Le prix réglementé de l’électricité, qui doit augmenter de près de 6% au 1er juin, suit en réalité l’évolution des prix de l’électricité sur les marchés. Un mécanisme imposé pour favoriser la concurrence, même si elle se produit au détriment des consommateurs.
Alors que le prix de l’électricité doit augmenter le 1er juin de près de 6%, vous avez choisi de revenir aujourd’hui sur les raisons de cette flambée de l’électricité. Une hausse qui touchera les tarifs réglementés, les fameux tarifs bleus auxquels ont souscrit près de 75% des Français, mais aussi une grande partie des offres concurrentes, indexées sur ces tarifs : Engie, Total et Direct Énergie.
Pour un ménage qui se chauffe à l’électricité, cette hausse des tarifs devrait tout de même représenter un renchérissement de la facture énergétique d’environ 85 euros par an. Un changement qui est donc loin d’être indolore pour les Français.
Mais comme l’explique un article des Échos, « cette augmentation serait en bonne partie liée à la montée en puissance de la concurrence ». Un comble. Il faut dire que le tarif régulé a cette particularité qu’il ne vise pas à refléter les coûts du fournisseur historique, EDF, mais à permettre aux opérateurs alternatifs de le concurrencer. Pour le dire autrement, c’est encore une histoire de concurrence forcée qui a mal tourné.
Et pour bien le comprendre, il combien de revenir en arrière pour voir comment l’Union européenne s’est attachée à casser les monopoles en matière d’énergie. Il faut dire que Bruxelles a toujours eu du mal à saisir l’intérêt et la spécificité des services publics et ne supporte pas la place ultra dominante du géant français de l’énergie. Haro donc sur le service public, haro sur le monopole d’EDF et l’insupportable pouvoir que détient l’énergéticien.
Dès 1999, des fournisseurs concurrents sont autorisés à proposer des contrats aux entreprises. Et dès 2007, cette dérégulation s’élargit aux particuliers, qui peuvent désormais choisir un autre fournisseur qu’EDF. Dans le même temps, un marché de l’électricité est lancé au début des années 2000, avec la création d’une Bourse française, puis d’un marché européen.
Dès lors, deux systèmes coexistent : d’un côté, l’offre réglementée, héritée du monopole de service public et de l’autre, les offres dites de marchés, proposées par les fournisseurs privés. Mais rapidement, on se rend compte que la concurrence n’offre pas les résultats espérés : les Français restent attachés au service public et sont toujours 80% en 2010 à choisir le tarif réglementé.
La France vote alors la Loi sur la nouvelle organisation des marchés de l’électricité. « Puisque la concurrence “libre et non faussée” ne produit pas les résultats escomptés, le législateur entreprend de la fausser » nous explique l’article du Monde diplomatique. Est alors instauré un mécanisme qui oblige EDF à tenir à disposition de ses concurrents une partie de sa production nucléaire à prix coûtant.
Les sociétés privés peuvent alors acheter cette électricité mais n’en ont pas l’obligation : elles peuvent également recourir à la bourse si elles le souhaitent… et surtout si c’est moins cher pour elles. Mais la loi va plus loin : pour ne pas pénaliser les acteurs du privé et la sacro-sainte concurrence, les tarifs d’EDF devront suivre ceux du marché. En clair : si le prix de l’électricité augmente à la bourse, le service public sera sommé de s’aligner. Et tant pis si cette hausse pèse désormais sur les consommateurs.
C’est donc exactement ce qui se passe aujourd’hui : avec l’envolée du prix des matières premières et des quotas carbone, le prix du kilowatt lui aussi s’envole à la bourse européenne…Une « obsession pour la concurrence qui trouble jusqu’à l’Autorité de la concurrence qui pointe le paradoxe d’un système qui a réussi à garantir quoi qu’il arrive pour les clients les prix les plus chers du marché ».
Publié le 20/05/2019
https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouvelles-de-leco/les-nouvelles-de-leco-du-lundi-20-mai-2019
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