NUCLÉAIRE IRANIEN: TÉHÉRAN SERAIT PRÊT À LA DISCUSSION POUR PROUVER SA BONNE FOI

IranDevant la menace américaine d’une suspension de l’accord de 2015, l’Iran serait prêt à discuter de son arsenal balistique.

Donald Trump a toujours dénoncé, depuis le lancement de sa campagne électorale en 2016, l’accord signé en 2015 avec Téhéran sur le nucléaire iranien. Alors que les autorités iraniennes ont fait savoir qu’elles comptaient poursuivre leur programme balistique, assurant qu’il s’agit d’un programme défensif, Washington considère que ledit programme de missiles est contraire à l’accord de 2015. Le président américain menace même de refuser de certifier devant le Congrès que Téhéran applique bel et bien l’accord de 2015.

Dans un contexte de tensions grandissantes avec les États-Unis, l’Iran envisagerait de faire un pas vers les États-Unis. Ainsi, selon plusieurs sources occidentales et iraniennes proches du dossier, Téhéran a suggéré aux signataires de l’accord de juillet 2015 sur son programme nucléaire qu’il était prêt à parler avec eux de son arsenal balistique. Le but de l’opération : dissiper les malentendus et les tensions que ce programme suscite. Cité par l’agence de presse Mehr, le ministère iranien des Affaires étrangères a réaffirmé vendredi soir que le programme balistique de la République islamique, à visée défensive, insistent les autorités, n’était pas négociable et a réfuté ces révélations.

« Dans toutes les rencontres diplomatiques bilatérales, l’Iran a souligné que son programme balistique défensif n’était pas négociable et qu’il n’était pas contradictoire avec la résolution 2231 du Conseil de sécurité de l’ONU », a déclaré Bahram Qasemi, le porte-parole du ministère. Pour Washington, la volonté iranienne d’étoffer son arsenal de missiles est contraire à l’esprit de l’accord de Vienne conclu en juillet 2015 entre l’Iran et les puissances du P5+1 (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’Onu, soit les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France, la Russie, la Chine, plus l’Allemagne).

Inquiétudes et assurances. Mais selon ces sources, la République islamique, face au risque d’une dénonciation américaine de l’accord de Vienne, aurait pris contact avec ses signataires pour évoquer avec eux « certaines dimensions » de son programme balistique. « Lors de leurs rencontres en marge de l’Assemblée générale de l’Onu, le mois dernier, l’Iran a dit (aux grandes puissances) qu’il était prêt à discuter de son programme de missiles pour dissiper les inquiétudes », a déclaré une source iranienne.

Mohammad Javad Zarif, chef de la diplomatie iranienne, et son homologue américain Rex Tillerson, se sont notamment vus pour la première fois à cette occasion. Selon un responsable iranien qui a requis l’anonymat lors de ses déclarations, les Américains ont expliqué, pendant cette rencontre, leurs « inquiétudes au sujet des capacités balistiques de l’Iran et Zarif a répondu qu’il était possible d’en discuter ».

Le ministre iranien des Affaires étrangères a également rencontré les chefs des diplomaties des cinq autres pays signataires du Plan d’action conjoint commun (JCPOA), le nom officiel de l’accord de Vienne de 2015. Des sources américaines et occidentales n’ont pas confirmé que la question avait été débattue lors de l’entretien Zarif-Tillerson mais deux membres de l’administration américaine ont rapporté que Téhéran avait fait savoir récemment par la presse et via des pays tiers comme le sultanat d’Oman que son offre tenait toujours.

Contacts activés.

Un ancien responsable du département américain d’État a indiqué que l’Iran avait fait de discrètes ouvertures vers Washington au cours des dernières semaines. « L’Iran a lancé des ballons d’essai suggérant qu’il était prêt à débattre de son programme de missile balistique et active des contacts, parmi les rescapés de l’administration Obama », a-t-il ainsi affirmé. Ces possibles ouvertures interviennent alors que Donald Trump s’apprêterait à annoncer son intention de ne pas certifier que l’Iran respecte l’accord de Vienne, a fait savoir jeudi un membre de son administration.

Un tel développement ouvrirait la voie à une dénonciation du JCPOA. Or l’Iran a prévenu qu’il ne l’appliquerait plus si les États-Unis décident de s’en retirer. « Mohammad Javad Zarif sait que si Trump persévère et ’décertifie’ l’Iran, l’Iran sera en position de supériorité et les États-Unis seront isolés parmi le P5+1 », note un responsable américain au fait des rapports avec Téhéran.

Selon un haut responsable iranien, s’exprimant lui aussi à la condition que son anonymat soit respecté, le président iranien Hassan Rohani, son ministre des Affaires étrangères et plusieurs commandants des Pasdaran, les gardiens de la Révolution, ont rencontré à plusieurs reprises l’ayatollah Ali Khamenei, le guide suprême de la Révolution qui a la haute main sur la politique iranienne. « Le Guide ne s’est pas montré optimiste lors de ces rencontres parce qu’il ne fait pas confiance aux Américains. D’autres ont soutenu que la tension croissante sur le programme balistique pourrait être réglée par des discussions », a-t-il dit.

L’objectif, poursuit-il, ne serait pas de mettre un terme ou de suspendre le programme de missiles mais de « négocier certaines de ses dimensions, comme une limitation de la production de certains types de missiles avec des portées spécifiques ». Interrogé sur ces éventuelles ouvertures des Iraniens, un diplomate français a répondu : « Nous parlons de tout avec eux, y compris du programme balistique. Notre objectif est que cela aboutisse à des actes concrets. Sur la question balistique, ils répètent que c’est totalement défensif et que cela n’a rien à voir avec le nucléaire. »

(Avec Reuters)

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