NUCLÉAIRE. LES ESSAIS DE L’EPR DE FLAMANVILLE VONT DÉBUTER, LE DÉMARRAGE POUR L’ÉTÉ 2024 ?

La Commission locale d’information de Flamanville (Manche) a eu lieu ce 29 septembre 2023. Alors que les essais vont débuter, le démarrage de l’EPR doit avoir lieu pour l’été 2024.

Début de la construction en 2007, pour une mise en service cinq ans plus tard… Onze ans après cette date inscrite sur le calendrier initial, le démarrage de l’EPR de Flamanville (Manche) n’a toujours pas eu lieu.

Ce vendredi 29 septembre 2023, au pôle de proximité des Pieux, se sont réunis les membres de la CLI de Flamanville. Un point sur le chantier « confirme » un allumage pour 2024, sans que la date du couplage au réseau électrique ne puisse être révélée. 

« Il n’y aura pas de scoop. C’est extrêmement sensible avec encore quelques incertitudes. » Alain Morvan, Directeur du projet Flamanville 3.

Un calendrier avec de nombreuses variables d’ajustement a toutefois été présenté.

Dans les prochains jours, début de la phase des 140 essais

La remise en conformité des soudures du circuit secondaire principal étant aujourd’hui terminée – « un chantier hors norme impliquant 1 000 personnes sur 3 ans pour un total de 3 millions d’heures de travail », précise Alain Morvan, une nouvelle phase va ainsi pouvoir débuter dans les jours à venir, celle des essais.

Plus de 140 au total sur une durée de dix semaines, ces essais de requalification d’ensemble « sont attendus depuis longtemps », avec pour perspective le chargement du combustible pour le premier semestre 2024. Cette opération consiste à une mise en place de 241 assemblages de combustibles dans la cuve, après l’autorisation de sa mise en service délivrée, ou non, par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

La liste des principaux essais

– Le système d’injection de sécurité
– Les soupapes du pressuriseur
– Les groupes motopompes primaires à froid et à chaud
– Les soupapes vapeur
– La ventilation two-room
– La turbine à 1 500 tr/min
– Le système de décharge vapeur à l’atmosphère
– Le système d’alimentation de secours en eau des générateurs de vapeur
– Le basculement de sources électriques
– Le système volumétrique et chimique

25 % de puissance nucléaire

L’entité a d’ailleurs clos le 15 septembre la consultation du public sur la demande d’autorisation de mise en service du réacteur EPR. Elle précise qu’elle « prendra en compte des quelque 600 commentaires dans le cadre de la finalisation de l’instruction de la demande ».

Environ trois mois après le début du chargement, soit à l’orée de l’été 2024, le couplage de Fla 3, désigné ainsi dans le jargon de l’atome, avec le réseau électrique sera effectué pour atteindre 25 % de puissance nucléaire. Quatre mois après ce démarrage, si aucun retard supplémentaire n’intervient, ce moment signera l’atteinte de la pleine puissance.

« Ce réacteur, qui aurait dû être une tête de série premier de la classe, a fini dernier de la classe », ne manque pas de rappeler Guy Vastel, représentant de l’Association pour le contrôle de la radioactivité dans l’Ouest (Acro), en faisant référence au démarrage de l’EPR chinois Taïshan et finlandais Olkiluoto.

« Tous ces travaux coûtent de l’argent. » Guy Vastel, Représentant de l’Association pour le contrôle de la radioactivité dans l’Ouest (Acro).

À quoi lui a répondu Alain Morvan : « Ma priorité, c’est d’avoir une installation construite avec le niveau de qualité requis et la garantie que l’exploitation soit en toute sûreté. On ne peut que regretter l’historique ».

Un événement significatif de niveau 1

Courant septembre, un événement significatif de niveau 1 sur l’échelle Ines (l’échelle internationale des événements nucléaires), le premier de l’année 2023, est survenu sur le réacteur numéro 1 dans le cadre de son redémarrage. Il s’agit d’une détection tardive d’un non-respect des spécifications techniques d’exploitation sur l’unité de production, quelques jours après l’événement qui est survenu le 6 septembre.

Un essai périodique a permis de découvrir l’incident, concrètement une vanne restée en position fermée à la suite d’une intervention par des agents EDF, celle-ci devant permettre d’alimenter en vapeur deux turbopompes qui alimentent en eau des générateurs.

Lors de l’opération de redémarrage du réacteur numéro 1, le circuit primaire de refroidissement est passé au-dessus de la limite de 90 degrés. Le 9 septembre, durant une phase d’essai, les opérateurs ont constaté cette avarie. Après sa remise en conformité rapide, la vanne s’est ouverte correctement.

Cet incident est dû à un facteur humain. Dans la foulée et « pour comprendre ce qu’il s’est passé, les intervenants ont été interrogés », assure David Le Hir, le directeur du CNPE Flamanville 1 et 2. « On réfléchit aux pratiques de travail et à l’installation pour ne pas que ça se répète. »

D’un point de vue environnemental, une bonne nouvelle est à signaler. En septembre 2021, la quantité annuelle cumulée d’émissions de gaz SF6 avait atteint 100,37 kg, dépassant le seuil de déclaration de 100 kg. Depuis, la quantité de SF6, le plus puissant des gaz à effet de serre, rejetée par la centrale nucléaire de Flamanville a diminué « grâce à des travaux sur les postes générateurs d’où émanaient les pertes », assure Stéphanie Fournier, cheffe de mission prévention des risques et environnement chez EDF CNPE de Flamanville.

Une inspection en mai dernier de l’ASN

Pendant trois jours, une quinzaine d’inspecteurs de l’ASN et 11 experts de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) ont passé en revue l’EPR. Pour s’assurer de la bonne avancée du chantier, l’ASN a souhaité avoir une vision globale de l’installation, vérifier le pilotage du reste à faire avant le chargement, entre autres.

L’appréciation globale est plutôt bonne, malgré des transferts de matériels « encore incomplets » et une présence des métiers pour le « reste à faire terrain qui ne permet pas aux agents de travailler sur la documentation opérationnelle indispensable pour mener à bien les futures opérations d’exploitation », rapporte Jean-François Bardot, chef des pôles EPR et REP à la division de Caen (Calvados) de l’autorité de sûreté nucléaire (ASN).

EDF, trois mois pour apporter des éléments de réponse

Depuis fin juillet, l’exploitant EDF dispose d’un délai de trois mois pour apporter des éléments de réponse. Yannick Rousselet, chargé de campagne nucléaire auprès de Greenpeace France, s’est interrogé sur l’état général de l’EPR, notamment sur les essais de requalification qui vont démarrer dans les prochains jours et sur leur bon déroulement « malgré ces quelques doutes dont vous faites part ? ».

« Les préalables à l’engagement des essais sont identifiés et levés. Ils sont plutôt maîtrisés par l’exploitant. En effet, il y a certains points de fragilité. Mais les justifications données sont bonnes et ne remettent pas en cause les essais », lui a répondu Jean-François Barbot.

Pour l’année 2022, les émissions liées à l’activité de la centrale nucléaire représentent 4 534 tonnes d’équivalent CO2.

Par Sebastien Lucot, publié le 30 septembre 2023 à 19h13

Photo en titre : Le démarrage de l’EPR devrait avoir lieu trois mois après le chargement du combustible prévu au premier trimestre 2024. (©Jean-Paul BARBIER)

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