Alors que l’Ukraine héberge le sarcophage de la centrale de Tchernobyl et la plus grande centrale nucléaire d’Europe, la guerre montre une nouvelle fois combien les centrales nucléaires sont vulnérables et représentent un risque majeur en cas de conflit.
Centrale nucléaire de Tchernobyl : « c’est comme la braise dans un barbecue«
Souvenons-nous : le 26 avril 1986, le réacteur n° 4 de la centrale nucléaire de Tchernobyl (Ukraine) connaissait des explosions et un incendie, suite à un défaut de conception. Résultat : des matières radioactives se dispersaient dans l’atmosphère, principalement au-dessus de l’Europe.
Depuis cet accident nucléaire majeur qui a fait officiellement 25 000 morts, les restes radioactifs du réacteur n° 4 de la centrale ont été confinés grâce à l’un des projets d’ingénierie les plus ambitieux au monde : une immense arche de confinement recouvre à présent l’ancienne structure qui avait été rapidement assemblée juste après l’accident de 1986 dans des conditions extrêmement difficiles.
Si ce sarcophage est rassurant, il n’écarte pas tout risque : « c’est comme la braise dans un barbecue » précise Neil Hyatt, chimiste des matières nucléaires à l’Université de Sheffield alors qu’un « signal de fission atomique auto-entretenue critique, en provenance d’une pièce inaccessible de la centrale nucléaire en ruine de Tchernobyl » était détecté en mai 2021, notait Jean Revest de la Coordination antinucléaire.
La guerre en Ukraine fait courir le risque d’un nouvel accident nucléaire majeur
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Les centrales nucléaires ukrainiennes, au cœur de l’opération spéciale russe sont devenues des armes par destination, ainsi que des enjeux de propagande et de terreur. Les autorités ukrainiennes accusent les russes de vouloir engendrer un accident nucléaire en Europe pour obtenir l’intervention militaire des USA et de l’UE.
24 février 2022
La centrale nucléaire de Tchernobyl est capturée et sécurisée par les Russes qui travaillent de concert avec les équipes ukrainiennes de maintenance de la centrale pour assurer sa sécurité.
3 mars 2022
Zaporizhzhya, la plus grande centrale nucléaire d’Europe (6 réacteurs de 950 MWe) a été capturée et sécurisée par la Russie. Les Ukrainiens et la propagande occidentale ont fait croire que les Russes avaient délibérément bombardé la centrale nucléaire alors qu’il s’agissait d’une fusée éclairante tirée par la garde nationale ukrainienne.
09 mars 2022
Le ministère de la Défense de la Fédération de Russie signale une attaque des forces armées ukrainiennes contre l’infrastructure énergétique de la centrale nucléaire de Tchernobyl. « Je dois constater avec un grand regret que les nationalistes ukrainiens se sont livrés à une autre provocation, une provocation extrêmement dangereuse. Ils ont frappé la sous-station et les lignes électriques alimentant la centrale nucléaire de Tchernobyl. Les spécialistes russes ont pris des mesures rapides pour passer à des sources d’énergie de secours à base de générateurs diesel. La partie ukrainienne évite par tous les moyens d’organiser des travaux de réparation et de restauration. À notre avis, cela confirme une fois de plus la nature absolument délibérée et provocatrice des actions des nationalistes », a déclaré le premier vice-ministre russe de la défense, Nikolaï Pankov.
Le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmitry Kuleba, a annoncé que dans les prochaines 48 heures, le système de refroidissement pour le stockage du combustible nucléaire usé serait arrêté en raison de la panne du réseau électrique de la centrale nucléaire de Tchernobyl. En effet, les groupes électrogènes ont une autonomie de seulement 48 heures.
10 mars 2022
La situation dans la zone de la centrale nucléaire de Tchernobyl reste stable et aucun rayonnement radioactif anormal n’est détecté.
