POLYNÉSIE : UNE ASSOCIATION TAXE L’INSERM DE «NÉGATIONNISME» POUR SON ÉTUDE SUR LES CONSÉQUENCES DES ESSAIS NUCLÉAIRES

L’association 193, l’une des principales sur le dossier du nucléaire en Polynésie française, conteste le bilan rendu mardi par l’Institut de la recherche et de la santé (Inserm), qui n’établit pas de lien avéré entre les essais nucléaires menés dans ses archipels et les maladies développées par certains habitants.

La colère est vive pour les associations anti-nucléaires de Polynésie française. Lundi, l’Institut national de la recherche et de la santé (Inserm) a dévoilé les contours d’un rapport, à paraître ce mercredi, qui n’établit pas de lien direct entre les essais nucléaires menés dans ses archipels et un certain nombre de maladies. Pour l’association 193, ce rapport relève du « négationnisme ».

Dix experts réunis par l’Inserm estiment que les résultats des études menées en Polynésie française « sont insuffisants pour conclure de façon solide sur les liens entre l’exposition aux rayonnements ionisants issus des retombées des essais nucléaires atmosphériques en Polynésie française et l’occurrence » de pathologies comme le cancer de la thyroïde ou les hémopathies malignes.

« Ce rapport n’apporte rien de nouveau, c’est la continuité d’une négation de la réalité. 193 essais nucléaires, c’est l’équivalent de 800 bombes d’Hiroshima : dire qu’il n’y a pas eu d’effets, c’est du négationnisme », réagit le père Auguste Uebe-Carlson, président de 193. Cette association milite notamment pour une meilleure indemnisation des victimes des essais.

« Tout ce qui touchait au nucléaire était entièrement contrôlé par l’armée »

Au-delà des effets sanitaires des essais nucléaires, l’association 193 s’inquiète d’une réinterprétation de l’Histoire, par exemple au sein du Centre de Mémoire, qui devrait voir le jour à Tahiti après un engagement du Président François Hollande. « Le Centre de mémoire va devenir un lieu où on va retrouver ce genre d’affirmation sur les essais propres, ça va être le lieu d’une seule parole » s’inquiète le père Uebe-Carlson.

Le rapport de l’Inserm a réuni 1 200 études portant sur la Polynésie, mais aussi sur d’autres lieux d’essais nucléaires. « Parmi les documents étudiés, il y en a quelques-uns qui sont issus des années folles où tout ce qui touchait au nucléaire était entièrement contrôlé par l’armée », a regretté le député Moetai Brotherson, cadre du parti indépendantiste polynésien.

L’historien Jean-Marc Regnault regrette « des régressions sur l’ouverture des archives militaires » qui nourrissent les « doutes » des militants sur la sincérité de l’étude. « Compte tenu de tous les mensonges qu’il y a eu, on peut se demander si ces conclusions ne sont pas un nouveau mensonge, même si ce sont des scientifiques de l’Inserm et non l’État ».

Par Le Parisien avec AFP,  publié le 24 février 2021 à 07h48

Photo en titre : Explosion nucléaire dans l’atoll de Mururoa, en Polynésie, en 1971. AFP

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