SAUMUROIS. NUCLÉAIRE : LES ÉCOLOGISTES CONTRE LA CONSTRUCTION DE NOUVEAUX RÉACTEURS À AVOINE

Un collectif de Saumurois et des élus écologistes de la région s’opposent à l’installation de réacteurs nucléaires nouvelle génération (EPR2) à la centrale d’Avoine et s’interrogent quant au soutien apporté par la ville de Saumur et à l’agglomération Saumur Val de Loire à ce projet.

Nous vous en avions déjà parlé dans un précédent article, en mai dernier l’agglomération Saumur Val de Loire, puis quelques jours tard la ville de Saumur, ont fait passer une délibération dans leurs conseils respectifs afin d’appuyer et de soutenir la construction de réacteurs nucléaires de nouvelle génération au sein de la centrale d’Avoine. Le président-maire Jackie Goulet avait notamment mis en avant les vertus environnementales : « Nous souhaitons soutenir ce projet puisque cela correspond à notre volonté politique de développer les énergies renouvelables sur le territoire et s’inscrit totalement dans notre plan Climat Air Énergie : Développement des centrales photovoltaïques, ombrières sur les parkings… ». Mais également la source d’emplois que représente le site d’EDF : « La centrale existant actuellement sur Avoine touche plus de 600 emplois de façon directe ou indirecte sur les territoires de l’Ouest du Maine et Loire. Sur le territoire de l’Agglomération, l’impact économique et social de la centrale nucléaire d’Avoine est majeur puisqu’il est évalué à 550 emplois et qu’il permet l’existence d’un nombre important d’entreprises de sous-traitance, mais aussi d’offres de formations pour nos jeunes dans nos établissements. 550 emplois, c’est trois points de chômage ! ».  

Les écologistes contre le soutien saumurois aux EPR2

Ces soutiens avaient alors reçu quelques voix plus timides et hésitantes avec des abstentions au sein des deux conseils. Ils ont également fait réagir un collectif d’habitants du Saumurois, « Les bienveillant.e.s de Loire », qui a fait entendre son désaccord à ce projet par le biais d’un communiqué (relire ici). Ce lundi 19 juin, à l’initiative de ce collectif, du groupe Europe Écologie Les Verts et de Bernard Febvre, une conférence de presse était organisée à Saumur. Le collectif avait notamment convié la députée EELV NUPES de la 4ème circonscription de Loire-Atlantique, cheffe de file de groupe écologique sur le projet de loi d’accélération du nucléaire à l’Assemblée Nationale Julie Laernoes, Jacques Amédéo, docteur vétérinaire écologiste et ancien membre du groupement des scientifiques pour l’information sur l’énergie nucléaire et Michel Perrier, co-secrétaire d’EELV Pays de la Loire. Ils s’opposent pleinement à ce projet de développement du nucléaire français et s’interrogent quant aux positionnements de collectivités, à l’image de Saumur, en faveur et en soutien à l’installation de ces nouveaux EPR.

Des risques importants

Michel Perrier rappelle le contexte selon lui « compliqué et délicat » du nucléaire en France comme dans le monde. « En France, le nucléaire a été développé dans les années 70 à la suite du choc pétrolier. Le gouvernement avait alors pris des décisions sans vraiment de concertation et sans foncièrement se poser de question sur les conséquences sur le long terme. Nous nous sommes retrouvé quelques années plus tard avec un parc nucléaire particulièrement vieillissant et peu entretenu. Aujourd’hui, le gouvernement se lance dans une nouvelle politique de développement du nucléaire dans les mêmes conditions, sans anticiper, sans vouloir penser et imaginer des solutions alternatives, et sans se préoccuper des conséquences. » Ainsi, pour les écologistes qui prônent « un mix énergétique et plus particulièrement un retrait progressif du nucléaire vers les énergies renouvelables », selon la députée Julie Laernoes, cette ressource présente aujourd’hui de nombreux dangers. « Il y a dans un premier temps les risques directs liés à un accident nucléaire et cela est arrivé à plusieurs reprises dans l’histoire. On pense notamment à Tchernobyl ou à Fukushima. On construit et on envisage encore aujourd’hui des centrales sur des zones sismiques, dans des zones inondables ou encore sur des côtes qui, on le sait, seront totalement immergées dans plusieurs années en raison du réchauffement climatique », poursuit elle. Pour Jacques Amédéo, un autre grand danger est celui des déchets : « On a enfoui des déchets radioactifs dans le sol, y compris en Maine-et-Loire, il y a des années en se disant que la science trouverait une solution. Mais 50 ans plus tard, il n’y a toujours pas de solution viable et on ne sait toujours pas quoi faire de ces déchets même si certains sont retraités pour être réutilisés pour l’énergie ou l’armement. Toutefois, cela n’est faisable qu’une seule fois. Ces déchets peuvent avoir des conséquences directes sur la qualité de l’eau en polluant les nappes phréatiques et pour les déchets les plus chauds cela peut occasionner des incendies qui prennent sous terre, comme cela est le cas en Allemagne. »