11 mars 2022
L’installation nucléaire sous-critique « Neutron Source » de l’Institut de Physique et de Technologie de Kharkiv a été bombardée. Cependant, l’agence de régulation nucléaire ukrainienne (SNRIU) ne fait état d’« Aucun dommage susceptible d’affecter l’état de la sécurité nucléaire et radiologique ».
14 mars 2022
D’après le gestionnaire du réseau électrique ukrainien, NEC Ukrenergo, la ligne électrique haute tension qui alimente les installations nucléaires de Tchernobyl (et la ville de Slavoutich) a une nouvelle fois été endommagée (elle avait été remise sous tension le 13 mars 2022). Si tel est le cas, les installations nucléaires dépendent à nouveau entièrement des équipements de secours (générateurs électriques diesel).
18 mars 2022
L’ancien centre de stockage d’armes nucléaires soviétique, située à l’ouest de Delyatyn, au sud d’Ivano-Frankovsk, a été frappé par un missile hypersonique russe Kinjal. A priori, l’infrastructure, enfouie sous terre à plusieurs dizaines de mètres de profondeur ne peut avoir été détruite mais seulement son accès. Cependant, le commandement ukrainien affirme que le dépôt de munitions a explosé, ce que réfutent les Russes…
22 mars 2022
Selon l’agence d’État ukrainienne pour la gestion de la zone d’exclusion de Tchernobyl (DAZV), « les occupants russes ont pillé et détruit le tout nouveau laboratoire central d’analyse de Tchernobyl », qui contenait des échantillons hautement actifs.
23 mars 2022
La situation du site de Tchernobyl reste préoccupante à cause de la précarité de l’alimentation électrique (une seule ligne continue d’alimenter l’ensemble des installations).
27 mars 2022
La vice-première ministre ukrainienne Iryna Vereshchuk à demandé au Conseil de sécurité de l’ONU de prendre des mesures immédiates pour démilitariser la zone d’exclusion de Tchernobyl et établir une mission spéciale de l’ONU pour écarter le risque d’un accident nucléaire soit disant à cause de la présence des forces russes et de leurs munitions sur place.
29 mars 2022
Sur les 15 réacteurs opérationnels de l’Ukraine regroupés sur 4 sites, 8 continuent de fonctionner, dont 2 à la centrale nucléaire de Zaporizhzhya sous contrôle russe, 3 à Rivne, 1 à Khmelnytskyy et 2 dans le sud de l’Ukraine. Les autres réacteurs sont arrêtés pour entretien régulier (SNRIU / AIEA).
L’Ukraine et ses partenaires souhaitent expulser la Russie – géant du nucléaire – de l’Agence Internationale de L’Énergie Atomique (AIEA). Cette déclaration a été faite par la conseillère du ministre de l’Énergie de l’Ukraine, Olena Zerkal, qui assure qu’il s’agit de « la politique de terrorisme nucléaire menée par les Russes, en s’emparant des centrales nucléaires ukrainiennes« .
2 avril 2022
Le Directeur de l’AIEA a déclaré que les forces russes ont assuré avoir quitté le site de la centrale nucléaire de Tchernobyl.
3 avril 2022
Selon l’armée russe, l’Ukraine travaillait à la confection d’une « bombe nucléaire sale » notamment sur le site de la centrale nucléaire de Tchernobyl où des serveurs, des supports de stockage d’informations ont disparu des laboratoires juste avant l’arrivée des soldats russes.
4 avril 2022
Les médias ukrainiens affirment – sans aucune preuve – que des militaires russes meurent des radiations après leur retour de Tchernobyl. Une assertion que l’AIEA indique ne pas pouvoir vérifier.
6 avril 2022
Des tranchées et des fortifications militaires ont été découvertes à seulement 4,5 kilomètres de la centrale nucléaire de Tchernobyl (Avia.pro).
22 avril 2022
L’approvisionnement en électricité de la centrale nucléaire de Tchernobyl depuis la Biélorussie a été suspendu (la Biélorussie fourni gratuitement de l’électricité à la centrale nucléaire vu le risque encouru) à cause des tirs répétés des forces armées ukrainiennes sur une sous-station et une ligne électrique alimentant la centrale nucléaire.
