Les premiers travaux de terrassement sur le site de Cigéo devraient commencer au plus tard fin 2021. Passage de camions, besoins en eau, bruit et pollution de l’air… Lors d’une concertation organisée par l’Andra, l’agence de gestion des déchets radioactifs, des habitants et des élus locaux ont fait part de leurs inquiétudes.
Gondrecourt-le-Château (Meuse), reportage
Mardi 27 octobre s’est tenue à Gondrecourt-le-Château une concertation organisée par l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) sur le thème de « l’aménagement du territoire et du cadre de vie », en vue de l’installation de son centre d’enfouissement de déchets Cigéo. Une cinquantaine de personnes sont venues participer à cette concertation — dont une majorité d’élus locaux des deux départements concernés par le projet, la Meuse et la Haute-Marne. Tous attendent des réponses à une interrogation de longue date : quand vont commencer les travaux ? La déclaration d’utilité publique (DUP) — qui permet de réaliser une opération d’aménagement sur des terrains privés en les expropriant — de Cigéo a été officiellement annoncée plus d’un mois après son dépôt début août, et les élus ne veulent plus être pris au dépourvu.
Une réponse a été très rapidement donnée par Frédéric Marchal, chef du service Insertion territoriale de l’Andra : « Que ce soit clair, on n’est pas en train de commencer le chantier. » En effet, pour l’heure, la déclaration d’utilité publique est toujours en instruction. Une réponse est attendue au plus tard fin 2021, et devrait permettre les premiers travaux de terrassement.
Situation du centre de stockage souterrain, avenir du laboratoire — existera-t-il toujours une fois le centre créé ? —, implantation du transformateur électrique, réhabilitation de la ligne ferroviaire 027.000 et déviation de la route départementale 60/960… De nombreux points ont été abordés. Les deux derniers ont suscité beaucoup d’interrogations, écartées par David Mazoyer, directeur du centre Cigéo de l’Andra : « Nous ne sommes pas les maîtres d’ouvrage sur ces projets. » En effet, le projet de déviation est aux mains du conseil départemental de la Haute-Marne, et celui de la ligne ferroviaire par la SNCF Réseau.
Capture d’écran de la visite virtuelle du projet Cigéo.
Passage de camions, besoins en eau, bruit et pollution de l’air…
Ce ne sont pas les seuls points sur lesquels s’est attardée l’assemblée. Au cœur des discussions, les problèmes de nuisances générées par les futurs travaux. « On sait combien de camions on va avoir sur nos routes ? », a demandé une élue. Réponse des représentants de l’Andra : « Nous n’avons pas de chiffres à vous communiquer pour l’instant. » Sur le site de l’Andra [Voir p.26 ici.], un élément de réponse est tout de même donné. L’agence estime à 4.500 le nombre de véhicules qui circuleront par jour sur le secteur en période de travaux, pendant dix à quinze ans, soit plus de deux fois le trafic actuel. « Le réseau est en capacité d’assumer ces hausses du trafic », assurent les représentants.
En revanche, des précisions ont été apportées sur un autre point : les besoins en eau du projet. « Durant la phase de construction, les besoins sont estimés à 500 m3 par jour, et seront couverts par les captages de Gondrecourt-le-Château et d’Echenay », explique le directeur. Cela inquiète les habitants. « Nous sommes déjà soumis à des restrictions d’eau chaque été depuis plusieurs années. Avec les besoins du chantier, la situation pourrait s’aggraver », explique un membre de l’assemblée au directeur. « Les études montrent que ça passe », a simplement répondu Frédéric Marchal.
L’extension des galeries en profondeur est prévue sur plus de cent ans.
Les dernières nuisances, et non des moindres, abordées par l’assemblée ce soir-là : le bruit et la pollution de l’air générés par les travaux. Car si les travaux initiaux sont prévus pour une durée de dix à quinze ans, l’extension des galeries en profondeur est prévue, elle, sur plus de cent ans. « L’impact de ces travaux sera ridicule par rapport à la première phase », a assuré le directeur.
Les représentants de l’Andra ont annoncé la réalisation d’un document spécifique, une « charte chantier », sorte de cahier des charges réalisé conjointement entre l’Andra et les habitants. « Nous vous invitons à réfléchir à la rédaction de ce document. Il nous permettra de respecter au mieux les recommandations des habitants concernant les nuisances, qu’elles soient sonores, ou environnementales », ont-ils expliqué. Cela n’a pas suscité beaucoup d’enthousiasme.
Par Quentin Zinzius (Reporterre), publié le 30 octobre 2020
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