Plusieurs associations écologistes vont déposer aujourd’hui un recours contre la décision de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) d’autoriser la cuve du futur réacteur EPR, malgré ses anomalies.
Ce jeudi matin, Pierre-Franck Chevet, président de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), a rendez-vous au Sénat avec des parlementaires pour être entendu sur la sûreté des centrales. Au même moment, plusieurs associations écologistes déposeront un recours devant le Conseil d’État contre l’ASN. Plus précisément contre l’un des avis les plus controversés pris cette année par le gendarme du nucléaire : malgré des anomalies constatées dans la composition chimique de l’acier qui compose le couvercle du futur réacteur EPR de Flamanville (voir <http://www.leparisien.fr/environnement/energies/epr-de-flamanville-la-cuve-du-reacteur-nucleaire-est-bonne-pour-le-service-07-06-2017-7025607.php>), les experts de l’ASN ont jugé cette pièce majeure apte à être mise en service. Au moins jusqu’en 2024, où le couvercle devra néanmoins être changé.
Un feu vert jugé inacceptable par l’association Réseau sortir du nucléaire et Greenpeace qui se sont associés avec deux autres associations pour déposer ce recours. « L’ASN sait que la cuve, censée être d’une qualité à toute épreuve, n’a pas été conçue dans les règles de l’art et elle a pourtant donné son feu vert à sa mise en service, s’indigne la porte-parole de Sortir du nucléaire, Charlotte Mijeon. On se demande donc s’il n’y a pas eu des pressions sur l’ASN pour qu’ils adaptent leur avis à ce qu’attendaient les industriels, car une décision négative de la part de l’ASN aurait porté atteinte à toute la filière nucléaire française. »
Devant le Conseil d’État, l’avocat des associations demandera l’annulation de la décision prise par le gendarme du nucléaire : « L’avis de l’ASN ouvre la porte à l’utilisation dans les centrales nucléaires de pièces n’offrant pas un niveau de sûreté identique à ce que la réglementation prévoyait au départ », souligne Me Samuel Delalande.
Une réglementation dérogatoire qui tombe à pic
Très critiqué en juin dernier pour avoir donné son feu vert sous conditions à un couvercle qu’il juge lui-même défectueux, le patron des gendarmes du nucléaire répondait alors que « les marges de sûreté » sont « satisfaisantes ».
Interrogé mercredi, l’ASN met désormais en avant un article juridique qui permet d’autoriser la mise en service d’un équipement même s’il ne respecte pas l’ensemble des exigences prescrites. À la seule condition que le fabricant de la pièce (en l’occurrence Areva) fasse la démonstration que les « risques sont suffisamment prévenus ou limités ».
« Cette réglementation dérogatoire a été adoptée justement après que l’on eut constaté des malfaçons sur le couvercle du réacteur, dénonce Laura Monnier, chargée de campagne juridique à Greenpeace. Mais autoriser une cuve qui n’est pas aux normes est une décision très grave et cela montre que l’ASN ne joue plus son rôle de gardienne de la sûreté du nucléaire. » Désireux de montrer que l’ASN gardera bel et bien le dernier mot dans ce dossier ultrasensible, le directeur des équipements sous pression nucléaire de l’ASN, Simon Liu, explique qu’« Areva doit encore mener sur certaines parties de la cuve des épreuves hydrauliques avant de pouvoir déposer sa demande de mise en service. Et ce n’est qu’au regard du dossier complet que l’ASN donnera ou non son feu vert définitif ».
Par Frédéric Mouchon
http://www.leparisien.fr/societe/flamanville-la-cuve-du-reacteur-nucleaire-attaquee-par-les-ecologistes-30-11-2017-7423752.php
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