25 mai 2022
Environ 30 tonnes de plutonium et 40 tonnes d’uranium enrichis sont stockés sur le site de la centrale nucléaire de Zaporizhzhya selon le journaliste Lawrence Norman du Wall Street Journal dont les propos ont été repris par Raphael Grossi, directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique.
Ces stocks sont beaucoup trop importants pour un usage purement civil et étaient probablement destinés à la fabrication d’une arme nucléaire contre la Russie.
Energoatom, l’ancien exploitant ukrainien de la centrale nucléaire passée sous contrôle russe a qualifié les propos du directeur de l’AIEA de « non-sens« .
06 juin 2022
Zaporizhzhya, la plus grande centrale nucléaire d’Europe, qui représente la moitié de la capacité de production nucléaire d’Ukraine, fonctionne maintenant normalement.
23 juin 2022
À la demande de médias occidentaux et sur ordre du directeur de la centrale nucléaire de Zaporizhzhia, Tuz Andrei Mikhailovich, chef adjoint du département des relations publiques et des médias de la même centrale, a avoué qu’il avait fait de fausses déclarations sur le bombardement de la centrale nucléaire par des militaires russes.
25 juin 2022
L’Autorité de Sûreté Nucléaire Ukrainienne (SNRIU) a indiqué que l’installation nucléaire « NSI source de neutrons » située à Kharkiv a été touchée à nouveau par des bombardements. Les dégâts concernent des éléments du bâtiment, des systèmes de ventilation et de refroidissement ainsi que les générateurs de secours.
Cette installation ne présente pas le même potentiel de dangerosité qu’une centrale nucléaire, mais la CRIIRAD rappelle qu’elle contient des matériaux radioactifs. Il s’agirait de 37 assemblages de combustible nucléaire (uranium faiblement enrichi).
Aucune anomalie n’est pour l’instant détectée.
26 juin 2022
Un missile russe a survolé à basse altitude la centrale nucléaire de Zaporizhzhya, un risque significatif en cas de défaillance du missile.
5 juillet 2022
Les autorités russes de la région de Zaporizhzhya ont souligné qu’elles étaient prêtes à autoriser les experts de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) à visiter la centrale nucléaire centrale nucléaire de Zaporizhzhya alors que l’AIEA avait indiqué que le transfert de données depuis la centrale nucléaire de Zaporizhzhya avait été rétabli.
7 juillet 2022
Les autorités ukrainiennes accusent les forces russes d’intimidation et d’acte de torture sur l’équipe (ukrainienne) en charge de l’exploitation de la centrale nucléaire de Zaporizhzhya, au motif que qu’ils cacheraient des armes dans les bassins de refroidissement du combustible nucléaire. L’armée russe ferait donc vider ces bassins, faisant courir un risque d’accident nucléaire. Il s’agit en fait d’une maintenance : les bassins de refroidissement seront vidés pour être nettoyés un à un, sans que cela ne menace pas la sécurité de l’installation nucléaire a déclaré Alexei Selivanov, chef adjoint du département des affaires intérieures de la région de Zaporizhzhia.
Pourquoi les forces ukrainiennes sabotent-elles les installations sensibles ?
Les forces ukrainiennes sont en situation de repli quasi généralisé face à l’armée russe. Pour tenter de conserver certaines villes, certains bataillons ukrainiens néonazis n’hésitent pas à s’installer dans les lieux de vie et à empêcher les évacuations des civils, freinant ainsi les opérations militaires russes qui cherchent à tout prix à éviter les pertes civiles et au pire à accuser les russes s’il y a bavure (cf. blog Donbass).
Autre méthode pour tenter d’indigner la communauté internationale et ainsi d’obtenir l’aide militaire tant attendue : les forces ukrainiennes sabotent des installations sensibles en accusant les Russes. Or les Russes n’ont aucun intérêt à sinistrer des régions riveraines entières qu’ils souhaitent pacifier puis amies (cf. Discours de Lavrov du 10/03/2022).
