Guerre entre l’Ukraine et la Russie ; dossier
La Russie a envoyé une énième salve de missiles sur plusieurs villes ukrainiennes ce jeudi au petit matin, faisant plusieurs morts et blessés. Le courant, coupé depuis le début de journée, est revenu sur le site nucléaire qui a eu recours à des générateurs diesel de secours.
Pendant que des combats acharnés se poursuivent à Bakhmout, ville-clé de l’est de l’Ukraine, une nouvelle vague de frappes massives russes s’est abattue à travers le pays ce jeudi matin. Au moins six personnes sont mortes. La centrale nucléaire de Zaporijia, occupée par l’armée russe dans le sud de l’Ukraine, a été temporairement coupée du réseau électrique ukrainien, selon l’opérateur nucléaire ukrainien. «Les spécialistes d’Ukrenergo ont rétabli l’alimentation électrique à la centrale nucléaire de Zaporijjia, interrompue par les frappes de missiles d’aujourd’hui», a indiqué Ukrenergo, la société de transport de l’électricité ukrainienne dans un communiqué publié ce jeudi après-midi. «La dernière ligne de communication entre la centrale nucléaire occupée de Zaporijjia et le réseau électrique ukrainien a été coupée à cause d’attaques de roquettes» russes, expliquait plus tôt Energatom, la Compagnie nationale de production d’énergie nucléaire.
«La centrale […] est passée en mode ‘‘black-out’’ pour la sixième fois depuis l’occupation, les réacteurs des unités 5 et 6 ont été mis [à l’arrêt] à froid», a détaillé Energatom. L’opérateur précise que 18 générateurs diesel de secours ont été enclenchés pour assurer l’alimentation minimale de la centrale. «Ils ont assez de carburant pour dix jours. Le compte à rebours a commencé», s’inquiétait Energatom avant que le courant ne revienne. L’organisme avait mis en garde sur un risque d’accident, si la situation ne se rétablissait pas. «S’il n’est pas possible de renouveler l’alimentation électrique extérieure de la centrale, un accident avec des conséquences radioactives pour le monde entier pourrait avoir lieu».
Enquête : Ukraine: «A la centrale nucléaire de Zaporijia, on se rapproche d’un scénario à la Fukushima»
L’armée russe a occupé dès le 4 mars 2022, neuf jours après le début de son invasion, cette immense complexe nucléaire du sud de l’Ukraine. La centrale, qui produisait auparavant 20 % de l’électricité ukrainienne, a continué à fonctionner les premiers mois de l’invasion, malgré des périodes de bombardements, avant d’être mise à l’arrêt en septembre. Depuis, aucun de ses six réacteurs VVER-1000 datant de l’époque soviétique ne génère de courant, mais l’installation reste connectée au système énergétique ukrainien et consomme de l’électricité produite par celui-ci pour ses propres besoins.
Précédemment, l’opérateur nucléaire ukrainien avait prévenu que la mise à arrêt de la centrale entraînait «une dégradation graduelle de tous ses systèmes et de son équipement». Energatom s’était également inquiété d’un «risque d’incident nucléaire» en cas de rupture de la dernière ligne électrique reliant la centrale au système énergétique ukrainien.
Au moins cinq morts à Lviv
Plus largement, les frappes russes ont encore une fois ciblé de nombreuses régions du pays, y compris celles les plus éloignées du front de l’est, comme à Odessa ou à Lviv. Dans cette dernière, à proximité de la frontière avec la Pologne, au moins cinq personnes sont mortes à cause des explosions, dénombre ce jeudi matin le gouvernement. Un missile russe est tombé sur un quartier résidentiel dans le district de Zolotchiv, détruisant trois maisons, a précisé le gouverneur, Maksym Kozytsky, sur Telegram. «Les débris sont en train d’être déblayés, d’autres personnes peuvent être en-dessous», a-t-il ajouté.
Le maire de Kyiv, Vitali Klitschko, signale également plusieurs explosions dans la capitale ukrainienne, où au moins deux personnes ont été blessées. «District de Sviatochyne. Les secours vont sur place. Des voitures sont en feu dans la cour d’un immeuble résidentiel», a écrit Vitali Klitschko, sur Telegram, précisant que deux personnes de ce quartier avaient été blessées et hospitalisées. De plus, 40 % des résidents de Kyiv sont privés de chauffage, les frappes ayant touché des infrastructures énergétiques, selon l’administration militaire. La ville de Kharkiv, elle, est privée d’électricité, d’eau et de chauffage.
Le président Zelensky a dénoncé les «misérables tactiques» russes après des bombardements qui ont touché dix régions du pays, dont la capitale Kiev, et visé des infrastructures énergétiques. La défense antiaérienne ukrainienne a abattu 34 missiles sur 81 et quatre drones lancés par la Russie. Depuis le mois d’octobre, après plusieurs revers militaires, la Moscou bombarde régulièrement de missiles et de drones des installations énergétiques-clés d’Ukraine pour plonger des millions de personnes dans le noir et le froid.
Bataille pour Bakhmout
Ces frappes de grande envergure interviennent au lendemain de l’annonce par le patron de l’organisation paramilitaire russe Wagner, Evguéni Prigojine, de la prise de la partie orientale de Bakhmout, petite ville de l’est de l’Ukraine au cœur des combats depuis des mois, malgré une valeur stratégique contestée. Il a par ailleurs affirmé que ses combattants avaient conquis le tout petit village de Doubovo-Vassylivka, au nord de Bakhmout.
La cité pourrait tomber «dans les prochains jours», a averti le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg, ajoutant cependant que «cela ne reflète pas nécessairement un quelconque tournant dans la guerre». Mais l’Ukraine s’accroche à cette bataille même si elle admet que la situation est «extrêmement tendue». Des responsables ukrainiens, y compris le président Volodymyr Zelensky lui-même, ont jugé au contraire que la chute de la ville pourrait ouvrir la voie à une progression russe dans l’Est, et ont dépêché des renforts.
Les frappes de jeudi suivent aussi une rencontre mercredi des 27 ministres de la Défense de l’UE à Stockholm, avec leur homologue ukrainien Oleksiï Reznikov, pour négocier un plan de livraisons d’obus et de munitions à Kiev, qui pourrait être porté à deux milliards d’euros.
Mise à jour : à 10 h 20, avec davantage de précisions sur la situation et à 15 heures avec le rétablissement du courant.
Écoutez le 2e épisode du journal de guerre d’un soldat ukrainien : «J’en ai tellement marre de toute cette merde»
Timur Dzhafarov, jeune musicien ukrainien engagé dès le lendemain de l’invasion russe en Ukraine, a accepté que «Libération» retranscrive son journal de bord. Ce deuxième épisode couvre la période du 26 mars au 17 avril 2022.
Lire aussi: Ukraine : tapis de bombes russes d’est en ouest, Bakhmout résiste toujours
Par LIBÉRATION et AFP, publié le 09 mars 2023 à 7h22, mis à jour le 09 mars 2023 à 10h21)
Photo en titre : Des secouristes inspectaient un immeuble endommagé à Zaporijia, le 3 mars dernier. (Andriy Andriyenko/AP)
https://www.liberation.fr/international/europe/lukraine-subit-de-nouvelles-frappes-massives-russes-la-centrale-nucleaire-de-zaporijia-sans-electricite-20230309_S2T3VFB3FJARPLI7D2BGNTPYZ4/
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