C’était il y a tout juste 50 ans : le 4 mars 1973, le tout premier candidat écologiste de France se présentait à une élection. Il se lançait à Mulhouse, pour les législatives. Cinquante ans plus tard, les témoins de cette époque se souviennent.
Il y a 50 ans très exactement, le tout premier candidat écologiste à une élection en France se lançait dans la bataille. C’était le 4 mars 1973 à Mulhouse. L’écologie politique a donc exactement 50 ans. Pour marquer cet anniversaire, Europe Écologie Les Verts organise une journée de rencontres et de conférences à Kingersheim tout près de Mulhouse, dans le Haut-Rhin.
Avec sur place des visages bien connus de l’écologie politique : Jeanne Barseghian, la maire de Strasbourg, l’ex ministre Dominique Voynet ou encore la secrétaire nationale d’EELV Marine Tondelier. Ils vont notamment célébrer Henri Jenn, le tout premier candidat écologiste de France.
À l’époque, cet ancien ouvrier mulhousien devenu ornithologue, militant à la LPO, la ligue de protection des oiseaux, a une trentaine d’année lorsqu’il décide de se présenter aux législatives. Il se lance sur la circonscription de Mulhouse avec son mouvement, « Écologie et survie » et son slogan : « Halte au cancer de l’expansion« .
« Je n’avais pas l’habitude de parler en public, j’ai hésité, j’ai eu la trouille, mais bon » dit Henri Jenn, aujourd’hui âgé de 82 ans. Finalement, Henri Jenn recueille 2.7% des voix. « C’était pas mal pour une campagne qui a duré un mois et demi sur un sujet que personne ne connaissait » souligne-t-il.
Henri Jenn accueille ensuite l’année suivante René Dumont, premier candidat écologiste à la présidentielle alors en visite dans le Haut Rhin. Henri Jenn et ses compagnons de l’époque militeront aussi contre la construction de la centrale de Fessenheim, la première mise en service en France en 1978.
Convergences entre anti-nucléaires et naturalistes
Le « pape » alsacien de cette lutte contre le nucléaire, ce fut sans aucun doute Jean-Jacques Rettig. Dès 1967 et jusqu’en 1970, ce haut-rhinois a traduit des courriers et des textes scientifiques relatifs au nucléaire. Et puis un beau jour, le 17 juillet 1970, il découvre dans la presse le projet de construction d’une centrale nucléaire à Fessenheim. « Dans le mois qui a suivi, on a créé avec trois autres familles le comité pour la sauvegarde de Fessenheim et la plaine du Rhin » raconte-t-il. Viendront ensuite de nombreuses manifestations, en 1971, 1972, 1973, 1975 et 1977, où plus de 13.000 personnes défileront à Fessenheim. À l’époque, Suzy Rousselot milite elle aussi déjà contre le nucléaire, du côté de Colmar. La jeune femme est pacifiste, anti militariste et surtout antinucléaire.
« J’ai participé bien sûr aux manifestations anti Fessenheim » raconte-t-elle aujourd’hui. « C’était l’engagement essentiel pour nous tous, le symbole de tout ce que l’on refusait. La destruction de notre milieu naturel. On commençait à avoir des informations sur la radioactivité. On en voulait pas. » Aujourd’hui, Suzy Rousselot est conseillère municipale dans le Haut-Rhin sous la bannière d’Europe Écologie Les Verts. Logique, pour elle. « Déjà à l’époque on lisait régulièrement des journaux écologistes. Le mot était déjà présent, puis il y a eu la première candidature écologiste en 1973. La lutte antinucléaire, c’est la base de la lutte écologique, qui s’est construite autour de ce refus du nucléaire. Cela a été une convergence. Entre les antinucléaires, les gens engagés autour de la défense de la biodiversité, les naturalistes, et puis les non violents » explique-t-elle.
Le berceau bouillonnant du Haut-Rhin pour l’écologie politique
Lutte contre la construction de Fessenheim, premier candidat écologiste, le Haut-Rhin semble donc concentrer l’innovation en termes de lutte pour la protection de l’environnement en ce début des années 70. Mais pourquoi spécifiquement le Haut-Rhin ? « On a été une terre très particulière parce qu’avant même Écologie et survie il y avait quand même l’association FRPN, l’association fédérative régionale pour la protection de la nature. La protection de la nature était très présente. C’était des questions auxquelles la population était sensibilisée. Du coup j’avais encore beaucoup d’illusions, je pensais que l’on aurait des résultats meilleurs aux élections, c’était une déception de voir que l’on ne dépassait pas les 5% » explique Laurent Dreyfus, aujourd’hui conseiller régional Grand Est EELV, et qui collait à l’époque les affiches pour Henri Jenn.
Par Antoine Balandra via France Bleu Alsace (France Bleu Elsass), publié le vendredi 3 mars 2023 à 17h23
Photo en titre : Des écologistes alsaciens et allemands manifestent à Neuf-Brisach en 1981 contre les incidents à la centrale de Fessenheim © AFP – AFP Forum
NDLR : Pour information, l’administrateur de votre revue de presse Nucléaire Infos a, 5 ans plus tard (donc en 1978), connu une « aventure similaire ». Co-animateur du groupe écologiste » Écologie et Société » à Annemasse (74), j’ai eu l’honneur d’être candidat suppléant de la liste « Arve Écologie » (nous avions choisi une candidate) lors des élections législatives où nous avons obtenu un peu plus de 5% des voix (donc remboursés de nos frais).
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