TRANSMISSION GÉNÉTIQUE DES MALADIES RADIO-INDUITES : LE DR FURITSU NE MÈNERA PAS L’ÉTUDE

Le docteur Katsumi Furitsu, spécialiste généticienne japonaise, renonce. Elle devait présenter, à la demande du gouvernement Fritch, un projet d’étude sur les maladies trans-générationnelles et les essais nucléaires, devant le comité d’éthique de la Polynésie française.

Il ne s’agit pas, de sa part, d’un refus définitif de coopérer avec le gouvernement polynésien, mais de l’expression d’une incompatibilité totale entre démarche scientifique et revendications militantes et politiques”, indiquait hier la Présidence du Pays.

On peut souligner aussi que tous les scientifiques, y compris bien sûr Furitsu, mettent en garde que la Science n’apportera pas de réponses certaines et définitives, ni dans un sens ni dans l’autre, d’autant que, sur le sujet des éventuelles conséquences transgénérationnelles, il faut commencer par des études épidémiologiques, forcément longues et devant porter sur des ensembles significatifs au plan statistique.”

Cette question avait été lancée en fanfare, le jour même de l’arrivée au fenua de la ministre des Outre-mer, Annick Girardin.

Aujourd’hui, il est évident qu’en France et en Polynésie française, les autorités politiques et sanitaires étatiques comme locales préfèrent nier ou minimiser systématiquement le risque nucléaire concernant la santé des enfants et des générations à venir”, déclarait, le 21 janvier, au journal Le Parisien, Christian Sueur, qui “voulait approfondir ses recherches sur les conséquences de l’exposition des grands-parents à la radioactivité sur les petits-enfants”.

Le pédopsychiatre estimait que la Délégation polynésienne pour le suivi des conséquences des essais nucléaires (DSCEN) avait entravé sa volonté d’approfondir ses travaux avec l’équipe japonaise du Dr Furitsu.

Le Pays s’était indigné que Christian Sueur, pédopsychiatre, puisse avancer des conclusions hâtives sur un sujet aussi sensible et anxiogène et surtout aussi complexe, n’ayant aucune compétence en génétique. La délégation avait alors précisé que c’était le docteur Furitsu elle-même qui avait stoppé toute collaboration avec le médecin car elle “n’était pas d’accord avec la méthode de travail que voulait imposer Christian Sueur”.

Climat de méfiance

Les associations comme Moruroa e tatou ou 193, suspicieuses à l’égard de tout discours officiel, avaient embrayé et considéré comme acquis le principe d’une transmission génétique des maladies radio-induites.

Le discours de l’armée sur “la bombe propre” a en effet laissé de profondes cicatrices. Édouard Fritch avait alors décidé de se donner les moyens d’obtenir des réponses sur cette question sensible, “plutôt que de choisir entre des propos sans fondements et l’inquiétude légitime des Polynésiens”.

Des travaux de recherche très compliqués sur les plans technique et scientifique, avait prévenu la généticienne nippone. Mais dont le Pays espérait qu’ils permettraient, à terme, de clarifier la réalité sanitaire post-CEP.

À ce jour, la transmission génétique de maladies radio-induites n’a été mise en évidence de manière scientifique ni au Japon (Hiroshima et Nagasaki), ni en Biélorussie (Tchernobyl).

Le 23 janvier, la déléguée Yolande Vernaudon avait déjà estimé indispensable de “poursuivre les investigations”. Mais ces recherches scientifiques ne seront pas menées par le Dr Furitsu, qui refuse ainsi de travailler dans un climat passionnel. Retour à la case départ, donc. Probablement le pire des scénarios.

Les associations estiment toutefois qu’un recensement systématique de toutes les maladies radio-induites à Tahiti comme dans les îles, puisque tout le fenua a subi des retombées radioactives, serait déjà une première étape nécessaire.

Damien Grivois

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