Le 19 octobre 2016, suite à une succession de dysfonctionnements, la centrale nucléaire de Golfech (Tarn-et-Garonne) a rejeté en quelques minutes une quantité très importante de radioactivité dans l’environnement. Suite à une relaxe incompréhensible d’EDF en première instance, la cour d’appel de Toulouse examinera cette affaire le 7 octobre 2019, à 14h. Les associations appellent à un rassemblement devant la cour d’appel à partir de 13h30.
Cette audience sera l’occasion de rappeler que la situation à la centrale de Golfech n’a cessé de se dégrader, laissant craindre d’autres « incidents » graves.
Un important rejet radioactif dans l’environnement
Le 19 octobre 2016 au soir, la centrale nucléaire de Golfech a laissé s’échapper un important rejet radioactif gazeux. La radioactivité rejetée est montée en flèche, au point de dépasser pendant 2 minutes le seuil d’alarme à la cheminée. Au total, 136 milliards de becquerels ont été relâchés dans la nature, dont 78 milliards sur cette seule séquence de 2 minutes !
Ce dépassement n’est pas à prendre à la légère : les seuils de rejets, taillés « sur mesure » selon les propositions de l’exploitant, sont fixés très haut, en fonction d’un optimum économique et technique, et non de normes sanitaires. Par ailleurs, selon certains chercheurs, de tels pics de rejets sont susceptibles d’entraîner des impacts sanitaires chez les riverains [1].
Malgré l’importance de ce rejet accidentel, la direction de la centrale avait mis deux jours à le déclarer dans les formes à l’Autorité de sûreté nucléaire et à prévenir la Commission Locale d’Information… et presque une semaine pour informer les médias ! Voilà la « transparence » vantée par EDF !
Une pollution révélatrice d’inquiétants dysfonctionnements
Cette pollution était le résultat d’une série de dysfonctionnements aussi bien techniques qu’organisationnels, révélateurs d’une sûreté défaillante. Les gaines contenant le combustible nucléaire du réacteur 1, censées être parfaitement étanches, laissaient fuir la radioactivité. Ce problème était connu de l’exploitant depuis juin 2016.
En outre, le dégazeur, qui permet de séparer les gaz radioactifs des effluents liquides afin que ceux-ci puissent être stockés pendant 30 jours minimum afin de permettre la décroissance de la radioactivité, avait été mal utilisé et avait mal fonctionné. En conséquence, ces gaz avaient été rejetés directement dans l’environnement. Le non-respect de cette procédure n’était pas anodin, sachant que certains gaz nécessitent plus de 50 jours pour voir leur radioactivité divisée par 1000. Un tel rejet n’avait donc rien d’ « évanescent », pour reprendre l’expression de l’avocat d’EDF en première instance !
Rappelons que la situation à la centrale nucléaire de Golfech ne s’est pas améliorée depuis ce rejet. Au contraire : le 25 septembre 2019, l’Autorité de sûreté nucléaire a pointé une détérioration de la sûreté : « multiplication des incidents » témoignant de « problèmes de compétences et de comportement », « des défauts dans la préparation et réalisation des activités à fort enjeu de radioprotection »… En cinq ans, la centrale a renouvelé la moitié de ses effectifs. EDF semble avoir fait passer la rentabilité avant la sûreté, en se dispensant d’apporter une formation suffisante aux personnes censées intervenir !
Cette situation accroît les risques de nouveaux rejets radioactifs dans l’environnement. Elle est d’autant plus inquiétante que la seule balise IRSN censée mesurer en continu la radioactivité dans l’eau de la Garonne au niveau d’un important captage d’eau potable est en panne depuis six mois maintenant (voir la lettre des associations à ce sujet)…
Un dangereux signal d’impunité pour EDF
Nos associations refusaient qu’une telle pollution reste impunie. Après un dépôt de plainte le 28 novembre 2016, le Réseau “Sortir du nucléaire“ a fait citer directement EDF devant le tribunal le 17 octobre 2017. L’Association Française des Malades de la Thyroïde, les Amis de la Terre Midi-Pyrénées, France Nature Environnement Midi-Pyrénées, France Nature Environnement 82, la SEPANLOG et Stop-Golfech-VSDNG se sont constitués partie civile.
Lors de l’audience de première instance, qui a eu lieu le 13 décembre 2018, la représentante d’EDF a été incapable de préciser si le problème des fuites sur les gaines de combustible persistait. Belle illustration du désintérêt de l’entreprise pour d’éventuelles nouvelles pollutions qui pourraient résulter de ce défaut !
Le 10 janvier 2019, malgré ces faits accablants, le tribunal de police de Montauban a finalement relaxé EDF. Face à une décision aussi incompréhensible, les associations ont décidé de faire appel. L’audience aura lieu à la cour d’appel de Toulouse, le lundi 7 octobre à 14h. Un rassemblement se tiendra devant la cour d’appel, à partir de 13h30.
Ce rassemblement sera aussi l’occasion de rappeler l’urgence d’une sortie du nucléaire, pour mettre fin à la fuite en avant d’une industrie qui met en danger aussi bien les personnes qui travaillent pour elle que les populations.
Note :
[1] Pour ces chercheurs, ces pics de rejets pourraient expliquer le surcroît de leucémie aux alentours des installations nucléaires (voir notamment les travaux d’Ian Fairlie et Alfred Körblein sur le sujet). Plusieurs études font en effet état d’une telle corrélation (voir l’étude allemande KiKK en 2007 et l’étude de l’INSERM parue en 2012.)
Photo en titre : La centrale nucléaire de Golfech ©ladepeche.fr
Par le Réseau « Sortir du nucléaire », 9 rue Dumenge, 69317 Lyon cedex 04, www.sortirdunucleaire.org
NDLR: pour info, la cour d’appel tranchera le lundi 13 janvier 2020 à 14h.
Pour en savoir plus : https://www.sortirdunucleaire.org/Important-rejet-radioactif-a-la-centrale-49838
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