Le 24 février 2022, un soldat russe (à gauche) discute avec un membre ukrainien du service de maintenance de la centrale de Tchernobyl. Auteur : Capture écran vidéo chaine russe – Licence : DR
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Le nouveau sarcophage de Tchernobyl ne pourrait résister à une nouvelle réaction nucléaire : si le système de refroidissement de l’installation de stockage de combustible nucléaire usé cesse vraiment de fonctionner, cela entraînera des conséquences catastrophiques pour toute la région, y compris l’Ukraine, la Biélorussie et la Russie.
« Le maintien du refroidissement des combustibles irradiés (qui sont des déchets radioactifs très hautement radioactifs et exothermiques) est crucial. Il faut évacuer en continu la chaleur qu’ils produisent de façon à prévenir l’altération des gaines métalliques qui entourent le combustible nucléaire (déformations, ruptures, développement de réactions chimiques à risque, susceptibles de générer de l’hydrogène, potentiellement explosif) et à empêcher des rejets, éventuellement massifs, de radioactivité« , précise l’association CRIIRAD.
Toutefois, dans son point d’information, l’Agence Internationale de l’Énergie Nucléaire (AIEA) considère que le volume d’eau de refroidissement de la piscine est suffisant pour assurer une évacuation efficace de la chaleur sans nécessiter d’alimentation électrique.
« Néanmoins, le manque d’électricité est susceptible d’entraîner une nouvelle détérioration de la radioprotection opérationnelle sur le site et de créer un stress supplémentaire pour environ 210 experts techniques et gardiens qui n’ont pas pu effectuer de rotation au cours des deux dernières semaines« , précise le directeur général de l’AIEA qui ajoute : « de jour en jour, nous assistons à une aggravation de la situation à la centrale nucléaire de Tchernobyl, en particulier pour la sûreté radiologique, et pour le personnel qui gère l’installation dans des circonstances extrêmement difficiles« .
L’énergie nucléaire : une énergie bien trop risquée dans un monde instable
En ce qui concerne l’état des autres centrales nucléaires opérationnelles de l’Ukraine, le régulateur a déclaré que huit des 15 réacteurs du pays étaient toujours en activité, dont deux à la centrale nucléaire de Zaporizhzhya. Les niveaux de rayonnement sur les sites restent normaux.
Preuve que le sujet inquiète, le gouvernement norvégien a commencé à distribuer des comprimés d’iode aux jardins d’enfants et aux écoles pour protéger les enfants en cas d’accident nucléaire en Europe de l’Est…
« Alors que le nucléaire est constamment imposé, comme le rappelle la commission nationale du débat public, il fait peser un risque systémique supplémentaire pour les décennies à venir dans ce monde de plus en plus instable. Un risque que des sociétés déjà affaiblies par la succession de crises – sanitaires, climatiques, géopolitiques – auront de plus en plus de difficultés à prévenir et à gérer. La France est en première ligne au vu du grand nombre d’installations nucléaires sur son territoire. » souligne France Nature Environnement.
Le grand nombre d’installations nucléaires réparties sur tout le territoire métropolitain rend la France particulièrement vulnérable à la moindre menace d’ordre terroriste ou militaire. La sécurité des centrales française est défaillante comme le montrent régulièrement les équipes de Greenpeace qui parviennent à s’y infiltrer. Enfin, les vagues de chaleur et la vétusté de nos installations font que jusqu’à la moitié du parc nucléaire français est inopérant.
Ce nouveau risque majeur d’accident nucléaire montre combien l’énergie nucléaire actuelle représente un risque bien trop élevé, un pari risqué sur un avenir de plus en plus sombre.
Article mis à jour le 11 juillet 2022 à 15h22
Photo en titre : L’arche de Tchernobyl, en 2017.
https://www.notre-planete.info/actualites/4912-guerre-Ukraine-risque-accident-nucleaire-Tchernobyl-Zaporizhzhya
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