ARME NUCLÉAIRE : ÉTATS-UNIS ET RUSSIE S’AFFRONTENT AUTOUR DU TRAITÉ NEW START, LE DERNIER LIANT LES DEUX PAYS

Explication : La Russie et les États-Unis se sont mutuellement accusés de mettre en péril le traité New Start, mardi 31 janvier et mercredi 1er février. Cet accord est le dernier à lier les deux anciennes superpuissances de la guerre froide en matière d’armement nucléaire.

La Russie a accusé mercredi 1er février les États-Unis d’avoir « détruit le cadre juridique » du traité New Start, qui contrôle et limite les armements nucléaires des deux pays. Une critique qui intervient au lendemain d’accusations de Washington visant Moscou pour le « non-respect » de ses obligations.

Le Kremlin a indiqué ne plus souhaiter laisser l’armée américaine inspecter ses installations, comme le veut le traité, en raison de la guerre en Ukraine, qui a fortement compliqué les rapports entre les deux pays.

Signé en 2010 et entré en vigueur en 2011, le traité New Start s’avère pourtant fondamental dans l’architecture sécuritaire internationale, dans la mesure où il constitue aujourd’hui le dernier accord lié à l’armement nucléaire entre les deux anciens ennemis de la guerre froide.

Négocié par Barack Obama et Dmitri Medvedev, New Start limite le nombre de lanceurs nucléaires stratégiques à 700. Ces derniers incluent les missiles balistiques intercontinentaux, les sous-marins lanceurs d’engin et les avions bombardiers lourds. Quant au nombre d’ogives nucléaires montées sur ces lanceurs, il ne doit pas excéder 1 550.

Un traité prolongé jusqu’en 2026

Ce chiffre n’inclut toutefois pas les ogives conservées dans les stocks militaires américains et russes. Il constitue tout de même une amélioration vis-à-vis du précédent traité, appelé SORT, signé en 2002 et expiré en 2012, qui imposait un plafond nettement plus élevé de 2 200 bombes déployées.

Prévu pour dix ans, le traité New Start a été renouvelé dès le début du mandat de Joe Biden pour 5 ans, la durée maximale prévue par les textes, soit jusqu’en 2026. Il reprend le nom des traités Start I – signé 1991 et entré en vigueur en 1994 – et Start II, signé en 1993 mais jamais entré en vigueur en raison du retrait des Américains du traité Ciel Ouvert en 2002.

Ce dernier, signé en 1972, limitait le nombre de système de défense antimissiles. La décision d’en sortir, prise par l’administration Bush, avait été vivement critiquée, en raison de la menace qu’elle faisait peser sur l’équilibre de la terreur.

Le retrait américain du FNI

En temps normal, si un pays ordonne une attaque nucléaire contre une puissance disposant aussi de l’arme atomique, il est assuré d’être détruit par la frappe de représailles. Un pays qui disposerait de suffisamment de systèmes antimissiles pourrait éviter cette réponse nucléaire, et donc potentiellement avoir recours à l’arme atomique sans crainte des conséquences.

Avant Start I et Start II, l’URSS et les États-Unis avaient également signé en 1987 le FNI, qui visait à démanteler l’ensemble des missiles intermédiaires, d’une portée comprise entre 500 et 5 500 kilomètres. L’administration Trump s’en retire toutefois en 2019, affirmant que la Russie ne remplit pas sa part du contrat. Vladimir Poutine l’imite dans la foulée.

Le traité New Start, une « relique »

Le traité New Start fait donc figure de « relique », comme l’explique dans une note Emmanuelle Maitre, chargée de recherche à la Fondation de la recherche stratégique. Désormais menacé par la guerre en Ukraine, il avait déjà été remis en cause par les États-Unis et la Russie, les deux parties estimant qu’il ne pouvait plus être pertinent sans intégrer la Chine.

En plus de limiter l’armement nucléaire de ces deux pays, le traité prévoit un « régime de vérification et d’inspection poussé », souligne Emmanuelle Maitre. Son absence permettrait aux « stratégies d’incertitude et aux postures d’ambiguïté de prospérer ». Une perspective loin d’être rassurante en matière d’armement nucléaire.

Par Léo Durin, publié le 01/02/2023 à 16h29

https://www.la-croix.com/Monde/Arme-nucleaire-Etats-Unis-Russie-saffrontent-autour-traite-New-Start-dernier-liant-deux-pays-2023-02-01-1201253275