La commune alsacienne se déclare prête à accueillir un démonstrateur pour petits réacteurs modulaires.
La municipalité de Fessenheim (Haut-Rhin), qui compte environ 2 000 habitants, veut de nouveau être la première. Première de France, comme la commune alsacienne l’a déjà été en 1977, lors de la mise en service de ses réacteurs nucléaires de 900 mégawatts (MW) chacun. Puis en 2020, lorsqu’il a fallu fermer ces deux mêmes réacteurs, sur décision politique.
Le maire (sans étiquette), Claude Brender, espère désormais faire de la commune la première du pays à accueillir… un démonstrateur pour petits réacteurs modulaires appelés SMR (pour Small Modular Reactors). L’édile s’est entretenu avec la ministre de la transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, fin janvier. Un rendez-vous obtenu, confirme-t-il au Monde, par l’intermédiaire d’un sénateur (Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants) du Haut-Rhin, Ludovic Haye. M. Brender a remis à la ministre « un scénario de développement », en vue du projet Nuward (contraction de Nuclear forward, « nucléaire en avant ») auquel œuvre EDF.
L’exploitant du parc nucléaire, qui a annoncé, jeudi 30 mars, la création d’une nouvelle filiale Nuward, entend mettre au point une unité de deux petits réacteurs, pour une puissance cumulée de 340 MW. La pose du premier béton est espérée pour 2030. « Le projet priorise sa recherche autour d’un site déjà nucléarisé, explique EDF. À ce stade du développement du design, la liste des sites potentiels est encore à l’étude. La décision finale reviendra aux pouvoirs publics. »
Le ministère de la transition énergétique ne se prononce pas, pour le moment, sur le choix d’un premier site. « Le gouvernement souhaite développer des nouvelles technologies de réacteur et investit plus d’un milliard d’euros dans cet objectif », rappelle l’entourage de Mme Pannier-Runacher.
« Disponibilités foncières »
Pour les pouvoirs publics, Fessenheim procède du symbole. Avec la fermeture de la centrale alsacienne en 2020, le parc nucléaire français a perdu de la puissance pour la première fois de son histoire, passant de 58 à 56 réacteurs. Une décision prise dès le quinquennat de François Hollande (2012-2017), sur la base d’un compromis des socialistes avec les écologistes, hostiles à l’atome. Son successeur à l’Elysée, Emmanuel Macron, a fini par la concrétiser. Avant de proclamer, en février 2022, la relance de l’atome, avec l’intention de lancer au moins six nouveaux réacteurs de grande puissance.
Entre-temps, en octobre 2021, le chef de l’État exprimait aussi sa volonté d’accélérer les travaux sur les SMR. Claude Brender s’était alors déjà déclaré prêt à en accueillir, dans une tribune publiée par le journal L’Opinion, et cosignée avec l’entrepreneur Rafik Smati. « Il est évident que si le site de Fessenheim devait être retenu pour l’implantation de ces [SMR], cela [passerait] par des débats et des votes d’adhésion dans les instances concernées, dont le conseil municipal », souligne à présent M. Brender.
« Notre territoire a été traumatisé par l’arrêt prématuré de la production des deux réacteurs de la centrale nucléaire de Fessenheim », poursuit l’élu, par ailleurs président de l’Association des représentants des communes d’implantation de centrales et établissements nucléaires. Selon lui, « des disponibilités foncières à proximité pourraient également servir pour accueillir un centre de formation pour les futurs exploitants des SMR ».
Indépendamment de nouveaux réacteurs, EDF attend l’obtention, pour 2026, du décret de démantèlement pour l’ancienne centrale. Les travaux de déconstruction dureraient alors quinze ans, selon le groupe. En parallèle, l’exploitant « poursuit les études engagées en vue de construire » un technocentre destiné à recycler une partie des déchets à très faible activité issus d’installations nucléaires. Avec le site de Fessenheim pour « implantation privilégiée » et une mise en service escomptée pour 2031.
Par Adrien Pécout, publié le 30 mars 2023
https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/03/30/nucleaire-apres-la-fermeture-de-la-centrale-de-fessenheim-le-maire-espere-maintenant-des-minireacteurs_6167580_3234.html
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