Le gouvernement va ajouter à son budget pour 2020 des crédits afin de régler en une fois l’indemnisation pour l’arrêt anticipé de la centrale nucléaire alsacienne d’EDF. Un paiement différé aurait pu coûter des dizaines de millions d’euros en plus à l’État.
Pourquoi payer en plusieurs fois quand on peut le faire d’une traite et économiser des dizaines de millions d’euros ? C’est le calcul de l’État, qui a décidé de dédommager entièrement EDF dès cette année pour la fermeture anticipée de la centrale nucléaire de Fessenheim (Haut-Rhin). Pour cela, le gouvernement a proposé d’adopter une ouverture de crédit supplémentaire dans le quatrième budget rectificatif pour 2020 qui sera examiné à l’Assemblée nationale mardi.
La transition énergétique sera-t-elle la nouvelle chance du nucléaire ?
Sur les 357 millions d’euros d’ouverture dont fait l’objet la mission « Écologie, développement et mobilité durables » du budget, 300 millions sont destinés au « paiement en une fois de l’indemnité due au titre de la fermeture de la centrale de Fessenheim », d’après le nouveau document rédigé par Bercy. (NDLR : il ne reste donc que 57 millions pour l’Écologie, développement et mobilité durables !!! De qui se moque-t-on ? Des Français je suppose !)
Paiement le plus rapide possible
Cette indemnisation figure dans le protocole signé avec l’électricien en septembre 2019 . L’accord prévoyait toutefois que l’État puisse étaler ses versements en plusieurs tranches sur les quatre années suivant la fermeture de Fessenheim, dont les réacteurs ont été définitivement arrêtés en juin cette année . Pourquoi alors cette décision de payer en une fois ? Elle fait « suite aux recommandations de la Cour des Comptes dans son récent rapport sur l’arrêt et le démantèlement des installations nucléaires », explique le ministère de la Transition écologique, qui évoque « des raisons d’optimisation de la dépense publique ».
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Ce rapport publié en mars soulignait en effet clairement que ce montant dû – qu’il évaluait à 370 millions d’euros – « pourrait s’avérer plus élevé en cas de paiement différé, compte tenu des taux d’actualisation retenus », et assurait qu’« un paiement le plus rapide possible permettrait à l’État d’économiser plusieurs dizaines de millions d’euros ».
Lors de la signature du protocole, EDF avait évoqué un montant proche de 400 millions d’euros. L’État, qui a déjà provisionné 77 millions d’euros dans son projet de loi finances initial pour indemniser EDF, devrait ainsi « économiser » une trentaine de millions en réglant tout d’un coup. « Il n’y aura pas d’intérêts intercalaires », explique un connaisseur. Les 377 millions doivent ainsi être versés en totalité « avant la fin de l’année » à EDF, assure le ministère de Barbara Pompili.
Versements ultérieurs
Pour autant, l’État ne solde pas là l’intégralité de ses comptes liés à la fermeture de Fessenheim. Le protocole signé avec EDF stipule en effet qu’en plus de cette part initiale, l’électricien recevra un supplément en cas de manque à gagner pour tenir compte des bénéfices qu’il aurait pu réaliser jusqu’à la fin de vie théorique de la centrale, en 2041. (NDLR : pourquoi pas 2060 ou plus… ? En 2041, ces réacteurs auraient eu 63 ans soit plus du double de la durée de vie initialement prévue)
Les montants de cette part additionnelle restent toutefois « très incertains », soulignait la Cour des comptes en mars, car les bénéfices manqués seront calculés à partir des prix de marché qui seront constatés au cours des vingt ans à venir. Le ministère de la Transition écologique précise que cette part « donnera lieu le cas échéant à des versements ultérieurs ». (NDLR : chic alors, ce seront nos enfants qui paieront, ouf, j’ai eu peur que ce soit nous… !)
Par Muryel Jacque, Sharon Wajsbrot, publié le 6 novembre 2020 à 17h50, mis à jour le 6 novembre 2020 à 20h31
Photo en titre : La centrale nucléaire de Fessenheim, en Alsace, quelques jours avant sa fermeture, fin juin 2020. (SEBASTIEN BOZON/AFP)
https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/fessenheim-letat-versera-370-millions-deuros-a-edf-cette-annee-1262840
NDLR : Les 2 réacteurs de Fessenheim sont opérationnels (mis en service) depuis 1978. Ils ont été conçus pour fonctionner 30 ans, prolongeables jusqu’à 40 ans. Ils sont donc complètement amortis selon les prévisions puisqu’ils ont fonctionnés plus que les 40 années prévues (aller au-delà reviendrait à rogner sur les marges de sécurité). Je ne comprends donc pas pourquoi, nous, contribuables, devrions une indemnité. Ne serait-ce pas une manière déguisée de subventionner les « futurs EPR » car n’oublions pas que 14 autres réacteurs nucléaires devront fermer d’ici 2035 donc probablement autant de fois 188, 5 millions d’indemnisation soit plus de 3 milliards d’Euros en comptant Fessenheim ! Et je ne compte pas les éventuels versements ultérieurs évoqués dans cet article.
Finalement, on s’en sort pas trop mal : on a payé l’électricité pas très cher et on « confie » à nos descendants les problèmes d’indemnisation, des déchets dont on ne sait que faire, du démantèlement des installations…C’est sans doute une nouvelle forme de la solidarité intergénérationnelle…
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