Jusqu’en 2006, la bataille a fait rage dans la communauté scientifique pour faire admettre la notion de “faibles doses“. Celle-ci fut soit rejetée par les partisans d’un seuil d’efficacité biologique, soit reliée aux effets des rayonnements ionisants en dessous de 500 mSv, ce qui retirait toute singularité puisque les effets tangibles sur la santé étaient identiques avec celles des fortes doses, la gravité en moins.
Dans un premier temps le seuil est redescendu à 100 mSv. Même si la majorité des experts avaient accepté une limite “admissible“ en radioprotection (soit 1 mSv pour la population) les nucléaristes restaient fermes sur ce qui leur paraissaient une évidence : pas de maladies radio induites en dessous du seuil fatidique de 100 mSv…
La bascule, du moins dans les esprits, s’est faite avec le rapport de l’UNSCEAR (agence de l’ONU pour la radioprotection) de 2006 (1) confirmé par celui de 2012 sur “ les mécanismes biologiques des effets des radiations aux faibles doses“ (2).
Ce rapport allait confirmer :
- La reconnaissance officielle d’une différence majeure entre fortes et faibles doses, avec un lien sur les effets non ciblés.
- L’existence d’une nouvelle radiobiologie radicalement différente de l’ancienne
- L’acceptation (prudente) d’un début de modèle biologique pour expliquer les lésions non ciblées. (3)
- La reconnaissance d’un support biologique aux groupes humains à risque : l’épi génétique, c’est à dire l’ensemble des événements environnementaux susceptibles de modifier le génome.
Cela n’a pas suffit pour faire changer d’avis les tenants de la limite à 100 mSv, mais une brèche s’est ouverte au sein du groupe des experts en radioprotection : un certain nombre ont accepté l’idée de la réalité du modèle linéaire sans seuil, non plus comme précaution administrative, mais comme une réalité.
Cela rétablissait la cohérence avec les dernières études épidémiologiques (4) avec des valeurs de doses cumulées très inférieures au 100 mSv.
Par exemple, l’étude portant sur les travailleurs de 3 pays (USA, GB et France) appelée INWORKS. On a étudié une population de 8,22 millions de “sujet/année“ correspondant à 308 297 travailleurs. La dose cumulée moyenne est de 16 mGy, avec une dose moyenne annuelle de 1,1 mGy. Même si on traduit un milli Gray (mGy) par un milli Sievert (mSv) on est loin des 100 mSv exigés pour avoir un effet !…
Quelles sont nos tâches pour nous AMFPGN ?
Avec l’IPPNW, et en tant que praticiens de la santé, nous avons comme matière principale les conséquences humanitaires de la menace nucléaire et donc en priorité les conséquences sur la santé publique. Se battre dans toutes les instances scientifiques pour faire admettre la pertinence du système biologique, cohérente avec notre expérience médicale, reste crucial. Nous l’avons fait dans le passé pour la reconnaissance des effets sur la santé publique des faibles doses, nous devons le faire contre ce nouveau révisionnisme avec cette conception de ce qui est “négligeable“.
Mais pour nous en France il y a une urgence spécifique, celle des vétérans des essais nucléaires régulièrement grugés par cette mécanique du 1%, dénoncée partout, y compris dans la commission des droits de l’Homme de l’ONU (voir l’éditorial de Françoise Ducloux dans le dernier numéro de MGN). Il s’agit d’une bataille politique au bon sens du terme qu’il faut mener avec les parlementaires favorables à la loi sur l’indemnisation et avec les ministres, comme celle de la santé, qui ont soutenu le bon droit des vétérans porté en particulier par l’AVEN.
L’AMFPGN ne se dérobera pas à cette exigence majeure.
Par le Dr. ABRAHAM BEHAR, Président de l’AMFPGN, ex président de l’IPPNW
Pour mieux comprendre, lire l’article complet sur :
http://www.vivre-apres-fukushima.fr/les-maladies-radio-induites-negligeables-un-nouveau-paradigme/
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