Une consultation publique était ouverte jusqu’à mardi 12 septembre 2017 sur le projet d’avis de l’ASN (Autorité de Sûreté Nucléaire) relatif à l’anomalie de la composition de l’acier du fond et du couvercle de la cuve du réacteur EPR de la centrale nucléaire de Flamanville. Ma contribution, communiquée à l’ASN en tant que juriste et citoyen, est la suivante :
L’ASN constate que l’anomalie dans la composition chimique de l’acier conduit à une diminution des marges de sécurité. Sa position invitant à des contrôles périodiques supplémentaires, réalisables sur le fond de la cuve, semble justifiée. De même pour le changement de couvercle à échéance brève. Cependant, quid du cylindre lui-même et de ses liaisons avec le fond de cuve et avec le couvercle ?
Le principe de précaution, formulé à l’article 5 de la Charte de l’environnement, a valeur constitutionnelle. Cette loi fondamentale pose l’exigence de « mesures proportionnées ». L’avis de l’ASN n’exige pas des mesures proportionnées à l’extrême importance du risque. Ce qui serait proportionné au risque de destruction définitive d’une région entière, ce serait le remplacement de cette cuve par une cuve conforme, quel qu’en soit le coût économique. Le coût environnemental et humain, qui serait celui de l’accident grave, impose de dire la vérité : on est en train de prendre et de laisser se développer un risque majeur.
Ce risque étant clairement identifié, l’article 3 de la Charte de l’environnement formule une obligation de prévenir les atteintes environnementales qui existeraient dramatiquement en cas de concrétisation du risque. De ce principe de prévention du risque identifié, on ne peut que déduire, là aussi, la nécessité pour l’ASN d’exiger le remplacement de cette cuve par une cuve conforme, quel qu’en soit le coût économique. À défaut, seul l’abandon du projet répondrait à nos exigences constitutionnelles. En visant l’article L557-4 du code de l’environnement, l’ASN ose le suggérer. En effet, ce texte précise que les équipements (tel cet EPR) ne peuvent être mis en service que s’ils sont « conformes à des exigences essentielles de sécurité relatives à leurs performance, conception, composition, fabrication et fonctionnement » … Il serait utile, dans cet avis, que l’ASN vise aussi, et avant tout, les deux textes précités à valeur juridique supérieure, pour oser en déduire la nécessité absolue de remplacer la cuve.
En cas de rupture franche de la cuve en fonctionnement, timidité rimerait avec culpabilité.
https://blogs.mediapart.fr/marcel-bayle/blog/120917/avis-de-l-autorite-de-surete-nucleaire-sur-lepr-de-la-timidite-la-culpabilite
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