Le nucléaire, pas si écologique que ça ?

L’autre grand questionnement des écologistes et du collectif Saumurois est l’eau. « Il est totalement faux de penser et de dire que l’énergie nucléaire est une réponse et une solution au réchauffement climatique, au-delà du simple fait que les nouveaux EPR ne seront techniquement pas prêts avant 15 ans si tout se passe bien et non dans 5 ans comme annoncé par le gouvernement », précise la députée. Par ailleurs, pour fonctionner, une centrale nucléaire a un besoin en eau assez important. « Le refroidissement des centrales représente le deuxième facteur de prélèvement en eau en France. Or, la question se pose de la capacité à refroidir et de la quantité d’eau nécessaire lorsque l’on voit que des secteurs comme celui de la Loire sont en restriction sur les périodes estivales, voire bien plus tôt dans l’année. Y aura-t-il suffisamment d’eau pour prélever en plus des installations potables et de l’eau nécessaire à l’agriculture ? Alors que l’on peut produire de l’électricité autrement ! Quid des dérogations accordées pour rejeter des eaux plus chaudes dans les cours d’eau durant l’été et l’impact que cela a sur la biodiversité qui connaît pourtant une crise majeure ! Enfin, qu’en est-il des rejets de produits chimiques et autres substances dans les eaux qui sont d’autant plus concentrés lorsque les niveaux sont bas », exposent les trois intervenants. Selon eux, il faut que « la vérité soit montrée à la population avec des faits scientifiques avérés », face à un secteur, celui du nucléaire, qui est « particulièrement opaque ». Enfin, l’élue écologiste estime que « les collectivités qui appellent ou font le vœu que se développent de nouveaux EPR n’ont pas compris ce qu’est la transition écologique. Ce sont des appels pour plaire à certains autres politiques ou à des électeurs, des déclarations pour masquer l’absence de bilan écologique. »

La politique solaire de l’agglo en ligne de mire

Le collectif Saumurois déplore quant à lui la politique énergétique développée par l’agglomération Saumuroise. « L’agglomération indique dans cette délibération que le nucléaire vient en complément des installations photovoltaïques développées sur le territoire pour la transition énergétique. Or certains de ces projets sont justement questionnables. Nous pensons par exemple au projet photovoltaïque de Parnay en lieu et place d’une terre agricole exploitée et non en friche comme cela a pu être annoncé. Mais encore au projet de Louerre où il est envisagé de raser des espaces boisés pour construire un parc ! Ce ne sont là que des projets avec des visées pécuniaires émanant de gros développeurs. » Le collectif récemment créé envisage de suivre de près les différentes opérations menées sur le territoire et de s’y opposer lorsque cela le nécessitera. « On attend du courage de la part de nos élus locaux et de ne pas surfer sur la crise climatique. Il faut prendre conscience de la complexité du sujet et prendre des décisions éclairées. »

Publié le 19/06/2023

Photo en titre : De gauche à droite : Jacques Amédéo, Michel Perrier, Julie Laernoes et Brenard Fèbvre

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