2025, les projets (éolien posé ou flottant) seront de 1 000 MW (selon le gisement) contre 500 MW dans la précédente version. Ces différentes modifications portent alors la capacité installée en 2028 à 5,2 GW voire 5,5 GW (contre entre 4,7 GW et 5,2 GW).
Le soutien financier pour les premiers déploiements alloués à la filière hydrogène a été porté à 50 M€/an (contre 100 M€ sur la période 2019-2023 dans la version précédente), en complément des soutiens accordés dans le cadre du plan d’investissement d’avenir.
Enfin, la trajectoire du Fonds chaleur est maintenue à 350 M€/an à partir de 2020 (contre une trajectoire décroissante dès 2022 dans la version précédente). « Elle pourra être revue en fonction des autres mesures à définir visant la maîtrise de la demande en énergie », explique le Gouvernement.
Précisions sur le nucléaire
En conformité avec la loi énergie-climat, le projet de PPE a été modifié pour viser une réduction de 20 % de la consommation d’énergie finale en 2030.
Pour atteindre l’objectif de 50 % de la production d’électricité d’ici 2035, il va falloir fermer 14 réacteurs nucléaires de 900 MW, dont les deux de la centrale de Fessenheim. Le Gouvernement pose le principe général que l’arrêt des réacteurs (hors Fessenheim) sera à l’échéance de leur 5e visite décennale, soit quand ils auront fonctionné 50 ans. Les arrêts s’échelonneront entre 2029 et 2035. Le Gouvernement estime que ces fermetures sont cohérentes avec la stratégie industrielle d’EDF, qui amortit comptablement les réacteurs de 900 MW sur une durée de 50 ans, et ne donneront donc pas lieu à indemnisation.
Mais ce principe conduirait à arrêter, en moyenne, deux réacteurs par an entre 2030 et 2035, ce qui pose la question de la maîtrise de cette programmation sur les plans social, technique, et en termes de capacité politique pour les gouvernements à cette période. Le Gouvernement préfère donc anticiper et demande à EDF de prévoir la fermeture de deux réacteurs en 2027 et en 2028, au titre de la politique énergétique.
Le Gouvernement pourrait également demander à EDF l’arrêt de deux réacteurs supplémentaires, en 2025-2026, sous certaines conditions. L’analyse de ces conditions fera l’objet d’un rapport remis par la Commission de régulation de l’énergie au Gouvernement avant le 1er décembre 2022, et s’appuyant sur l’expertise de RTE.
Second principe édicté par le Gouvernement : les fermetures ne doivent pas conduire à la fermeture complète d’un site. Elles doivent donc concerner des sites qui possèdent quatre ou six réacteurs. Sur la base de ces critères, EDF a proposé au Gouvernement d’étudier la mise à l’arrêt de paires de réacteurs sur les sites du Blayais (deux réacteurs arriveront à 50 ans en 2031 et 2033), de Bugey (2029-2030), Chinon (2034), Cruas (2034-2035), Dampierre (2030-2031), Gravelines (2030-2031) et Tricastin (2030).
Par Florence Roussel, journaliste, Rédactrice en Chef, publié le 21 janvier à 15h18
Photo en titre : Programmation pluriannuelle de l’énergie : certaines énergies renouvelables sont revues à la baisse (© FotoIdee)
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