NUCLÉAIRE : D’après des relevés officiels, l’eau du robinet de 6,4 millions de personnes est contaminée par du tritium, un élément radioactif présent dans des quantités très faibles.
- Le tritium est le dérivé radioactif de l’hydrogène, principal composant de l’eau. Il se retrouve dans les rivières et les nappes phréatiques principales à cause de l’activité des centrales nucléaires.
- Si boire de l’eau contaminée au tritium n’est théoriquement pas dangereux, des associations contestent la pertinence des seuils de dangerosité officielle.
- La Criirad, par exemple, critique l’opacité des contrôles et pointe un risque à long terme auprès des populations exposées.
Du tritium, un élément radioactif, issu de l’industrie nucléaire, présent dans l’eau potable de plus de 6 millions de personnes ? L’information, révélée par l’Association pour le contrôle de la radioactivité dans l’Ouest (Acro), a de quoi, au minimum interroger. Selon l’association, 268 communes sont concernées, dont de « grandes agglomérations » comme Orléans, Blois, Tours, Angers, Nantes, et 122 communes d’Ile-de-France. Avant de se jeter sur les bouteilles d’eau minérale, 20 Minutes a tenté d’y voir plus clair.
C’est quoi, le tritium ?
Pour faire simple, il s’agit « de la forme radioactive de l’hydrogène », explique Corinne Castanier, de la Criirad (Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité). L’hydrogène, on en trouve un peu partout dans les organismes vivants (humains y compris) et surtout dans l’eau : le H de H2O, c’est l’hydrogène. Le tritium, sa version radioactive donc, « se disperse facilement dans l’environnement », précise Jean-Christophe Gariel, de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN).
Et d’ailleurs, « on en trouve en permanence dans l’atmosphère », ajoute Corinne Castanier. 0,5 à 1 becquerel par litre d’air : « C’est notamment les résidus des essais nucléaires atmosphériques des années 1950 et 1960. Mais comme le tritium n’a qu’une durée de vie de douze ans, tous les douze ans sa présence dans l’atmosphère diminue de moitié ».
Pourquoi en trouve-t-on dans l’eau des rivières ?
S’il y a bien quelques cas de pollutions qui n’ont rien à voir avec la production nucléaire d’électricité, l’immense majorité du tritium que l’on retrouve dans les rivières vient de cette industrie. Les centrales nucléaires françaises sont toutes construites à côté de cours d’eau ou au bord de la mer. Car une centrale a besoin de quantités astronomiques d’eau pour refroidir ses réacteurs.
Quand les cuves sont nettoyées « des rejets massifs », selon les mots de la Criirad, sont effectués dans les rivières. C’est ainsi que le tritium se retrouve dans les rivières puis les nappes phréatiques. « Ce sont des rejets autorisés », dit tout de suite Jean-Christophe Gariel. Et Corinne Castanier, de la Criirad, ne dit pas autre chose… Bien qu’elle pointe aussi des fuites, moins contrôlées, dans les tuyauteries des centrales nucléaires.
Par prolongement, on trouve donc le tritium dans l’eau potable, quand l’eau des rivières ou des nappes est pompée pour les besoins de la consommation humaine. Et comme il n’est qu’un dérivé de l’hydrogène, principal composant de l’eau, le tritium n’est évidemment pas filtré. « On ne peut pas piéger le tritium », confirme le directeur adjoint de l’IRSN.
Est-ce dangereux ?
« Le tritium est cancérigène et mutagène », annonce Corinne Castanier. Mais « les niveaux rejetés sont faibles 10, à 15 becquerels par litre d’eau », rappelle Jean-Christophe Gariel. Et, effectivement, si on suit les seuils de référence, ces chiffres ou ceux de l’Acro (sensiblement les mêmes), on est loin du danger. Loin du seuil pour une enquête (100) et très très loin du seuil de potabilité de l’OMS : 10.000 becquerels par litre d’eau.
Circulez, y’a rien à voir ? Pour la Criirad, non. L’organisme conteste ce qu’elle considère être un « traitement de faveur » pour les éléments cancérigènes issus de l’industrie nucléaire. Pour Corinne Castanier, les critères de l’OMS sont beaucoup plus durs pour les cancérigènes issus de la chimie. « Si on s’aligne, il faudrait mettre une limite de potabilité à 30 becquerels par litre, voire 10 becquerels par litre. » Au contraire, à l’IRSN, on ne voit « pas de raison de remettre en cause les seuils [qui] correspondent à des hypothèses qui ont fait leurs preuves ».
« Mais à 100, ça serait déjà une victoire », pour Corinne Castanier. Car la Criirad ne se veut pas alarmiste. « On n’est pas sur un niveau de risque élevé. Et si on boit de l’eau avec du tritium seulement quelque temps, cela ne pose pas de problème. » C’est le long terme, qui inquiète plus. Corinne Castanier s’interroge ouvertement sur le cas de millions de personnes qui boivent potentiellement tous les jours de l’eau avec du tritium. « Puisqu’on parle là de rejets autorisés, du fonctionnement normal des centrales depuis des décennies. »
La Criirad critique là « l’opacité totale » des analyses d’eau, très difficilement accessibles, et, quand elles le sont, « incohérentes » et en tout cas parcellaires. « C’est une honte pour un pays comme la France. Ce ne sont pas des oublis, ce sont des failles et on se demande si c’est organisé. » Du côté de l’IRSN, on assure prendre le sujet au sérieux. « On mène aussi des programmes de recherches sur les effets du tritium à faible dose », dit Jean-Christophe Gariel. « Les résultats ne seront révélés que début 2020, mais je peux déjà vous dire qu’on n’a pas trouvé d’effets particuliers. »
Par Rachel Garrat-Valcarcel, publié le 18/07/19 à 18h28 — mis à jour le 18/07/19 à 18h29
Photo : La centrale nucléaire de Cruas est située au bord u Rhône. (Illustration) — PHILIPPE DESMAZES / AFP
https://www.20minutes.fr/planete/2566843-20190718-eau-potable-doit-inquieter-contamination-radioactive-tritium
Note de facteur à l’article ci-dessous :
- « Ce sont des rejets autorisés », dit tout de suite Jean-Christophe Gariel. (de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)
Rejets autorisés sur le plan légal est loin de vouloir dire sans effet sanitaire…
Depuis Tchernobyl, l’IRSN est encore et toujours à défendre le lobby atomique au détriment de la vérité.
Le problème est que cet organisme emploi 1 777 salariés financés par le contribuable.
Mais c’est sans surprise puisqu’il s’affirme comme « appui technique aux pouvoirs publics et aux autorités« pas comme défenseur des citoyens qui pourtant lui permettent d’exister !
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